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Un rapport qualifie d'inhumaines leurs conditions de détention: Plus de 450 Algériens dans les prisons italiennes

par Moncef Wafi

456 Algériens sont détenus aujourd'hui dans les prisons italiennes, selon les dernières statistiques du ministère de la Justice italien. Comparativement aux Marocains (3 722) ou les Tunisiens (652), le contingent algérien est de loin le moins important alors que sur les 7 261 prisonniers arabes, 31 se sont donné la mort ces quatre dernières années dans les prisons.

A ce propos et dans un rapport rédigé par Claudio Paterniti, chef de projets dans l'organisation italienne de défense des droits des prisonniers, Antigone, les détenus arabes vivent dans des conditions inhumaines. S'appuyant sur des enregistrements audio, le rapport affirme qu'ils sont victimes de traitements racistes et d'humiliations systématiques de la part des gardiens de prison italiens. Le même rapport explique que la barrière de la langue, en absence d'interprètes, pose problème pour les détenus arabes confrontés au manque d'orientation, y compris religieuse pour ceux qui veulent connaître l'avis de la religion sur certains aspects de leur vie carcérale.

L'exiguïté des cellules est également soulevée par l'organisation italienne de défense des droits des détenus qui précise que l'espace réservé à chaque prisonnier ne dépasse pas 4 m². Une situation dont les conséquences sont dramatiques puisque, selon la même source d'informations, elle est à l'origine de nombreux suicides parmi la population carcérale, dont huit pour le seul premier trimestre de cette année. Parmi ces derniers figurent un Algérien et un Marocain, statistiques confirmées par le site Ristretti spécialisé dans l'actualité des établissements pénitentiaires italiens. En 2014, déjà, la Ligue algérienne pour la défense des droits de l'homme (LADDH) avait publié un rapport accablant sur les détenus algériens à l'étranger.

La ligue avait accusé «l'Etat algérien de tourner le dos aux problèmes que vivent ses ressortissants à l'étranger notamment les détenus». Houari Kaddour, membre du bureau national de la LADDH chargé des dossiers spécifiques a dépeint une situation, le moins que l'on puisse dire, délicate des Algériens détenus dans les prisons européennes et arabes, plus particulièrement. Il n'est un secret pour personne que la question des détenus algériens à l'étranger, et principalement les conditions de leur détention, refait surface épisodiquement, épousant l'actualité, souvent violente, de ces détenus un peu partout dans les geôles étrangères. Le rapport de la LADDH concerne plus particulièrement les détenus incarcérés en Irak, Maroc, Libye, Tunisie, Espagne, France, Italie, Suisse, Grèce, Bulgarie ainsi qu'à Guantanamo. La ligue reproche à l'Etat son refus de fournir des détails à l'opinion publique sur cette question et l'accuse surtout de ne porter «que très rarement assistance à ces détenus». Ainsi, le plus grand contingent de détenus algériens était logiquement en France avec plus de 2018 prisonniers, (1954 en 2017) suivis des Algériens emprisonnés en Espagne avec plus de 950 numéros d'écrou et plus de 893 en Belgique. En octobre 2013, cinq harraga algériens avaient déposé plainte contre l'administration du centre de détention provisoire des étrangers à Valence en Espagne pour mauvais traitement de la part d'officiers de police après avoir observé une grève de la fin.

Le rapport de la ligue aborde également le cas des détenus algériens dans les prisons arabes où ils vivent dans des conditions épouvantables. Ainsi, ils sont plus de 500 à croupir dans les redoutables prisons marocaines, coupés du reste du monde et dans l'impossibilité d'informer leurs familles. Plus sinistre, les geôles libyennes abritent 400 détenus algériens alors qu'ils étaient 300, en 2011. Huit d'entre eux sont condamnés à la peine capitale, 22 à la prison à vie, cinq à l'amputation de la main, précise encore le rapport. Ils sont plus de 70 prisonniers algériens en Tunisie, plus de 55 en Syrie et plus de 23 en Irak, affirme encore la LADDH. Pour rappel, l'Italie qui avait verrouillé ses frontières maritimes entend accélérer l'examen des demandes d'asile et d'expulser systématiquement les déboutés comme les quelque 500.000 clandestins installés sur son territoire notamment avec l'arrivée au pouvoir de l'extrême droite. Si Rome peine à obtenir le feu vert des pays d'origine, l'Italie prévoit déjà d'établir de nouveaux centres de rétention et de porter à 18 mois la durée maximale de rétention et de transférer vers les expulsions une partie des 4,2 milliards d'euros consacrés chaque année à l'accueil. Depuis le début de l'année, le ministère italien de l'Intérieur a enregistré 7.100 arrivées via la Libye et 3.500 via la Tunisie, l'Algérie ou la Grèce.