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Démographie maghrébine: Comment la France nous perçoit

par Moncef Wafi

Sous le titre générique «Les défis de la démographie au Maghreb», les Lettres électroniques Trésor-Eco, élaborées sous la responsabilité de la direction générale du Trésor français, sous l'égide du ministère de l'Economie et des Finances, dans son édition n°211 de décembre 2017, indique que le Maghreb devra faire face au vieillissement de sa population à l'horizon 2050, précisant que ces niveaux restent toutefois différents selon les pays, l'Algérie, le Maroc et la Tunisie. En effet, en Algérie, si la part des jeunes de moins de 15 ans diminue et celle de la population en âge de travailler augmente, la part des personnes âgées (65 ans et plus) a faiblement augmenté, représentant 6% de la population totale, au contraire du Maroc et la Tunisie.

L'étude, qui décortique l'évolution démographique du Maghreb, rapporte que les trois pays ont achevé la seconde phase de leur transition démographique débutée dans les années 1970. La transition démographique désignant le passage d'un régime traditionnel où la fécondité et la mortalité sont élevées et s'équilibrent à peu près, à un régime où la natalité et la mortalité sont faibles et s'équilibrent également. Ainsi, en Algérie, la première phase de la transition démographique a commencé au début des années 1980 et la population a été multipliée par quatre depuis 1966 alors qu'au Maroc, par exemple, elle a été multipliée par trois. La baisse de l'accroissement naturel résulte de l'effet conjugué de la de la baisse du taux de mortalité liée aux progrès sanitaires, d'un meilleur accès aux soins et d'une forte diminution du taux de fécondité. Cependant, à l'inverse de ses voisins maghrébins, la tendance algérienne de fécondité semble amorcer un retour depuis les années 2000 avec le redressement de son taux dû en partie à un phénomène de rattrapage après la décennie noire. Le document explique que l'Algérie pourrait ainsi connaître une nouvelle vague de fort accroissement de la population jeune. L'autre segment de recherches sur lequel s'est penchée l'étude de Trésor-Eco est le monde du travail. En substance, on est face à une augmentation de la population en âge de travailler mais qui doit composer avec un chômage endémique des jeunes et un faible niveau d'insertion des femmes.

Concernant l'Algérie, la même source d'information rappelle le taux de chômage national évalué à 11,7% pour 2017 qui devraient atteindre 13,2% l'an prochain du fait de la crise économique. Le taux de chômage des jeunes s'établit à 26% avec une forte proportion pour les diplômés de l'enseignement supérieur alors que celui des femmes reste plus élevé (20%) que celui des hommes (8,1%). Le marché du travail au Maghreb se caractérise aussi par une forte segmentation entre un secteur formel d'une part et un secteur informel non réglementé. En Algérie, par exemple, la restructuration du secteur public marchand intervenue dans le cadre du plan d'ajustement structurel mis en place par la Banque mondiale et le FMI en 1994 a provoqué le licenciement de plus de 400.000 personnes. Le secteur formel (emplois permanents couverts par la sécurité sociale) représente 62% des actifs occupés et le secteur informel emploie quant à lui 38% des effectifs.

Par ailleurs, on constate un décalage entre le capital humain et les besoins du marché de l'emploi en dépit d'importants investissements dans l'enseignement supérieur. Un état de fait qui a poussé le pays à revoir sa politique et essayer de mettre en adéquation l'université avec les besoins du marché de l'emploi. A propos du système de retraite, même si l'Algérie bénéficie d'un ratio avantageux en termes de population âgée, estimée à trois fois moins qu'en Europe, une situation théoriquement favorable, l'importance de l'informel a mis en difficulté les organismes de sécurité sociale. Le document estime également que la Casnos, qui devrait théoriquement couvrir près d'un tiers des actifs occupés, ne perçoit qu'à peine 5% des cotisations potentiellement recouvrables.