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Le burkini ou la main étrangère

par Moncef Wafi

Le burkini est désormais une affaire d'Etat en France. Comme si les problèmes ne manquaient pas en Hexagone, les politiques de droite et de l'extrême droite ont convergé cet été pour allumer un feu attisé par Valls, un «républicain» caché parmi les socialistes. Alors que l'on croyait le dossier clos après la suspension par le Conseil d'Etat de l'arrêté anti-burkini de Villeneuve-Loubet (Alpes-Maritimes), plusieurs communes de droite et d'extrême droite ont annoncé être entrées en résistance, ne reconnaissant pas la décision de la plus haute juridiction administrative en France.

Cet appel à l'insurrection, à la haine raciale et à la stigmatisation des musulmans de France est encouragé par la passivité de Hollande et le radicalisme de son Premier ministre, premier pourfendeur du maillot de bain halal. Valls encourage, en effet, à polémiquer sur la question, estimant que la décision du Conseil d'Etat «n'épuise pas le débat qui s'est ouvert». Une grave dérive mais une communication de crise en perspective de la présidentielle de 2017 qui renseigne sur la dangerosité de l'homme prêt à tout pour chasser parmi l'électorat de la droite et du FN.

La chasse au burkini a montré toutes les limites du débat politique en France, occultant du reste les vraies préoccupations des Français en guerre contre la loi El Khomri, pris en otage par leur propre classe politique qui fait passer les intérêts d'un pays étranger avant leur sécurité. Croire que l'affaire du burkini c'est défendre la laïcité en France est de la naïveté la plus absolue. Le burkini, comme Daech, est la fameuse main étrangère qu'on exhibe pour justifier les échecs. Valls y a trouvé la justification de tous les problèmes de la France, le rendant responsable du chômage, de l'insécurité, de l'échec de l'assimilation. Bref, en voulant dénuder les femmes qui le portent, il s'est complètement mis à nu, trahissant son islamophobie qu'on porte dorénavant comme une médaille d'honneur dans les salons politiques et littéraires de la France de la croix et de la kippa.

Outre son aspect éminemment politicien, cette question renseigne sur le degré de l'intolérance qui sévit en France. L'Europe et le monde ont assisté médusés, cet été, à des scènes surréalistes de policiers en uniforme forcer des femmes à ôter leur burkini sous l'œil complaisant des deux-pièces. Le ridicule a été atteint et la France a retrouvé un de ses anciens réflexes : la délation. Le tort est-il à chercher dans cette manœuvre d'allumer des contre-feux ou chez ces femmes qui portent un voile marin ? La logique veut que si on veut respecter sa religion qu'on y aille au bout.