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La caravane passe?

par Moncef Wafi

Les déclarations publiques du double médaillé olympique Toufik Makhloufi portées contre des responsables sportifs les accusant de sabotage ont donné un grand coup de pied dans la fourmilière. L'athlète, fort d'une légitimité sportive, a attendu d'avoir les deux médailles au cou pour pousser une gueulante à l'adresse de ceux qui sont censés les représenter et les prendre en charge avec l'argent que l'Etat a mis en place. Il savait bien que s'il avait parlé avant de franchir la ligne d'arrivée, on aurait mis ça sur le compte de la déception ou de l'alibi.

La presse évoque un milliard de dollars dépensé pour un mandat olympique avec à la clé deux breloques en argent payées de la poche même du natif de Souk Ahras. Malgré ces accusations, malgré la bronca qu'elle a suscitée parmi le peuple, l'attitude de passivité des pouvoirs publics interpelle. Elle choque même les Algériens qui ne comprennent pas comment on peut être satisfait de résultats techniques aussi médiocres que ceux enregistrés à Rio. Hormis la tête d'affiche Makhloufi et la surprise, agréable, du décathlonien Bouraâda, l'autre scandale de cette participation, les athlètes algériens engagés ont été éliminés sans gloire.

La déconfiture a été totale dans presque toutes les disciplines et les entraîneurs ne trouvent d'autres excuses que de s'en prendre à l'arbitrage ou, comble de mauvaise foi, au tirage au sort. Les Algériens, les sportifs et les athlètes qui ont pris part à ces jeux attendent que Sellal mette sur pied une commission d'enquête ou que le Parlement intervienne et demande des comptes. En résumé, ils attendent une quelconque réaction officielle pour que les fautifs, quels qu'ils sont, soient sanctionnés. Qu'on rende publiques les intentions, si au demeurant elles existent, et qu'on réponde aux accusations graves de Makhloufi. La réponse du ministre des Sports a ce quelque chose de sidérant lorsqu'il déclare à qui veut l'entendre que Makhloufi est libre de dire ce qu'il veut et que lui estime que la participation algérienne à Rio est une réussite.

A quoi faut-il s'attendre après ça ? A une enquête fouillée sur où est passé l'argent de l'Etat ? Certainement pas puisque les responsables algériens sont solidaires dans l'adversité. Le coup de gueule de Makhloufi et de Bouraâda a ce quelque chose de revigorant qui souffle un vent de fraîcheur pour aider à supporter ce cynisme érigé en mode de gouvernance. Rien ne sera fait, Sellal et son gouvernement souriront toujours sur les photos officielles, les amis seront toujours aux postes clés et personne du clan ne sera inquiété. On aura beau battre le record du monde de Bolt au 100 m que cela ne changera rien à la donne.