Envoyer à un ami | Version à imprimer | Version en PDF

Mahrez : la surprise !

par Slemnia Bendaoud

Dans le business du football, toutes les fleurs des beaux arbres et souvent très soignés ou prestigieux jardins sont régulièrement inspectées. De près surveillées. Bien mieux, tous les petits bourgeons susceptibles de générer le vrai label du fruit des meilleurs vergers du monde sont à la source identifiés, répertoriés, épiés, détectés, fouillés, testés, pesés et continuellement soupesés.

En amont des recruteurs, activent des spécialistes en la matière, travaillant au profit des « grandes écuries » dans la seule optique de mettre la main sur l'oiseau rare, dès son premier coup d'essai de voler de ses propres ailes. A l'origine, l'œil du grand technicien ajouté au flair de la bonne affaire ne pouvant jamais les tromper.

C'est à travers cette seule philosophie que naissent précocement les grandes stars du foot et émergent forcément tous ces nouveaux talents de la balle ronde. La bonne graine happe le regard connaisseur, à l'instant de sa première perception. La suivre du regard devient une obligation pour le technicien avisé ou très doué. C'est le toucher de la balle qui dicte souvent le diagnostic sur le champ réalisé. Le sorcier n'est-il pas ainsi déniché ?

Et pourtant que de grands techniciens du ballon rond se sont fait piéger ? Et que de talents insoupçonnés ont été bizarrement ignorés, parce que tout simplement mal jugés ? Que de génies du foot ont failli passer à côté d'une grande carrière sportive qui leur tendait pourtant au loin les bras ? A plus forte raison lorsque la pépite ne tape pas vraiment dans l'œil du technicien du premier coup. Ou que celui-ci privilégie le volet mercantile sur l'aspect utile de la prospection sur le terrain effectuée.

Mais au moment où l'oiseau -appelé à être sur le champ bagué- nous file entre les doigts, il n'est donc nul besoin de se lamenter sur l'erreur commise ou de ruminer un quelconque regret, parce que forcément inutile. Et vraiment infructueux ! La période de chasse étant bien entendue déjà terminée. Et toute probable chasse est donc remise à plus tard.

Résultat de la réflexion proposée : il en est plutôt ainsi des futures stars du ballon rond qui naissent de l'anonymat ! Pratiquement du néant ! Sinon comment ont-ils fait pour bien échapper à l'œil scrutateur et pourtant très vigilant des chasseurs de primes ou d'oiseaux rares ?

Dans la logique des choses de ce métier, tout est déjà détecté et orchestré dès l'éclosion de la fleur pour que tout se décide et se confirme à l'instant même de l'éclosion du précurseur bourgeon. Autrement, le printemps ne sera plus là ; et c'est à ce moment-là le beau parfum du produit qui décidera seul du prix du succulent fruit alors mis en vente. Bien souvent, la nature humaine n'obéit à aucune logique : du côté des techniciens comme de celui des pépites. Un regard moins appuyé sur un beau geste technique ou une excellente séquence de jeu fait perdre au pourtant réputé technicien le contrôle de son résonnement. Tout comme une prestation « plutôt bien modeste » du joueur amateur ?pour une raison ou une autre- ne le met vraiment sous les feux de la rampe, tendue à son insu par ceux venus l'inspecter à l'œuvre.

Lorsque l'on arrive à passer si aisément au travers de ces petits trous de souris et surtout entre les innombrables mailles de tous ces filets tendus à dessein par des techniciens hors pairs de la balle ronde, c'est que, quelque part, notre génie ne peut être connu au tout début de notre carrière professionnelle , pour la simple raison qu'on faisait à cette époque-là cette école buissonnière des basses catégories qui leur jouera certainement de bien mauvais tours.

Savoir très subtilement déjouer tous les nombreux plans -plus que méticuleux- des gigantesques radars du football mondial, quêtant souvent à distance le moindre mouvement de tout artiste en herbe de la balle ronde, ne peut être que l'œuvre d'un génie jugé comme très discret à un si jeune âge.

Ainsi est décrit, à l'origine, le portrait-robot de ce nouveau élu au « trône » du meilleur joueur de la « Premier League », en l'occurrence, Riad Mahrez, ce véritable Roi d'Angleterre de l'année 2016, dans les moments forts de sa folle ascension à l'occasion de sa grande consécration comme une légende vivante du foot.

L'enfant de Sarcelles (France) est désormais ce grand joueur de football qui a le monde du sport britannique à ses pieds. Cependant, est-il besoin de préciser que ce natif de la banlieue parisienne est d'origine Algérienne. C'est de Beni-S'nous (Tlemcen) qu'il tire ses racines et y revient chaque année passer ses vacances parmi le hameau de ses aïeuls.

Sur le podium, il devait certainement bien mesurer toute cette différence de niveau entre ce jeune de quartier encore oisif et désœuvré tapant dans un ballon qu'il fut il y a peu de temps et un artiste désormais flanqué de son « trône » durement acquis sur le terrain de vérité mais aussi de ce « label de qualité » qui en fait d'ailleurs son « modèle déposé ». Sa véritable marque de fabrique !

Ce grand génie consiste en « cette habile feinte du droit pour ensuite glisser la balle derrière le pied d'appui et la reprendre dans la foulée de son terrible gauche ». Et il n'est pas le seul produit labélisé du petit prodige Algérien. Sachant, par ailleurs, que tout son jeu est en finesse, sorcellerie, magie et autres trucs très plaisants à voir.

Un aboutissement aussi rapide mais mérité d'une carrière si brillante et non moins très spectaculaire du joueur de Leicester City laisse déjà entrevoir ses énormes possibilités, sa grande marge de progression, ses rassurantes potentialités et extraordinaire expansion à gravir à la série ou dans la foulée d'autres marches d'une gloire ; laquelle se dessine jour après jour à l'horizon.

A la surprise générale, en moins de deux saisons de présence en « Premier League », il est déjà monté sur le Grand Podium, faisant même cet appel du pied à son club employeur pour le suivre en catimini et le rejoindre en intimité sur cette plus haute marche de la gloire du foot britannique ; espoir qu'il tient de tout cœur à éventuellement le réaliser très prochainement.

Sur les trois rencontres qui restent à disputer avant la fin du championnat anglais, son club employeur n'a besoin que d'une seule victoire pour définitivement asseoir sa suprématie et composter son ticket gagnant, déjà fort de sept points d'avance sur son poursuivant immédiat, accroché à domicile lors de son tout dernier matche.

Pour le successeur du belge Eden Hazard de Chelsea, il ne s'agit nullement de l'effet d'un quelconque hasard. Bien au contraire ! Au plan des arguments utilisés et des armes sur le terrain manipulées, il est capable de défier les plus rodés cavaliers de toutes les grandes écuries footballistiques du monde.

Sur ce plan là et dans ce registre plutôt très restreint, il aura mieux fait que les pourtant réputées scintillantes étoiles Africaines ayant pour nom : Mikael Essien, Sergio Aguero, Yaya Touré, Didier Drogba, Jay Jay Okocha, Kanu, et autres encore?

Sa progression considérable dans le jeu ajoutée à ses remarquables prestations et autres très spectaculaires réalisations le placent désormais au même niveau que l'uruguayen Luis Suarez du FC Barcelone (seul non européen avec Mahrez à avoir remporté ce prestigieux trophée), mais aussi à plutôt égale performance que celles autrefois fournies par Eric Cantona, Peter Shelton, Gary Lineker, Kenny Daglish Thierry Henry ou même à présent par les Wagne Rooney, Cristiano Ronaldo, Great Bale et autres encore?

Ayant très vite et dès son jeune âge été bien loin emporté par des rêves vraiment fous de futur vedette du foot, il eut cette formidable chance de prendre à l'heure qu'il faut ce train express -passant pourtant à vive allure près de sa contrée- qui le fit rapidement monter sur le toit du football Anglais. Sans grand-peine et au tout premier essai ! Quel numéro ce sacré Mahrez !

Dans sa vertigineuse ascension, et en dépit de son incontestable talent et remarquable saison, Riadh Mahrez n'aura finalement fait que suivre à la lettre une tradition bien établie chez le gène algérien, en succédant -sur le même continent mais dans un plutôt plus relevé championnat- à son compatriote, le grand maestro Ali Benarbia, élu en 1999 meilleur joueur du championnat français avec les girondins de Bordeaux avant de passer l'année suivante chez le Paris Saint-Germain.

Mahrez n'a donc rien à voir avec l'étoffe de ce « pur produit de la chance » que la providence aura su dans un élan de sa totale inconscience propulser très haut au sein du grand univers de cette voûte céleste pour l'envoyer côtoyer pour un moment plus ou moins long tous ces astres du ballon rond.

Il est plutôt doté de ce grand génie qui a réussi à trahir de nombreux connaisseurs pour les dribbler sur ce chemin qui conduit tout droit à la victoire, au sacre, au podium, à la célébrité et au très prestigieux « Trône ».

Son succès n'est guère usurpé ni même immérité, et le secret de toutes les marches qu'il a volontairement grillées ne réside que dans la vitesse avec laquelle il part comme un cuirassé droit au but, balle au pied. Très adroit sur le flanc droit de l'attaque, il n'oublie cependant jamais d'user à bon escient d'ailleurs de son pied gauche magique qui donne vraiment de la frousse aux gardiens de buts.

Riadh est probablement né artiste. Et Mahrez n'a fait que confirmer son destin, en suivant à grands pas son sinueux chemin tout tracé, grâce notamment à un talent fou. Celui-ci vient de confirmer que Vincent Labrune était absolument dans le tort, et que l'Olympique de Marseille (OM) avait malencontreusement sous-estimé le potentiel technique de l'ex havrais.

Depuis, il traine cette extraordinaire et invraisemblable histoire, plutôt proche de la fiction que de la réalité. Et c'est à Leicester City que finalement la vérité a réellement pris le dessus.

C'est bien avant l'aurore que naissent les belles étoiles ! Les lèves-tard devront, eux, attendre le crépuscule pour les découvrir ! Il faut surtout espérer que le ciel soit également bien dégagé !