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Franches raisons des uns, cyniques mensonges des autres

par Kharroubi Habib

La Russie et l'Iran ne justifient pas leur engagement au côté du régime syrien par de fausses raisons. Moscou et Téhéran l'assument en se prévalant de défendre ce faisant leurs intérêts économiques et géopolitiques respectifs. Les puissances qui cherchent à faire tomber ce même régime et apportent leurs aides à la rébellion qui le combat sont mues par les mêmes motifs mais sans avoir la franchise d'admettre que c'est le cas.

Au lieu de cela, elles se présentent comme agissant par devoir de défense du peuple syrien soumis à la tyrannie sanglante du régime et l'obligation d'ingérence humanitaire. A ce peuple au secours duquel elles prétendent s'être décidées d'agir, elles promettent un avenir après la chute du régime de Bachar El Assad où démocratie et liberté seront réalité en Syrie. Les peuples irakien et afghan ont été abreuvés de la même fallacieuse promesse par ces mêmes puissances. L'on sait sur quoi cela a abouti.

Les plus cyniques d'entre ces puissances à l'égard du peuple syrien sont celles du monde occidental. Elles lui font croire que tel est le projet qu'elles visent à réaliser pour lui alors qu'en fait elles ont pris le parti d'une rébellion dont elles savent que le but ultime est l'instauration d'un régime dont la matrice idéologique est négatrice de la démocratie et de la liberté pour les peuples. Ces puissances occidentales sont parfaitement renseignées que la rébellion qu'elles arment, financent et soutiennent diplomatiquement n'aspire pas à faire triompher un régime basé sur les valeurs et principes qu'elles sont censées défendre. Celui que cette rébellion est déterminée à substituer au régime de Bachar El Assad a pour référence le pouvoir wahhabite d'Arabie Saoudite à tout point de vue plus obscurantiste, liberticide et intolérant que la dictature en place à Damas.

Cette perspective pour la Syrie, les Occidentaux font mine de ne pas la considérer comme inéluctable en cas de triomphe de leurs protégés. Il leur importe peu en effet qu'un régime salafo-wahhabite s'installe à Damas avec pour conséquence pour le peuple syrien une régression qui l'affectera dans tous les domaines. Un tel régime pour aussi odieux qu'il apparaisse à leurs opinions publiques leur est préférable à celui de Damas coupable d'avoir pactisé avec les Etats qui leur contestent leur prétention à régenter hégémoniquement la marche du monde.

Préférence confortée à leurs yeux par le fait que le régime salafo-wahhabite de l'Arabie Saoudite inspirateur de la rébellion anti-régime de Bachar El Assad leur est totalement inféodé et acquis à la défense et à la préservation de leurs intérêts économiques et géostratégiques en Syrie et dans la région. Sauf qu'en Syrie ils ne sont pas dans une partie de bras de fer avec un ou des Etats arabes de la région insignifiants en terme de puissance mais avec des pays, la Russie et l'Iran, qui sont en capacité de leur faire payer cher leur entêtement à se penser encore seuls détenteurs du pouvoir de gouvernance mondiale.