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Une mystification qui suffit à donner bonne conscience

par Kharroubi Habib

Lors du dernier Conseil des ministres au cours duquel l'avant-projet de révision de la Constitution fut examiné et entériné, le chef de l'Etat instruit le gouvernement de s'atteler à la préparation au plus vite des textes de loi qui vont encadrer la traduction dans les faits l'esprit et le contenu de la nouvelle loi fondamentale du pays. Bouteflika ne pouvait mieux faire comprendre, primo, que le débat sur le contenu de l'avant-projet est clos et que les deux formalités par lesquelles il devait encore passer, qui sont l'avis de conformité que devra émettre le Conseil constitutionnel et l'adoption par le Parlement, sont chose acquise. Des textes de loi d'application sont donc en préparation, s'ils n'ont pas été déjà rédigés, dont il faudra scruter avec la plus extrême vigilance les formulations et dispositions, car c'est par leur biais que le pouvoir pourrait rendre caduques les maigres avancées en matière de démocratie, de respect des droits et libertés que recèlent les amendements apportés à la Constitution. Cela lui sera d'autant plus aisé que des textes de loi d'application de cette nature ne risquent nullement d'être « retoqués » par un Conseil constitutionnel censé veiller à leur conformité avec l'esprit de la loi fondamentale du pays, mais soumis aux volontés du pouvoir exécutif ou par un Parlement dont la majorité n'a rien à refuser à celui-ci étant par intérêt disposée à avaliser tout « tripotage » juridique qui rendrait purement formelles les dispositions démocratiques et de l'Etat de droit inscrites dans la nouvelle Constitution.

Il n'est pas dans l'intention du pouvoir en place de traduire dans les faits les quelques avancées qu'il a été contraint de consentir. Il en a saupoudré sa nouvelle Constitution pour complaire à ses partenaires étrangers qui l'ont pressé d'apporter quelques amendements constitutionnels qui créeraient l'illusion que le processus politique dont Bouteflika a pris l'initiative vise à parfaire la démocratie et l'Etat de droit en Algérie. Exercice parfaitement maîtrisé par Bouteflika et l'équipe qu'il a chargée de les rédiger, au sens où ce qu'ils ont mis dans l'avant-projet constitue un semblant de progrès vers la démocratie tout en évacuant la revendication d'un changement de système politique en Algérie avec tous les travers de sa nature profondément antidémocratique. L'Allemagne a été la première à faire savoir qu'elle se contente de la fausse vraie démocratie à laquelle joue le pouvoir algérien. Il n'y aura pas qui s'en offusqueront car ce minimum leur suffit concernant un pays qui recèle des potentialités dont leur intérêt national a tout à gagner en les mettant à son service, mais qu'ils considèrent du haut de leur mépris comme inéligible à se doter d'une démocratie sans restriction et à l'assumer pacifiquement.