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Un esprit éclairant s'est éteint

par Kharroubi Habib

Dans le message de condoléances qu'il a adressé à la famille de Hocine Aït Ahmed qui s'est éteint mercredi à Lausanne en Suisse, le président Bouteflika n'a pas usé d'exagération en qualifiant le défunt de « sommité politique dont les valeurs humaines, la finesse et l'intelligence politique inégalées ont éclairé un pan de l'histoire du militantisme algérien et marqué de leur empreinte l'histoire de tous les mouvements de libération de par le monde ».

Oui « Da L'Hocine » comme le surnomment affectueusement les militants qui ont partagé son combat et ses espérances pour l'Algérie, a été un aigle politique dont la disparition est d'autant plus ressentie et déplorée par les Algériens qu'elle intervient à un moment où par ses qualités il aurait pu être source d'inspiration pour tous les patriotes qu'inquiète la grave situation à laquelle l'Algérie est confrontée. Opposant de la première heure au système politique qui a été mis en place au lendemain de l'indépendance et en rupture avec tous les régimes qui l'ont perpétué, Aït Ahmed n'a pas pour autant dévié des principes sur lesquels il a basé son combat à savoir contribuer à l'émergence d'un Etat démocratique et de droit et à la préservation de l'unité nationale.

Il ne fait aucun doute qu'Aït Ahmed est parti avec l'amertume de ne pas avoir entrevu que le pays auquel il a voué sa vie et ses combats s'achemine vers l'avenir qu'il voulait pour lui. L'on gardera de lui qu'il a pourtant tenté de l'y engager en soumettant des propositions politiques auxquelles le régime mais aussi une grande partie de la classe politique ont fait la sourde oreille. La dernière d'entre elles a été celle que son parti le FFS leur a soumise consistant en l'organisation d'une conférence nationale pour un dialogue inclusif sur les voie et dispositions à convenir pour sortir l'Algérie de la crise politique en la dotant d'un Etat fort parce que combinant démocratie et respect des droits de l'homme et du citoyen.

Avec sa disparition il nous manquera l'esprit éclairant qu'il a été. Il ne nous reste, hélas, que des nains politiques dont les déclarations « éplorées » suintent d'hypocrisie. Presque tous se réclament subitement de son héritage politique et lui tressent des panégyriques à la gloire de ses qualités, alors que de son vivant ils furent pour la plupart parmi ses féroces et injustes pourfendeurs. Sacrifiant à l'émotion qui étreint le peuple algérien suite au décès de l'un de ses plus nobles fils, ils n'ont qu'éloges pour le défunt mais ils se garderont de reprendre à leur compte la vision que celui-ci a eue d'une Algérie indépendante. Car cette vision exclut que l'Etat algérien soit soumis aux intérêts claniques ou individuels. Ce qu'il est devenu hélas et ce qu'Aït Ahmed n'a eu de cesse de dénoncer tant qu'il en a eu la force physique.

L'essentiel est que le souvenir et l'exemple de « Da L'Hocine » resteront dans la mémoire collective des Algériens qui s'en inspireront pour réaliser le projet qui leur est commun avec lui: une Algérie renouant avec les principes tracés pour elle par la déclaration de Novembre 54.