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LA CAGE A LIONS EST OUVERTE

par M. Abdou BENABBOU

La politique ne serait donc ni morale ni éthique. Cette théorie machiavélienne s'est durablement ancrée un peu partout pour rétrécir la dimension humaine et la ramener à sa vraie proportion. Avec ses lourds problèmes, son Histoire contrariée et malmenée, l'Algérie prise en étau entre la force des armes et celle de l'argent n'échappe pas à cette règle établie.

Le recouvrement de sa souveraineté a emprunté une voie que des politiques propulsés par le hasard ont cru à vue d'œil, par sincérité ou par calcul, peu importe, imparable. On a cru que la démagogie et le populisme étaient des recettes prophétiques pour faire d'une population que l'on croyait aveugle un peuple de messies.

Ce qui se passe aujourd'hui au sommet de l'Etat est la résultante logique des péripéties escarpées vécues depuis l'indépendance et bien avant qui atteste que la morale et l'éthique seraient une lointaine chimère parallèle toujours inconciliable avec la tentation de la mise en avant de la raison d'Etat.

Le régime actuel s'est imposé par la force des armes et il ne s'est pas caché d'affirmer qu'il ne pouvait s'installer qu'avec la bénédiction des armes. Depuis de l'eau a coulé sous les ponts. La cage à lions s'est ouverte et les gorges se sont remplies de plus que les trois quarts. Prétendre renouer avec la morale en tournant le dos aux forces qui ont porté sur leurs dos leur propre compréhension d'un pouvoir est un exercice ardu et périlleux. Les crispations et les spasmes qui foisonnent aujourd'hui au cœur de l'Etat sont le produit d'un pacte qui s'est fissuré. Les ondes de choc de cette particulière fissure ne se limiteront pas à la mise à l'écart de quelques généraux ou à quelques brouilles entre un industriel et un ministre parce qu'une grande partie de la classe politique reste confinée au rez-de-chaussée de ses humeurs.

Parce que malheureusement et depuis que le monde est monde, la politique n'est ni morale ni éthique. Et elle ne le sera jamais.