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Le temps de la diversion

par Kharroubi Habib

Quand ils sont confrontés à des situations dont ils perdent le contrôle, les gens du pouvoir recourent dans presque tous les cas à la vieille mais inusable et souvent efficace ruse de la diversion. Les dirigeants algériens sont passés maîtres en la matière et leur expertise est telle que quand ils s'adonnent à l'exercice, la réussite est quasi systématique au rendez-vous.

Ce bon vieux procédé, ils sont déjà en train d'en peaufiner un scénario à mettre en scène pour emmener les Algériens à moins se préoccuper de la situation économique et financière du pays dont la gravité est susceptible de devenir le déclencheur chez eux d'un mouvement de contestation anti-pouvoir de la force d'un tsunami ravageur. Nous l'avons déjà évoqué, le scénario pourrait consister en des initiatives politiques de la part du pouvoir au but que l'opinion publique et les acteurs politiques se focalisent sur elles et en oublient ce faisant que le pays à la dérive économique et paralysé politiquement n'a plus rien à attendre de salvateur de ceux qui l'ont mis en cet état.

La relance du projet de révision de la Constitution nous apparaît à ce titre l'astuce dont le pouvoir va se servir et qu'il nous servira très prochainement. Mais ce n'est pas la seule cartouche dont il dispose. Il a aussi celle de créer l'illusion que l'Algérie est autrement plus menacée par le réveil de l'islamisme intégriste que par la crise économique et financière qu'elle subit. Sa passivité et son silence face aux manifestations et agitations annonciatrices de ce réveil ne doivent pas s'interpréter comme impuissance de sa part à y mettre un terme. Sans imputer au pouvoir d'avoir favorisé en sous-main le réveil et l'agitation de ce courant islamiste intégriste, l'on peut néanmoins avancer qu'il y trouve son intérêt qui est qu'il constitue un « bourourou » qui par le danger qu'il représente aux yeux des Algériens les dissuadera d'entendre les voix qui prêchent le changement du système politique et le départ du pouvoir qui en est l'émanation.

C'est donc probablement avec ce calcul que les autorités laissent faire et dire les islamistes intégristes qui s'agitent. Leur agitation a pour lui l'avantage d'entretenir la peur d'un retour à la décennie rouge sanglante, mais aussi celui de semer la « zizanie » au sein du courant islamiste dont les composantes légales ont manifesté la velléité de se rassembler contre le pouvoir. Madani Mezrag et les comparses au nom desquels il parle font en effet autant peur à ces composantes légales de l'islamisme politiques qu'aux citoyens qui ont en aversion ce courant.

La question est de savoir comment s'y prendre pour faire échec à la stratégie de la diversion du pouvoir et le ramener à revenir aux fondamentaux à l'origine de la crise nationale multidimensionnelle qui sont que c'est le pouvoir par son aveuglement et sa gouvernance calamiteuse qui sont le problème dans cette crise. Sans solution en premier de ce problème, une révision constitutionnelle n'aboutirait qu'à redonner souffle au pouvoir ainsi considéré et Madani Mezrag et ses affidés persisteront dans la provocation du peuple algérien.