Faut-il croire Belaïz quand il promet la mort programmée de
la bureaucratie ou l'écouter, sourire d'un sourire las de celui qui en a
entendu d'autres, hocher la tête et attendre les promesses d'un nouveau
ministre de l'Intérieur qui viendra avec un nouveau programme pour nous sauver
du tsunami administratif. Ce qu'a dit Belaïz sur comment en finir avec les
tonnes de documents exigées pour n'importe quel dossier administratif est
réconfortant, bienvenu et une porte entrouverte sur le 21ème siècle. La réponse
du ministre est bonnement basique, logique en décidant de simplifier les
procédures administratives par l'annulation de près de 50% des documents
demandés.
En décidant cela, il n'a rien inventé, ni procédures
révolutionnaires, ni restructuration en profondeur de l'Administration. Il n'a
recruté ni super génies de la paperasse, ni une équipe de tueurs à gages de la
bureaucratie. Il a tout simplement décidé de faire passer le bon sens et la
logique au détriment de cette volonté de certains Algériens à pourrir,
gratuitement et pour le fun, le quotidien de tous les Algériens. Où l'on va, à
n'importe quelle porte où on frappe, à tous les guichets où on est obligés de
courber l'échine pour « déranger » un préposé dans sa sieste ou dans ses
discussions oiseuses avec la voisine d'à côté, à la mairie, à la daïra, à la
wilaya, pour un passeport, une carte d'identité, une résidence, l'Algérien est
confronté à une montagne de papiers. Et l'Everest ou l'Annapurna, à côté, sont
de simples monts à escalader. Si les promesses ministérielles sont suivies
d'effets sur le terrain, la question qui se pose est pourquoi avoir autant
attendu pour rendre au citoyen lambda sa dignité ? La solution est là,
présente, accessible, facile et plus économique mais on a préféré laisser
l'Algérien se noyer dans un océan de paperasse juste pour le plaisir sadique de
le voir péter les plombs, poussant une brouette de documents à fournir, et
passer son temps entre extrait de naissance, fiche familiale, un casier
judiciaire ou une nationalité. En Europe et dans le reste du monde civilisé, il
n'est besoin parfois que d'un seul numéro d'identification qui vous suit toute
votre vie. En Algérie, on a besoin d'un papier pour justifier qu'on existe,
d'un autre qu'on n'est pas encore mort, de trois autres pour justifier de son
statut d'autochtone, de 15 documents pour voyager, de 60 pour créer son
entreprise, de mille papiers pour éternuer, voter, marcher dans la rue, avoir
une petite amie, et courir nu sur la plage. Pour peu que les administrés
retrouvent un semblant de dignité volée par ceux qui font l'Administration, il
leur restera assez de temps pour se consacrer à retrouver un civisme qui lui ne
doit rien à du papier.