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DES ACTEURS-TEMOINS

par M.Saadoune

Dans leur combat pour l'indépendance et la liberté, les Algériens n'ont pas été seuls. Ils ne l'ont jamais été. Ils ont pu compter sur des hommes libres et justes qui ne transigeaient pas sur les valeurs. Il y a eu un grand nombre de militants en France et en Europe qui se sont engagés et ont soutenu par la parole et par les actes la lutte des Algériens. Au péril de leur vie parfois. Le travail des historiens reste encore à faire sur ce mouvement de solidarité et d'engagement que la lutte de libération nationale a suscité dans le monde.

Très souvent ceux qui se sont engagés l'ont fait au nom des valeurs universelles de liberté et de fraternité. Le soutien qu'ils apportaient aux Algériens découlait de leurs propres combats pour la justice. D'autres y sont venus au fil des années et de la diffusion d'informations que ces individus, organisés par nécessité en réseaux solidaires, ont assurée en complément à celui des Algériens. On ne mesure pas assez l'impact des actions de ces groupes et individus sur l'éveil du monde au combat des «damnés de la terre». Ces femmes et ces hommes ont été les relais et les soutiens des Algériens ; ils ont été aussi d'inestimables éveilleurs de conscience. Ils ont témoigné avec une puissance remarquable de l'universalité du combat des Algériens. Ils ont contribué à le rendre constamment présent sur la scène internationale. Beaucoup de ces compagnons de la libération des Algériens sont restés des amis discrets de l'Algérie et ne se sont pas étalés sur leur rôle.

Notre histoire étant si peu écrite ou très mal écrite, les Algériens, jeunes et moins jeunes, ne peuvent pas imaginer à quel point la lutte de libération a été importante pour de nombreux militants étrangers. Des questionnements (et remises en question) philosophiques, éthiques et politiques ont été suscités et alimentés par ces femmes et ces hommes qui ont choisi d'être du côté de la justice. Dans notre présent désenchanté et avec «l'apport» du laminage effrayant de la transmission historique, on ne mesure pas la grandeur et l'aura du combat des Algériens. Ce laminage ne permet pas non plus aux Algériens de saisir l'immensité du mouvement de solidarité que leur combat a suscité. L'hommage rendu dans le cadre du quatrième Festival culturel international de la littérature et du livre de jeunesse à l'éditeur Nils Andersson, homme de gauche très engagé à ce jour, est à saluer.

Cet homme de conviction, Nils Andersson, aura contribué à ruiner les efforts de la censure en France en éditant des livres interdits et saisis en France. Dans sa maison d'édition suisse, il a publié ces livres-témoins qui n'avaient pas droit de cité en France. «La Question» d'Henri Alleg, La «Gangrène», postfacé par Pierre Vidal-Naquet, la Pacification sous le nom d'Hafid Keramane. Il fait partie de ces intellectuels-témoins qui ont été des amis des Algériens. Et qui le sont restés même si la suite de l'histoire n'a pas été celle qu'ils attendaient. Ce sont des femmes et des hommes comme lui qui ont donné le sentiment aux Algériens de ne pas être seuls dans la dure bataille qu'ils menaient. L'hommage à Nils Andersson le rappelle.