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Ils sont près d'un millier à être rentrés au pays : Le chômage chasse les Algériens de l'Espagne

par Moncef Wafi

Situation économique extrême oblige, l'Europe n'est plus une terre d'accueil et de travail pour les milliers d'Algériens qui se sont installés, depuis des décennies, dans plusieurs pays de l'espace Schengen. Il n'est plus un secret pour personne que les difficultés économiques que vivent les capitales européennes ont influé négativement sur les communautés algériennes qui s'y sont établies, et l'exemple le plus édifiant est celui de l'Espagne où, selon l'ambassadeur d'Algérie à Madrid, Mohamed Hanèche, environ un millier de nos concitoyens sont retournés au pays, au cours de ces deux dernières années. La raison est à chercher du côté de la sévère crise économique qui a touché l'Espagne, enfantant 25% de chômage, un record parmi la population active. Ainsi, les bouleversements géopolitiques, qui ont affecté les pays de la rive sud de la Méditerranée en 2011, ont eu des conséquences importantes sur les migrations en provenance de cette région et à destination des pays du Sud de l'Europe. Mais, après près de 20 ans d'une croissance économique soutenue engendrant une forte augmentation de l'immigration, essentiellement motivée par des raisons économiques (pénuries de main-d'œuvre), l'Espagne semble arriver à la fin d'un cycle en matière d'immigration. L'impact de la crise économique de 2008, qui a plongé le pays dans une très grave récession, a une des répercussions frontales sur le flux d'immigration. L'ambassadeur algérien à Madrid a expliqué que le taux de chômage, jamais enregistré dans l'histoire contemporaine de l'Espagne, s'est traduit par un manque de recrutement, notamment dans les secteurs où activent les Algériens, à savoir la construction et l'agriculture. Et, face à cette crise d'emploi et ses conséquences socioprofessionnelles sur les 54 mille immatriculés à la section consulaire de l'ambassade et au consulat d'Alicante, plusieurs Algériens ont, ainsi, préféré rentrer au pays. Et à propos de cette situation, Halim Benatallah, le secrétaire d'Etat chargé de la Communauté algérienne à l'étranger, avait déclaré, en janvier 2011, après une visite en Espagne où il avait rencontré les membres de la communauté algérienne, que «beaucoup de jeunes sans papiers désirent rentrer au pays au vu des difficultés liées au travail qu'ils rencontrent au quotidien et de durcissement de la législation espagnole qui les contraint à choisir le retour au pays», tout en déplorant, par ailleurs, que des parents recourent, ces derniers temps, à immigrer clandestinement avec leurs enfants pour bénéficier des lois européennes qui protègent les mineurs. Les harraga algériens préfèrent s'installer en Espagne où le gouvernement applique, tous les cinq ans en moyenne, la régularisation au profit des sans-papiers vivant sur son sol.

Selon les statistiques officielles, plus de 10.000 Algériens ont été régularisés, entre 2005 et 2010, à la faveur de cette loi. Selon les services consulaires, les Algériens sont installés dans les faubourgs des grandes villes de Barcelone, Alicante, Valence, Logro, Buglosse et de Madrid qui compte entre 2.500 à 3.000 ressortissants algériens. Pourtant, la communauté algérienne est socialement et économiquement dans l'impasse générée par le faible niveau de formation universitaire qui tourne, selon M. Hanèche, autour de 1 à 2%. En Allemagne, sur les 23.000 Algériens qui y vivent, un millier sont des cadres. Evoquant l'histoire de l'émigration en Espagne, M. Hanèche a indiqué que sur le plan historique et sociologique, la communauté algérienne établie en Espagne n'est pas comme les autres communautés nationales vivant dans d'autres pays. Il a, dans ce contexte, précisé qu'il s'agit d'une communauté qui s'est formée au cours des vingt dernières années seulement puisqu'elle ne comptait qu'environ 5.000 ressortissants immatriculés en Espagne en 1995. Halim Benatallah, et après une tournée qui l'a conduit à rencontrer les communautés algériennes installées un peu partout en Europe, a l'intime conviction que leur majeure partie ont décidé de s'installer définitivement dans ces pays. Interrogé sur le nombre d'immigrés clandestins en Europe, Halim Benatallah a souligné qu'il est difficile d'avoir une statistique fiable, précisant qu'en Allemagne, ils sont quelque 1.500 et que depuis 1997, le nombre d'immigrés clandestins rapatriés d'Allemagne a atteint 9.000.

Pourtant, l'exemple de l'Espagne risque de faire des émules puisque la crise ne cesse de prendre des proportions démesurées dont les premières victimes seront certainement les étrangers.