
L'observateur bénisafien a certainement
remarqué, ces derniers temps, le va-et-vient incessant des camions de gros
tonnage circulant quotidiennement en plein centre ville empruntant même une
artère principale, commerciale par excellence. Des citoyens, les riverains
encore plus, sont très inquiets. «C'est insensé, s'écrie un quinquagénaire, de
voir ces engins, hauts de plus de 03m, rouler en plein jour et en plein centre
ville et qu'ils mettent la vie des gens en danger». Un autre de dire «En plus
de tous ces automobilistes et cyclomotoristes qui font de la vitesse excessive,
c'est le comble !». Ces camions sont chargés de sable provenant du dragage du
bassin du port. Renseignement pris auprès d'un service concerné par
l'opération, ces camions ne sont autorisés à circuler en ville uniquement entre
05 et 07h du matin sinon la nuit. En dehors de ces horaires, ils doivent
emprunter l'évitement via la plage de Sidi-Boucif, pour ceux qui se dirigent
vers la sortie Est, et la RN 22 via la plage du puits pour ceux qui prennent la
direction Ouest. Alors, les premiers cités, bravant l'interdit, roulent en
toute quiétude sur cette artère, qui est en plus le poumon du centre-ville où
durant la journée elle grouille de monde et de véhicules légers. Plus encore,
durant les samedis et les mardis (l'après-midi surtout, congé scolaire) où
cette artère bouillonne d'enfants accompagnant leurs parents dans les magasins
en quête d'un achat. L'autre jour, un commerçant raconte avoir entendu une dame
dire «mon Dieu, tous ces camions en plein centre ville sans que personne ne
lève le petit doigt, ça montre que tout le monde s'en fout». Avant-hier encore
(lundi), un de ces gros engins a failli monter sur son trottoir, son chauffeur
était plus occupé à balader du regard ceux qui étaient sur l'autre rive. Même
les automobilistes, des chauffeurs de taxis surtout, ne sont pas restés sans
réaction «Avec ces gros camions, on ne peut ni prendre des clients ni rouler
normalement sur cette artère », dira Safi, avant d'ajouter «Parfois, ils
donnent l'impression qu'ils prennent toute la chaussée». Par ailleurs l'autre
fait qui nourrit aussi une interrogation. C'est pourquoi le sable de dragage
est acheminé vers les terres pleines. Car de mémoire de bénisafien, le sable
dragué était tout le temps largué ou dirigé vers les profondeurs. En 2002, une
société internationale, chargée du dragage du bassin du port de Béni-saf, avait
effectué une opération similaire de 96.000 m3 de sable, tous largués en haute
mer. «C'est une mesure environnementale supplémentaire», répliquera notre
source. Avant d'ajouter que le sable évacué serait commercialisé pour être
utilisé comme produit de bâtiment. Là, il faut être très prudent. Car même si
ce granulat marin peut être utilisé comme matière première dans le bâtiment et
les travaux publics où il peut remplacer les matériaux terrestres équivalents,
il va de soi que des précautions sont à prendre. Selon un spécialiste en la
matière, le sable marin doit subir un traitement au préalable. Son utilisation
dans le gros œuvre de bâtiment sans traitement aboutira à une baisse de la
performance de la structure dans la durée et à une vulnérabilité forte sous
séisme. Un traitement de l'eau et du sel par lavage ou égouttage est donc
nécessaire, suivi ensuite d'un triage puis éventuellement broyage. Quand le
produit fini est utilisé pour fabriquer du béton, il est généralement
nécessaire de rajouter des fines pour obtenir un fuseau granulométrique
optimal. Le traitement du sel a pour objectif d'obtenir un taux de chlorure
acceptable. Car, en effet, une présence trop importante risque d'entraîner la
corrosion des aciers du béton armé, des gonflements et éventuellement des
chutes de résistance à long terme.