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Medelci : «L'Algérie a vécu sa révolution avant les autres, en 1988»

par Oualid Ammar

Après le quotidien espagnol El Pais, la radio française Europe n°1, le ministre des Affaires étrangères Mourad Medelci est allé porter la parole de l'Algérie dans l'émission française «Bibliothèque Médicis», animée par l'omniprésent Jean-Pierre El-Kabbach.

Thème central de cette émission télévisée sur la chaîne parlementaire française «LCP»: Les bouleversements que vit le monde arabe et le cas «Algérie», sous l'intitulé «La révolte du monde arabe».

En compagnie de deux invités, dont un Egyptien, l'animateur a d'emblée relevé que les diplomaties occidentales n'avaient pas vu venir les évènements ou y avaient mal réagi, que ce soit par rapport à la Tunisie et l'Egypte. J.-P El-Kabbach a exprimé son étonnement par rapport à l'Algérie du fait qu'elle n'ait pas été «soufflée» par ce vent de révolte qui balaie le monde arabe. Ce à quoi, le ministre des Affaires étrangères Mourad Medelci a attribué cet état de fait, grosso modo, à la spécificité de chacune des situations.

«L'exemple de l'Algérie indique bien que chacun de nos pays a sa propre rencontre avec l'Histoire?Je voudrais rappeler qu'en 1988, il y a eu un mouvement qui ressemble beaucoup au mouvement que nous avons observé en Tunisie et en Egypte. Ce sont des pays qui sont très jaloux de leur authenticité? Il indique bien la spécificité de l'Algérie», souligne M.Medelci. Chacun a sa propre perception. «L'Algérie a vécu sa révolution avant les autres, en 1988», a fait remarquer le ministre.

A l'époque, c'est un mouvement islamiste fort qui a gagné les élections, a souligné l'animateur de l'émission. Réponse du ministre : «Les islamistes ont tiré les marrons du feu. Le mouvement est né d'une situation économique tendue, on n'attendait pas la poussée de l'islamisme, a estimé M.Medelci en soulignant que «l'Algérie a fait un pas vers le libéralisme économique et politique après 1988».

Une situation post «guerre civile»

Le ministre a fait remarquer que «l'islamisme en Algérie a exploité la situation économique et politique tendue. La conjonction entre ces deux faits a créé cette colère qui est rapidement montée». Dans quelle mesure cette situation est portée par le pays, et dans quelle autre mesure, elle pourrait être inspirée par d'autres : est-ce que ce qui s'est passé en Egypte, ce serait passé au même moment, ailleurs, sans qu'il y ait d'autres facteurs déclencheurs, se sont demandé les débatteurs.

Pour l'invité égyptien, la chute de Moubarak, c'est un seul pas. Il faudra de vraies élections, de vrais leaders? En Algérie, M.Medelci, en réponse à une question sur la vie politique, a indiqué qu'il y a 27 partis, dont 21 siègent à l'APN et que sur les 21, il y a cinq à six vrais partis. En Egypte, un président de parti ne peut pas donner une conférence à l'université, a noté l'invité égyptien. Pas en Algérie. «En Algérie, nous avons plus de 60 quotidiens», a souligné M.Medelci. «Nous avons une législation qui fonctionne pour la lutte anticorruption, la presse fait état des affaires de corruption.» Qu'est-ce qui ne va pas alors, a demandé J.-P.El-Kabbach ? «Ce qui ne va pas bien, c'est d'abord que nous avons une situation en Algérie qui vient après une guerre civile qui a laissé des traces importantes dans la mémoire des Algériens», a noté le ministre algérien des Affaires étrangères? «La principale préoccupation était de retrouver la sécurité, une fois que nous avons retrouvé la sécurité, il a fallu que nous nous reconnaissions dans le regard des autres», a estimé le ministre. Et d'ajouter: «Il a fallu la réconciliation, quand nous avons eu l'un et l'autre, nous avons découvert tous les problèmes à la fois. C'est-à-dire les problèmes de la politique». Est-ce que «la réconciliation nationale a été une réponse suffisante à la guerre civile intérieure», relance le journaliste. «Je crois que c'est une réponse considérée non seulement comme suffisante mais elle est considérée également comme un exemple, comme étant une réconciliation nationale réussie», a conclu en substance M.Medelci.