Un nouveau marché se développe en matière de droit en Algérie avec
l'avènement de nouveaux segments, jusque-là plutôt méconnus, à l'instar de
l'avocat conseil d'entreprise. Porte-drapeau de la sécurité juridique dans les
pays développés, l'avocat est une pièce maîtresse dans l'échiquier économique et
le milieu d'affaires. L'avocat algérien veut conquérir cette place, qui, par
principe, lui revient de droit, mais qui est, cependant, l'objet de convoitise
de toutes parts, aussi bien des puissants cabinets internationaux que les
juristes et autres consultants. C'est, d'ailleurs, en connaissance de cause et
dans l'optique de s'investir dans ce marché prometteur que les avocats
algériens, avec la contribution active de l'Union internationale des avocats
(UIA), avaient, il y a près d'un an, posé, depuis Oran, les premiers jalons
d'une association nationale des avocats conseils d'entreprise. Le séminaire,
organisé hier à Alger, par la direction du projet d'appui à la réforme de la
justice dans le cadre du programme de coopération Meda II, portant sur «la sécurisation
juridique et financière apportée par l'avocat à la création et à l'activité des
entreprises», s'inscrit-il dans cette même entreprise ? Cette rencontre, à
laquelle quelque 40 avocats ont pris part, abritée par la Résidence des
magistrats, s'étale sur deux jours. Les avocats apportent un concours «de plus
en plus utile», en termes de sécurisation juridique, à la vie et aux activités
des entreprises et autres agents économiques, ont estimé hier des experts
nationaux et internationaux. De «grandes perspectives» se sont ouvertes à la
profession d'avocat qui a connu de «profondes mutations» tant dans ses missions
que dans la façon de les assumer, ont souligné des experts lors de ce
séminaire. L'avocat espagnol, Ramon Mullerat, cité par l'APS, a relevé, dans ce
contexte, que le passage d'une ère économique à une autre «a ébranlé la
sécurité juridique», qui constitue «un des principes fondamentaux de l'Etat de
droit». «La sécurité juridique doit être prévisible et fondée sur le droit à un
procès équitable et garantie par la qualité de la loi qui doit être normative,
c'est-à-dire prescrit, interdit et sanctionne », a-t-il précisé. «L'insécurité
juridique «inquiète les citoyens et décourage les opérateurs économiques»,
a-t-il souligné, précisant que la sécurité juridique «est une condition
essentielle du bon fonctionnement des entreprises et du développement
économique d'un pays». Elle implique que les opérateurs économiques puissent, à
l'avance, connaître les avantages et les inconvénients de leurs actes ainsi que
leurs droits et obligations. «L'avocat est un élément essentiel pour
l'existence et la préservation de la sécurité juridique et, par conséquent, de
la protection de la société», a-t-il insisté. Me Roman Oria Fernandez de
Muniain, également avocat espagnol, a relevé de son côté que
l'internationalisation des moyens de production et le flux transnational des
capitaux a fait que les législations nationales «ne peuvent perdre de vue» les
traités internationaux et les règles commerciales, fiscales et administratives
des différents pays. Il a estimé, à cet égard, que la crise financière
internationale qui a engendré une crise de productivité «n'est rien d'autre
qu'une faillite de la sécurité juridique globale», qu'il a résumée par «
l'absence de régulation et de supervision dans les marchés financiers
transnationalisés ». Me Fernandez de Muniain a considéré aussi que la situation
économique mondiale confirme que « le contrôle unilatéral des institutions
financières, comme la Banque mondiale ou le Fonds monétaire international, ou
encore l'Organisation mondiale du commerce, n'offre pas une sécurité juridique
réelle ».
« La sécurité juridique est une pièce maîtresse dans le monde économique
», a-t-il conclu. Me Taib Belloula a, quant à lui, fait un exposé sur la
législation du travail et les difficultés rencontrées par les avocats dans son
application. Pour sa part, le représentant de la direction du Projet Meda II a
fait remarquer qu'« en Algérie, la profession d'avocat semble depuis quelques
années s'engager dans ce vaste mouvement de mutation, avec l'apparition de
cabinets d'avocats spécialisés et d'associations d'avocats où le justiciable
commun peut trouver le pénaliste, le civiliste, le spécialiste du droit de la
famille ». Il a ajouté qu'un autre domaine d'intervention s'ouvre aux avocats,
celui du règlement à l'amiable des conflits, appelé « modes alternatifs de
règlement des litiges », tels que la conciliation, la médiation et l'arbitrage,
prévus par le nouveau Code de procédure civile et administrative, qui entrera
en vigueur en avril 2009.