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Finie la récréation

par Moncef Wafi

F aut-il se rendre à l'évidence que le règne de l'argent est définitivement la seule Constitution qui fait loi dans ce pays ? A croire le parti de Benflis, il ne faut pas s'attendre à une révolution qui balayera les pavés sales d'Alger et que cette guerre déclarée contre la corruption n'est qu'un règlement de comptes et une sévère mise en garde contre ceux qui veulent jouer dans la cour des grands.

A nos yeux incrédules, on avait pensé naïvement à une action de justice visant les symboles de la corruption, les cercles d'intérêts et les traitres de tous bords. Naïvement. A défaut de rien, on se berce d'illusions d'une réhabilitation de l'Etat de droit. Mais non, le peuple a eu son quart d'heure d'espoir et retour brutal à la triste réalité du bled. On décrète quelque part, on ne sait toujours pas d'où, que Tebboune a déjà fait assez de mal comme ça et que la récréation est finie. Ceux qui n'ont pas donné beaucoup de crédit au recadrage du Premier ministre en sont pour leurs frais puisque les marchandises bloquées au port et concernées par les licences d'importation viennent d'être libérées. Preuve en est que la sévère mise au point adressée à Tebboune est passée quel que soit son émetteur.

Retour donc au statu quo ? Oui et non. Oui, avec les mêmes visages qui ont squatté la politique et les centres décisionnels de ces vingt dernières années. Non, puisque ces tirs de sommation ont fait leur effet. La «ligne rouge» dont a parlé Benflis a été franchie et c'est pour cela que cette campagne a débuté. Il ne faut pas chercher loin pour comprendre la logique même de l'existence d'un régime qui joue sur les rivalités et les compromissions.

Ceux qui se voyaient déjà avoir des prétentions présidentiables ont certainement dû faire marche arrière avec ce tir de barrage et rentrer dans les rangs. Quoi qu'il en soit, les Algériens ne se font plus trop de fantasmes sur un Etat où la justice est au-dessus de tous et chaque jour qui passe apporte son lot de vérités.

Tebboune a-t-il été manipulé lui faisant croire qu'il est en service commandé avec la bénédiction du Président ou l'a-t-on seulement utilisé comme épouvantail contre ces fortunes qui lorgnaient d'un peu plus près El Mouradia ? Dans les deux cas de figure, il est victime d'une organisation qui ne reculera devant rien pour arriver à ses fins quitte à trôner sur des ruines.