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Va-t-on poser le vrai problème ?

par Kharroubi Habib



Au vu de son état physique tel qu'ont pu en juger les Algériens en visionnant les images de sa rencontre au Val-de-Grâce avec le Premier ministre Abdelmalek Sellal et le chef d'état-major de l'armée, le président de la République ne rentrera pas au pays dans un proche avenir comme l'ont laissé entendre les hauts responsables de l'Etat qui se sont exprimés sur son état de santé. Il est clair que les séquelles de l'AVC dont il a été victime nécessitent pour leur résorption totale ou partielle une longue période de rééducation à laquelle il est déjà à l'évidence soumis dans l'institution médicale spécialisée à cet effet que sont les Invalides. Une perspective qui n'est pas faite pour mettre un terme à la controverse née aussitôt qu'il a été annoncé le mois dernier la maladie du chef de l'Etat et son transfert pour cette raison en France sur la question de savoir s'il faut ou non proclamer l'empêchement pour lui de continuer à exercer ses fonctions.

Pour les partisans de la solution de la proclamation de l'empêchement, ce qu'il a été donné de constater de l'état physique de Bouteflika à travers les images diffusées par les chaînes de télévision nationales confirme à leurs yeux son incapacité à continuer à présider aux destinées de la nation. Ce que son entourage et les autorités du pays démentent catégoriquement et pour preuve qu'ils disent la vérité ont organisé la rencontre de «travail» aux Invalides entre le chef de l'Etat et Abdelmalek Sellal accompagné du chef d'état-major de l'armée. Le tardif effort de transparence dans la communication officielle qu'a constitué la couverture médiatique de cette rencontre a eu pour objectif de montrer aux Algériens que certes leur président est physiquement amoindri par son ennui de santé mais conserve les facultés intellectuelles qui lui permettent de s'informer, d'orienter et de décider pour ce qui est des affaires nationales. Ce qui exclut donc pour eux l'option de la déclaration d'empêchement à laquelle des voix leur demandent de faire recours.

A moins donc d'une aggravation de son état de santé, Bouteflika restera à la barre de commande du pays jusqu'au terme de son troisième mandat en avril 2014. Persister à demander qu'il en soit écarté avant ce terme ne mènera à rien pour les milieux qui la formulent. Tablant sur le fait que les thérapies de rééducation auxquelles Bouteflika est soumis vont avoir des effets positifs sur son état physique, le pouvoir a fait le pari que le pays peut aller dans ces conditions à une élection présidentielle dans le temps et les formes prescrits par la Constitution hors cas d'empêchement dans l'exercice de ses fonctions pour le chef de l'Etat en exercice. Il est clair aussi qu'à moins d'un rétablissement spectaculaire de son état de santé, Bouteflika ne peut briguer un quatrième mandat. Le temps et l'urgence ne sont peut-être plus à controverser si Bouteflika est apte ou non à rester à la tête du pays jusqu'en 2014 mais d'agir pour créer les conditions de la tenue d'une élection présidentielle dont le scrutin ne se limitera pas à donner un semblant de légitimité électorale à une nouvelle cooptation d'un candidat distingué par le «consensus officiel». Paradoxalement, des forces politiques et des personnalités nationales dont le credo est pourtant que le temps est venu pour l'Algérie d'en finir avec l'ère des présidents cooptés, préconisent sous prétexte d'en finir avec le règne de Bouteflika avant même le rendez-vous électoral de l'an prochain des processus et des scénarios dont la finalité est la perpétuation du mode de la cooptation. Preuve s'il en est qu'ils demeurent imprégnés de la culture du système politique qu'ils font mine de dénoncer et d'en fustiger les méfaits pour la nation et le peuple.