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«AU PRINTEMPS DE QUOI REVES-TU ?...»

par M.Saadoune

« Au printemps de quoi rêves-tu ? De printemps ininterrompu !» Les fameux vers de Jean Ferrat ne sont valables que dans les pays du «printemps» où l'on voit l'avenir, presque, en rose. Un sondage Gallup (*) sur les révoltes arabes dans les pays qui ont connu le «printemps» et ceux qui ne l'ont pas connu dégage des pistes intéressantes.

Dans les pays «printaniers», la victoire des islamistes, l'activisme des salafistes et les transitions compliquées n'entachent pas l'optimisme général. Les opinions sont majoritaires à penser que les choses vont mieux après la révolte qu'auparavant. 80% des Tunisiens le pensent contre 13% seulement à estimer que les choses se sont dégradées. De quoi donner à réfléchir à certains journaux tunisiens qui, sans le dire directement, se lamentent sur la «dégradation». En Libye, on est dans les mêmes proportions avec 78% des sondés à penser que les choses vont mieux contre 12%, ils sont 77% de Yéménites contre 11% et 74% d'Egyptiens contre 20%.

Quatre pays où le printemps n'a été qu'une «saison» sans incidence politique font également partie des sondés, la Jordanie, le Maroc, les territoires palestiniens occupés et l'Algérie. Les plus réservés à l'égard du «printemps» sont les Jordaniens. Seuls 19% perçoivent une évolution positive dans les pays qui ont connu des révoltes contre 68% qui estiment que les choses se sont dégradées. 47% des Palestiniens voient une dégradation contre 38% qui perçoivent une amélioration. Chez les Marocains, la proportion est de 38% de mauvaise perception contre 31% et une part aussi importante d'indécis (31). Quid des Algériens ? Ils sont presque en équilibre avec 41% qui pensent que les choses vont mieux contre 43% qui perçoivent une dégradation et 16% à ne pas avoir d'opinion.

A la question de savoir si les choses vont aller mieux ou pire, les opinions des pays «printaniers» font preuve d'un plus grand optimisme que les autres. 87% des Libyens voient l'avenir en mieux contre 76% d'Egyptiens, 77% de Yéménites et 67% de Tunisiens. La grande proportion de Libyens «optimistes» tient probablement au fait qu'il s'agit d'un pays pétrolier riche et que le «stress» économique y est moins fort qu'ailleurs, notamment en Tunisie. Mais d'une manière globale, les pays qui ont connu des révoltes ne le regrettent pas et ont une vision optimiste de l'avenir.

Comment leur avenir est-il perçu dans les pays qui sont restés «stables» ? Ce sont les Algériens qui ont une vision la plus optimiste avec 41% qui pensent que les choses iront mieux. Mais ils sont exactement 41% aussi à penser le contraire et à s'attendre à une dégradation ! Un match qui expliquerait le statuquo national et les perceptions contrastées au sujet des révoltes dans le monde arabe. 39% des Palestiniens sont optimistes pour l'avenir contre 45% de pessimistes. Les Marocains sont à 30% de «ira mieux» contre 32 de «ira mal». Les Jordaniens sont les moins optimistes avec 59% à voir l'avenir en noir. L'équilibre presque parfait entre «optimistes» et «broyeurs de noir» en Algérie et au Maroc a de quoi donner à réfléchir?

(*) http://www.gallup.com/poll/157400/opinion-briefing-arabs-doubt-benefits-uprisings.aspx