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Massacres à huis clos en Libye

par Kharroubi Habib

Le peuple libyen est en insurrection contre Muammar Kadhafi et le régime dictatorial qu'il lui impose depuis quarante-deux ans. Un bain de sang odieux en découle car, dos au mur, le plus ancien dictateur de la planète est déterminé à la briser coûte que coûte.

 Dès les premières manifestations de la révolte populaire, il a engagé contre elles toutes les forces de répression dont il dispose ou que l'argent du pétrole lui a permis d'enrôler. En Libye donc, la répression des manifestants est menée tout à la fois par la police du régime, les forces spéciales militaires acquises au dictateur, des «baltaguias» rameutés par les soi-disant comités populaires, institutions de base de la prétendue Djamahiria populaire instaurée par Kadhafi, mais aussi des mercenaires étrangers où se côtoient les hommes de mains de Ben Ali ayant pu fuir en Libye la révolution tunisienne et des Africains stipendiés.

 Kadhafi, on le voit, a fait tout donner pour étouffer, même au prix de massacres, la révolte qui veut le chasser du pouvoir. Il ne reculera devant aucune atrocité, car sachant qu'en perdant le pouvoir, le sort qui l'attend ne sera pas celui de Zine El Abidine Ben Ali ou de Hosni Mourabak. Aucun Etat au monde en effet n'est prêt à lui accorder l'asile. D'aucuns Occidentaux exploiteront même sa chute pour en réclamer l'extradition ou pour exiger sa remise au Tribunal pénal international.

 Cette arrière-pensée qu'ils nourrissent à l'égard du dictateur libyen explique en partie la tiédeur de leurs dénonciations du carnage qui est en cours en Libye. Comme s'ils avaient opté pour le laisser s'enfoncer dans l'abjection absolue qui justifierait encore plus les demandes à venir qu'ils formuleront à son endroit.

 Sauf qu'en attendant, le massacre s'opère à huis clos et que la tragédie sanglante dont est victime le peuple libyen peut se solder par le maintien au pouvoir du dictateur et de son régime.

 Certes, des informations qui filtrent de Libye font état du ralliement de policiers et de militaires au peuple soulevé. Cela n'est pas encore suffisant pour faire basculer le rapport de force en défaveur d'un dictateur déterminé à ne reculer devant aucune monstruosité.

 Il faut que la communauté internationale s'engage plus fortement dans la défense du peuple libyen et fasse comprendre au dictateur sanguinaire que trop c'est trop. Plus que Zine El Abidine Ben Ali ou Hosni Moubarak, Muammar Kadhafi est le type même du dictateur pervers intégralement. Lui et son régime ont dilapidé les immenses ressources financières que le pétrole procure à la Libye et font de ce pays un Etat voyou qui a renié tous ses engagements internationaux.

 La pseudo-révolution dont Kadhafi a été le chantre n'a apporté que désillusions aux Libyens. Le grand révolutionnaire que celui-ci a prétendu être s'est finalement honteusement aplati devant George W. Bush, au point de lui livrer tout ce qu'il a demandé uniquement pour préserver son fauteuil et son régime.

 La révolution qui embrase le monde arabe ne peut être totalement libératrice si Muammar Kadhafi reste au pouvoir en Libye. Quarante-deux ans de forfaitures, de mensonges, de retournements et de dictature schizophrénique, voilà le bilan du «zaïm» libyen qu'il va clôturer, hélas, par un bain de sang.