Envoyer à un ami | Version à imprimer | Version en PDF

Coronavirus: Plusieurs pays ferment leurs frontières

par Agences

L'épidémie de pneumonie virale a connu samedi une soudaine accélération hors de Chine, en particulier en Corée du Sud où la situation est jugée "grave", en Italie, et en Iran. L'Organisation mondiale de la santé (OMS) s'inquiète de la vitesse à laquelle le virus s'est propagé en Iran et des risques pour d'autres pays comme le Liban.

En Italie, les 52.000 habitants de 11 villes dans le Nord se sont réveillés dimanche en quarantaine, avec interdiction d'entrer et sortir de leur zone, après une brusque multiplication des cas de nouveau coronavirus et les deux premiers décès d'Européens sur le continent. Le gouvernement a adopté samedi soir un décret-loi très strict qui met à l'isolement 11 villes, 10 en Lombardie (région de Milan, nord-ouest) et 1 près de Padoue en Vénétie (région de Venise, nord-est). "Ni l'entrée ni la sortie ne sera autorisée sauf dérogation particulière", a annoncé le Premier ministre Giuseppe Conte, précisant qu'environ 52.000 personnes sont concernées. Le principal foyer de ce qui pourrait être une épidémie autochtone de Covid-19 en Europe, inédite à cette échelle, se trouve autour de Codogno, une localité de 15.000 habitants dont beaucoup travaillent aux alentours ou à Milan, à 60 km de là. Arrivés de Milan par l'autoroute, des journalistes de l'AFP ont vu dimanche des voitures entrant et sortant de Codogno et du village voisin de Casalpusterlengo (bien: Casalpusterlengo) où une file s'est formée devant un supermarché Lidl. Les clients entrent par groupe de 40 personnes, pratiquement tous portent des masques. "Ne vous bousculez pas", lance un responsable du magasin à une foule d'une cinquantaine de personnes plantées devant l'entrée, portant presque toutes des masques. Une dizaine d'équipes de policiers ont été déployées à Codogno et aux alentours pour établir "un périmètre qui sera d'abord étroit puis pourrait être élargi", explique à l'AFP une jeune policière. Tout en appelant la population à observer une sorte d'auto-quarantaine, le gouvernement a prévu des sanctions allant jusqu'à trois mois de réclusion en cas d'infraction à ces limitations.

132 cas de contamination

Le chef de la Protection civile, Angelo Borrelli, a annoncé un nouveau décompte des cas de contamination: 132 dans toute l'Italie, dont les deux personnes décédées entre vendredi et samedi et trois cas à Rome mais pour lesquels la maladie a été contractée hors d'Italie. Selon le décompte officiel, il y a 89 cas en Lombardie (région de Milan), 25 en Vénétie (autour de Venise), 9 en Emilie Romagne (Bologne), 6 dans le Piémont (Turin) auxquels s'ajoutent les trois cas du Latium (Rome) dont deux touristes chinois et un jeune désormais guéri mais testé positif à son arrivée de Chine. Le patient 1 pour la Lombardie est un homme de 38 ans, Mattia, cadre de la multinationale américaine Unilever qui a un site important près de Codogno, à Casalpusterlengo, où 120 des salariés sur 160 ont été testés. Sa maladie est un mystère car il est exclu qu'il ait été contaminé par l'un de ses amis revenu de Chine en janvier. "Sur la base des tests effectués, (l'ami) n'a pas développé les anticorps", a indiqué le ministre adjoint de la Santé, Pierpaolo Sileri. Très sportif, le patient 1 a participé à plusieurs marathons début février. Involontairement, il a contaminé sa femme enceinte de 8 mois, un ami avec lequel il jouait au foot, trois habitués d'un bar local, des médecins qui l'ont soigné et des patients de l'hôpital de Codogno où il se trouvait de mercredi à samedi. Fermeture de tous les lieux publics dont les entreprises et établissements scolaires, annulation d'événements culturels et sportifs et des excursions scolaires dans toute l'Italie et à l'étranger... Le gouvernement a pris les mesures de confinement afin de tenter de mettre sous cloche une partie de la Lombardie et de la Vénétie pour freiner l'épidémie. Trois matches de championnat de Serie A prévus dimanche ont été reportés --Inter-Sampdoria, Atalanta-Sassuolo et Vérone-Cagliari. Les universités de ces deux grandes régions seront fermées par précaution.

Lieux publics fermés

A Codogno et neuf localités voisines, tous les lieux publics (bars, mairies, bibliothèques, écoles) sauf les pharmacies sont fermés depuis vendredi soir. Les trains de la société privée Trenord ne s'arrêtent plus à Codogno ni dans deux villes voisines. Beaucoup de résidents travaillent dans la métropole de Milan, capitale économique italienne. Des panneaux lumineux annoncent: "Coronavirus, la population est invitée à rester chez elle, par mesure de précaution". A Milan, où se poursuivent les défilés de la Fashion Week, le designer Giorgio Armani a annoncé samedi soir qu'il ferait défiler dimanche ses mannequins à huis clos avec retransmission en streaming "pour ne pas mettre à risque la santé des participants". D'autres marques comme Boss, Laura Biagiotti ou Dolce e Gabbana ont maintenu leurs présentations au public. L'autre zone de contamination est Vo' Euganeo où a été annoncé vendredi le tout premier décès d'un Européen victime du virus, un maçon italien de 78 ans nommé Adriano Trevisan. Une femme du même âge est morte près de Codogno la nuit suivante.

En Vénétie, sous le choc d'avoir enregistré le premier mort italien, les autorités ont soumis à des tests des ressortissants chinois qui fréquentaient le même bar de Vo' Euganeo que le maçon décédé.

Le bilan s'alourdit en Iran

L'Iran est devenu dimanche le pays où le nouveau coronavirus a fait le plus de morts hors de Chine avec huit décès. Le ministère de la Santé à annoncé la mort de trois nouveaux patients touchés par le COVID-19. Au total, il y a huit décès sur un total de 43 cas de contamination. Les premiers cas en Iran et les deux premiers décès, survenus dans la ville sainte chiite de Qom au sud de Téhéran, ont été annoncés mercredi, deux jours avant les élections devant renouveler le Parlement. En guise de "mesure préventive", les autorités ont annoncé la fermeture des écoles et universités, cinémas, théâtres et autres lieux culturels dans 14 des 31 provinces du pays. La décision a d'abord été prise pour la province de Qom. La mesure touche désormais une bande de territoire s'étendant dans l'ouest et le nord du pays: sont ainsi concernées les provinces Markazi, Gilan, Ardabil, Kermanshah, Qazvin, Zanjan, Mazandaran, Golestan, Hamedan, Alborz, Semnan, Kurdistan et Téhéran.

Dans ces zones, tous les événements culturels et artistiques ont été interdits pour une semaine. Cité par la télévision d'Etat, le ministre de la Santé Saïd Namaki a annoncé la gratuité des soins liés à la maladie. Dans chaque ville, au moins "un hôpital sera consacré exclusivement" à l'accueil, au dépistage et au traitement "des cas de coronavirus".

A Téhéran, où ont été détectés 4 des 15 nouveaux cas annoncés dimanche, la municipalité a ordonné la fermeture des fontaines à eau et des échoppes vendant des friandises dans le métro.

Amman ferme son territoire à tout non-Jordanien venant d'Iran, de Chine et Corée du Sud

Le gouvernement jordanien a décidé dimanche d'interdire l'entrée de son territoire à toute personne venant de Chine, d'Iran et de Corée du Sud, sauf à ses propres ressortissants, afin de limiter le risque de propagation du nouveau coronavirus dans le royaume. Le ministre d'Etat en charge de l'Information, Amjad al-Adaylé, a indiqué dans un communiqué que cette décision faisait partie de "mesures de prévention (...) après la hausse des cas de coronavirus en Corée du Sud, en Iran" et en Chine, épicentre de la maladie. M. Adaylé a précisé que cette mesure serait "temporaire". "Les Jordaniens qui viennent de ces pays seront placés en quarantaine pendant deux semaines pour s'assurer qu'ils n'ont pas contracté le virus", a ajouté le ministre.

Il n'a cependant pas indiqué si un ressortissant chinois, sud-coréen ou iranien venant d'un pays n'étant ni la Chine, la Corée du Sud ou l'Iran, aurait le droit de pénétrer en Jordanie.

Cette décision survient après que la Corée du Sud a annoncé dimanche rehausser au plus "haut" son niveau d'alerte concernant le nouveau coronavirus, le pays comptant 556 personnes contaminées et quatre décès imputés au virus. La Jordanie n'a jusqu'à présent rapporté aucun cas de nouveau coronavirus.

Plus grave urgence sanitaire en Chine depuis 1949

Le coronavirus constitue la plus grave urgence sanitaire à frapper la Chine depuis la fondation du régime communiste en 1949, a déclaré dimanche le président Xi Jinping, tout en reconnaissant "des lacunes" dans la réponse à l'épidémie. L'épidémie de pneumonie virale, qui a contaminé près de 77.000 personnes en Chine, dont plus de 2.400 mortellement, "est une crise, une grande épreuve pour nous", a-t-il déclaré, selon des propos rapportés par la télévision nationale. La Chine avait déjà été le berceau en 2002-3 d'une épidémie de Sras, qui avait tué quelque 650 personnes dans le pays, y compris Hong Kong. En comparaison, la maladie Covid-19 s'avère "très difficile à prévenir et à maîtriser", a déclaré le numéro un chinois lors d'une réunion rassemblant les plus hauts dirigeants du pays. En réaction, son gouvernement a placé de facto en quarantaine il y a un mois exactement la ville de Wuhan, berceau du virus, avec ses 11 millions d'habitants. L'épidémie, qui s'est répandue dans une trentaine de pays et territoires, a entraîné un fort ralentissement de l'économie chinoise. Xi Jinping a reconnu qu'elle aurait "inévitablement un fort impact sur l'économie et la société" mais assuré que ses effets seraient "de court-terme" et maîtrisables.