«Nous-mêmes avant de commencer à parler de la maladie du sommeil, on ne pensait pas que c'était aussi important», a reconnu le professeur Bougrida, chef de service de physiologie et exploration fonctionnelle au Chu de Constantine, organisateur jeudi dernier d'une journée sur le thème de l'apnée du sommeil qui s'est déroulée à la Faculté de médecine de Constantine. «On se disait que c'était une médecine de luxe, a poursuivi notre interlocuteur, mais lorsqu'on a commencé à voir que toutes les catégories de la société sont touchées, notre perception de cette pathologie a changé du tout au tout». «Il y a actuellement 20 maladies qui ont un rapport direct avec le sommeil, a-t-il expliqué. L'obésité, par exemple, ne provient pas du fait qu'on mange trop, mais est causée beaucoup plus par une mauvaise hygiène du sommeil parce que, maintenant, avec l'Internet, nos enfants ont tendance à veiller jusqu'à 4h du matin et durant la journée, ils ont fatalement un déficit de sommeil. Et cela entraîne des problèmes sur leur croissance».

Pour le professeur Bougrida, ce nouveau comportement de notre société favorise l'apparition des maladies liées au sommeil qui n'existaient pas auparavant. Et les médecins commencent à se rendre compte maintenant que les maladies du sommeil présentent beaucoup de risques, non seulement pour le malade lui-même mais aussi pour sa société : mort subite, complications cardiovasculaires, incidences négatives sur son travail et, surtout, les risques d'accidents mortels que la maladie du sommeil peut provoquer au volant, etc. «A ce propos, on a vu souvent des chauffeurs de poids lourds qui dérapent sur des routes tout à fait droites, dans des lieux absolument déserts parce qu'il s'étaient endormis au volant. Et puis, la plupart des accidents mortels et spectaculaires qui surviennent ont pour cause l'endormissement du conducteur sur son volant», a indiqué ce praticien.

Ce dernier expliquera encore qu'au Chu Benbadis de Constantine, la consultation et l'exploration fonctionnelle du sommeil a commencé depuis l'année 2012. Aujourd'hui, tout le monde sait plus ou moins que la pathologie du sommeil est traitée à ce niveau, les patients viennent nombreux en consultation et ils sont pris en charge. «Nous avons des rendez vous pour consultation qui vont jusqu'à deux mois», a indiqué le professeur Bougrida. Et sur la question de la prévalence de cette pathologie dans le pays, il a regretté qu'il n'y ait pas de statistiques officielles établies. «Mais cela ne va pas tarder», promet-il. Toutefois, à titre indicatif, il a révélé que dans certains pays européens, le syndrome de l'apnée du sommeil touche 4% de la population générale.

«Dans un pays comme la France, 19% de la population souffre d'insomnie», relèvera par ailleurs le docteur Madoui Fatima-Zohra, chef de service à l'établissement hospitalier spécialisé de psychiatrie Mahmoud Belamri de Djebel Ouahch, qui a fait une communication sur ce thème de l'insomnie qui, a-t-elle affirmé, touche notamment les femmes et les personnes âgées. La conférencière a recommandé de poser systématiquement la question du sommeil au patient. «Souvent la demande ne vient pas au début de la consultation, explique-t-elle, mais c'est au moment où le patient va sortir qu'il révèle qu'il souffre aussi d'absence du sommeil. Si le problème est posé c'est facile, considère la communicante. Mais si le problème est relégué au second plan, il y a une autre attitude à adopter. Mais dans tous les cas, il faut d'abord poser le diagnostique, ensuite utiliser les thérapies cognitives et comportementales pour traiter ce problème du sommeil chez le patient qui en souffre». Enfin, certains spécialistes ont estimé qu'il faut exiger un certificat médical qui déclare les candidats au permis de conduire indemnes de cette maladie du sommeil.