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Le ministre de la Santé en visite, à Oran: Le marketing politique au service de l'industrie pharmaceutique nationale

par Houari Saaïdia

« Je ne disconviens pas que le système d'enregistrement des médicaments était lent et assez contraignant.

C'était plutôt un état de fait. Mais vous en conviendrez, certainement, que les choses se sont, nettement, améliorées, ces deux dernières années, et qu'il y a, aujourd'hui, plus de fluidité dans le mécanisme ».

En réponse à une question du «Quotidien d'Oran» sur les griefs formulés par l'Union nationale des opérateurs de la pharmacie (Unop) liés au dispositif d'enregistrement des produits médicamenteux, le ministre de la Santé, Abdelmalek Boudiaf, a reconnu le bien-fondé de cette requête, mais a précisé que « cela fait partie du passé, puisque les choses se sont considérablement, améliorées, depuis deux ans ».

Depuis Oran, ville dont il a eu à assurer la gouvernance entre 2010 et 2013 et où il prend toujours du plaisir à se promener, en long et en large, à travers les nouvelles structures de son secteur dont il avait lancé ou relancé, les chantiers sous la casquette du wali, M. Boudiaf a décliné, jeudi, les grandes lignes de la stratégie de son département, pour le développement de l'industrie pharmaceutique nationale.

De son propre aveu, c'était cela l'objectif premier de sa visite. Et il a choisi de le faire de,puis l'usine de la société ?Sophal', pionnier du secteur pharmaceutique, en Algérie.

La séance de présentation de ce laboratoire pharmaceutique algérien, qui en 1996, soit cinq ans après son installation, s'est spécialisé dans le développement, la production et le conditionnement des médicaments génériques, le ministre de la Santé en a voulu faire double usage, a priori. Exposer un échantillon réussi et performant de l'industrie pharmaceutique nationale et faire, en même temps, du marketing politique, sur pièce et sur place, autour du médicament « made in Algeria ». La fiche technique de ?Sophal', présentée avec beaucoup d'effets multimédia, se voulait, en même temps, un tableau synoptique sur la stratégie de développement de l'industrie pharmaceutique nationale. En tout cas, en des termes à mi-chemin, entre le discours d'encouragement et l'obligation de neutralité, dans la fonction publique, le ministre de la Santé, de la Population et de la Réforme hospitalière, Abdelmalek Boudiaf, a apprécié le fait que l'opérateur ?Sophal' « joue le jeu », en se conformant, dans son busines-plan, à la politique nationale en matière de médicaments.

«Sophal» comme modèle pour l'Industrie pharmaceutique nationale

Et ce, à travers le lancement, au fur et à mesure, de nouvelles unités de production, afin de couvrir les besoins pharmaceutiques du pays, lui ont permis, aujourd'hui, la commercialisation de 70 produits, sous 4 formes et couvrant 10 classes thérapeutiques, répondant aux normes des bonnes pratiques de fabrication (BPF/GMP), avec 2016, comme année de référence, en termes de production : plus de 30 millions de boîtes, dont 25 millions sous forme injectables et 4,6 millions sous forme de comprimés, soit un chiffre d'affaires net de 2,6 milliards de DA et une progression de 50%, en 3 ans.

Le plan de développement, à court et à moyen termes de ?Sophal', est un autre élément par le biais duquel le ministère de la Santé voulait émettre un message aux « autres », tant ceux qui produisent, déjà, en Algérie, que ceux qui sont porteurs de projets, mais aussi et surtout, ceux qui, par réserve craintive à l'investissement, sur le marché algérien ou seulement par des calculettes basées sur le principe du moindre effort, voient, toujours, l'Algérie comme un (bon) client et non un partenaire.

Aux uns et aux autres, donc, il a été présenté le cas ?Sophal', qui vient de lancer la première unité de production d'antibiotiques céphalosporines de forme sèche ainsi qu'une deuxième unité, prochainement inaugurée, dédiée à la forme injectable, et qui compte, aussi, lancer de nouvelles unités qui fabriqueront, notamment, des gammes et des formes de médicaments, jusque-là importées par l'Algérie ; outre le projet de fabrication, dès 2020, d'anticancéreux et corticoïdes, ainsi que les formes pâteuses, les collyres et les sirops liquides.

Mise en service de la première usine d'antibiotiques, en Algérie

Et, c'est là, une première en Algérie, dans ce même complexe ?Sophal', situé à Hassi Ben Okba, une unité de production d'antibiotiques, inaugurée, d'ailleurs, jeudi, par M. Boudiaf, vient d'entrer en service et se mettra à l'exportation, dès 2018, après la couverture des besoins nationaux, courant cette année.

« La décision d'interdire l'importation des médicaments fabriqués, localement, est un grand stimulant aux industriels locaux », a plaidé M. Boudiaf, faisant savoir que le nombre de médicaments dont l'importation n'est plus tolérée, a atteint 358. « Ce n'est pas une liste figée. Elle peut fluctuer de mois en mois, en fonction des données. En fait, ce que nous exigeons des producteurs de médicaments, c'est qu'ils nous assurent une couverture entière de la demande nationale pour le médicament qu'ils fabriquent, charge à nous d'en interdire l'importation. Au cas où ils ne sont en mesure de garantir qu'un pourcentage donné du marché national, nous faisons avec eux, une sorte de système de quotas, de proportions. Le reste, on est obligé de l'importer ». « Quand on a décidé, a-t-il ajouté, dans le même registre, de suspendre l'importation de certains produits, des labos étrangers, et même des Etats, nous nous approchés pour exprimer leurs craintes quant à leur avenir, en Algérie. Evidemment, c'était pour leur business, pour leurs poches, rien d'autre. Nous avons dit que nous n'avons fait que ce vous faites. Nous n'avons fait que copier sur vous. Vous avez mis, en avant, la transparence, nous nous y sommes alignés. Vous avez joué la concurrence loyale, nous avons fait pareil. Vous avez désigné des pays de référence, nous avons fait pareil. Nous avons fait des écrits à ces labos et à leurs Etats, en leur disant : n'ayez crainte ! Les règles du jeu sont claires, transparentes et tout à fait conformes aux normes internationales ».

Quand l'interdiction d'importer fait réagir Labos et Etats

Répliquant aux doléances de l'Association des producteurs de médicaments, relatives à « une certaine bureaucratie dans la procédure d'enregistrement et à la rigidité du système de prix» et ce, via une question posée par ?Le Quotidien d'Oran' en ce sens, M. Boudiaf a, après avoir reconnu que « le circuit de l'enregistrement des médicaments n'était pas fluide, en effet », a tenu à préciser que « depuis, pratiquement, deux années, les choses ne cessent d'évoluer, dans le bons sens et, aujourd'hui, tout le monde sent un grand changement et une fluidité dans la démarche et qu'on a plus cette bureaucratie d'antan ».

« Dimanche (demain), a-t-il ajouté, le ministre de la Santé , tous ces cadres centraux, en compagnie des représentants des opérateurs, vont visiter le siège de la nouvelle Agence nationale des produits pharmaceutiques (à Alger), en présence de la presse, pour montrer sur place que cet organisme fraîchement installé, est entré de plain-pied dans le travail, qu'il commence, déjà, à recevoir les demandes d'enregistrement, mais également d'autres activités. Avec cette nouvelle instance, le problème d'enregistrement sera réglé de manière définitive ».

L'Agence des médicaments, pour faire le ménage dans le circuit

Le ministre de la Santé tient, par ailleurs, à souligner que « partout dans le monde, on ne s'amuse pas avec les procédures d'enregistrement de régularisation administrative des médicaments à usage de la médecine humaine », rapportant, pour donner une petite idée, là-dessus, cette discussion qu'il a eue avec le directeur d'une société saoudienne, à l'occasion de la signature, mercredi dernier, d'une convention de partenariat pour la création d'une joint-venture de production de médicaments d'ophtalmologie, en Algérie, entre cet opérateur saoudien et un groupe pharmaceutique Algérie. « Je lui ai demandé combien de temps prend, chez-vous, un médicament, nouvellement, fabriqué pour recevoir l'autorisation de mise sur le marché ? Il m'a répondu que cela ne prenait pas moins de 18 mois ».

A la question ayant trait au système de fixation de prix, autre sujet à controverse, le ministre de la Santé a indiqué : « Pour le prix du médicament, il y a des normes internationales. Nous avons un comité interministériel composé de la Santé, du Commerce, de la Sécurité sociale, de l'Industrie et des Finances, installé au ministère de la Santé, et qui siège au moins deux fois par semaine pour fixer les prix. Le fournisseur concerné a le droit d'y assister et de prendre part au débat. En cas de refus, il peut faire appel. Que voulez-vous de plus ?! Il y a eu une rencontre, il y a deux ans, à Alger, sur la lutte contre le sida, où le représentant de l'Onu-Sida et l'Algérie ont lancé un appel pour dire qu'il est grand temps d'ouvrir le marché des médicaments, car nous avons-nous constaté que certains pays ne peuvent même pas se permettre un vaccin. Or, si l'on n'étudie pas, de manière rigoureuse, le prix, nous irons, à coup sûr, vers une bourse ».