Envoyer à un ami | Version à imprimer | Version en PDF

La prévention compromise au sud du pays: Le sida face au poids des tabous

par M. Aziza



En dépit des programmes mis en place par les autorités sanitaires pour lutter contre le VIH/ Sida en Algérie, que ce soit sur le plan préventif ou pour le diagnostic, le traitement et le suivi biologique de la maladie, la lutte reste au niveau local, notamment au sud du pays, otage des tabous et des préjugés.

Les moyens existent pour parvenir à dépister, traiter et suivre les personnes atteintes, mais ce qui manque réellement c'est l'adhésion des malades eux-mêmes au dépistage et au traitement. C'est ce qu'a relevé la sage-femme en chef Wassila Benyaabid, de l'EPSP de Abalassa à Tamanrasset lors de la campagne de dépistage contre le cancer du sein menée par l'association Nor Doha et Roche Algérie.

Quand ce ne sont pas les tabous, c'est parfois l'ignorance totale. Le cas d'une jeune maman de 22 ans est édifiant. Cette jeune femme était la première à se présenter le jour de dépistage du cancer du sein à l'EPSP de Abalassa, alors qu'elle est porteuse du virus du sida. Le comble est que cette jeune femme est à sa troisième grossesse, avec deux enfants déjà contaminés. Cette dernière refuse de prendre des contraceptifs et rejette catégoriquement la ligature des trempes. Même son mari refuse de se faire examiner.

Notre interlocutrice explique que les femmes dans le sud du pays refusent le plus souvent d'adhérer au programme de la contraception et de se faire dépister contre le VIH/Sida ou contre l'hépatite. Elle précise que 10 patientes se sont avérées séropositives durant l'année 2016, après des examens faisant croire aux concernés qu'ils étaient examinés pour d'autres pathologies.

Pas moins de 400 femmes se sont déplacées aux structures de santé pour le dépistage du cancer du sein du 19 au 21 octobre passé. Elles se sont déplacées volontairement pour se faire examiner, mais la majorité d'entre elles refusent de se faire examiner pour le VIH/ Sida.

C'est ce qu'a été confirmé également par le directeur de l'EPSP Mustapha Zenagui qui a précisé que son établissement dispose d'un laboratoire de prévention contre le sida et l'hépatite. Son équipe fait un dépistage actif dans la région. Il explique que ce sont des équipes mobiles qui se déplacent dans les camps, notamment des migrants. Le directeur rassure en affirmant que les migrants, notamment des Subsahariens, sont identifiés dans des quartiers bien définis, comme celui appelé Guattaa El Oued, où il y a beaucoup de migrants, et les consultations se font sur place.

Le directeur explique que ses équipes font la consultation, le dépistage à travers des tests de sérologie rapides et test de l'hépatite. Il précise également que pour chaque cas positif, son établissement envoie les analyses et les échantillons aussitôt à au centre de référence à l'hôpital de Tamanrasset et les mêmes analyses sont transmises par la suite à l'annexe de l'Institut Pasteur d'Algérie, à Sidi Fredj pour une double confirmation. Le directeur confirme que les malades sont pris en charge automatiquement à l'hôpital de Tamanrasset, mais la majorité des malades atteintes du VIH ne l'admettent pas et n'acceptent pas les résultats. Parfois ils ne reviennent plus à l'hôpital et d'autres changent carrément de commune ou de région par peur d'être stigmatisé.