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Hamid Grine: La pub, la crise et la liberté de la presse

par Mahdi Boukhalfa

«Il y a une liberté de la presse totale» en Algérie. C'est ce qu'a affirmé hier samedi le ministre de la Communication, Hamid Grine, à l'occasion de la Journée nationale de la presse, célébrée le 22 octobre de chaque année. Le ministre est catégorique à la question de savoir s'il existe une réelle liberté d'expression dans notre pays. «Il y a une liberté (de la presse) totale en Algérie, c'est une presse libre, la plus libre du monde, consacrée par la Constitution», a-t-il souligné dans un entretien à la radio chaîne 3. La liberté de la presse est «consacrée par la loi et la Constitution», explique-t-il, avant de relever qu'«aucun journaliste n'est en prison, les journaux s'expriment en toute liberté et parfois même dépassent cette liberté, et donc, nous avons une presse totalement libre et des journalistes totalement libres, et j'aimerais bien que l'on cite des exemples où il y a eu atteinte à la liberté d'expression». Plus disert, il ajoute que «nous sommes dans un Etat de liberté d'expression totale. Certains ne partagent pas le même point de vue, c'est bien». Il relève ne pas «aimer l'unanimisme», avant de s'adresser à ceux qui en doutent : «Je leur dis de me donner des exemples de rétrécissement de la liberté. Tant qu'on ne touche pas à la liberté des personnes, vive la liberté d'expression». Avec en bandoulière ses «constantes» que sont «l'éthique, la déontologie et le professionnalisme», Hamid Grine estime que «la meilleure façon de protéger cette liberté d'expression est le professionnalisme.     

On ne doit pas toucher la vie privée des personnes, les moudjahidine et au président de la République. On peut critiquer, mais ne pas toucher ces personnes». Il ajoutera que les journalistes en Algérie sont protégés, parfois à leur insu. «L'Etat protège les journalistes, je suis intervenu pour protéger des journalistes qui ne le savent même pas. Ils travaillaient sans contrat social, et on a pris des mesures pour cela, beaucoup de mesures», et «même le chef du gouvernement est intervenu alors que la santé du journaliste méritait cette intervention». Sur la presse électronique, il a relevé qu'il faut «être prudent». «Il faut demeurer prudent et vérifier l'information. Et ne pas propager la rumeur, qui peut toucher des personnes dans leur dignité. Je suis contre la rumeur et la diffamation, l'atteinte aux personnes». Car pour le ministre de la Communication, «la liberté d'expression, c'est ne pas aller à l'insulte et la diffamation», avant de relever qu'il y a «une presse qui est dans les jugements de valeur». La publicité, l'autre grand souci actuel des éditeurs de journaux, a été également abordée par le ministre pour qui il y a «une crise mondiale, de grands journaux dans le monde sont passés en mode électronique. La crise était prévisible». Cependant, Hamid Grine nuance cette crise avec cette énigmatique phrase en relevant qu'«on ne peut pas laisser tomber le journal qui travaille pour l'Algérie». Et puis, il est catégorique: «Les journaux continueront à avoir des problèmes tant qu'ils ne développeront pas de nouveaux produits», et selon lui, «seuls les professionnels survivront, le tirage (de journaux) n'est pas important» pour lui. «Pour moi, le journal important est celui qui donne de la vraie information, indépendamment de la diffamation et l'insulte». Quant à l'argument selon lequel la publicité est un moyen de pression sur les journaux, la réponse est que «le problème des éditeurs, c'est que de tout temps, la majorité des journaux sont restés dans une posture d'attente de la publicité et de l'Etat», ajoutant qu'il y a des journalistes smicards et des patrons de presse milliardaires». «La crise touche tout le monde à l'échelle mondiale. La crise est générale, et c'est normal que les entreprises publiques veillent à leurs sous en réduisant le merchandising», indique-t-il par ailleurs. Et puis, il faut changer «la vision de compter sur la publicité de l'Etat», assure le ministre selon lequel «ce qui intéresse les éditeurs, ce n'est pas de développer l'entreprise, mais de capter les publicités». «Je leur ai dit de chercher d'autres sources de financements de leurs journaux», rappelle le ministre qui a ajouté que pour avoir accès au financement du Fonds de solidarité de la presse, «il faut que les éditeurs et les journalistes soient réunis. Je leur ai dit de s'organiser pour débloquer cet argent», avant de lancer: «Que la presse assume sa liberté, j'aimerais avoir des associations d'éditeurs et de journalistes crédibles, représentatives». Le ministre a également tenu à lever certains «quiproquos», en affirmant que «l'Etat subventionne toute la presse, publique et privée. Je ne fais pas de distinction entre les deux secteurs, le ministre est celui de toute la presse en Algérie».

Sur le cas des transferts illicites de leurs dividendes à l'étranger de chaînes de télévision «offshore», Hamid Grine est resté prudent : «Il y a quelques soupçons, mais je n'ai pas les réponses, on agira dans le cadre de la loi». Sur la délivrance des agréments pour la création de radios privées, il a indiqué que ce dossier «n'est pas à l'ordre du jour». «Chaque chose en son temps», a-t-il dit, relevant qu'il faut d'abord régler le problème de chaînes de TV et leur accréditation selon le cahier des charges. «Ensuite, on passera à la radio. Je suis pour une avancée graduelle. On n'avance pas à l'aveuglette, et ce sera 2014-2017, comme je l'ai dit. C'est au comité de candidature de faire son travail». Quant à l'Autorité de régulation de l'audiovisuel, «elle fait ce qu'elle a à faire, elle est indépendante», a-t-il dit, avant de préciser que sur «la loi de la publicité, cela dépend de l'APN». Mais «cette loi ne sera pas un plan média, mais pour régler la publicité«. La Journée nationale de la presse a été instituée par le président Abdelaziz Bouteflika en hommage à la publication le 22 octobre 1955 du premier numéro du journal «El Moukawama El Djazaïria», organe du Front de libération nationale (FLN) et l'Armée de libération nationale (ALN).