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Affaire Khalifa : Des dépôts, des cartes de thalasso et des voyages gratuits

par Tahar Mansour

En ce onzième jour du procès Khalifa, le président du tribunal criminel, M. Antar Menouar, a continué d'auditionner les responsables des entreprises nationales et autres institutions publiques, tous accusés de corruption, de trafic d'influence et de perception d'avantages illicites. Les cartes de thalassothérapie, retirées en connaissance de cause ou envoyées sans que leurs destinataires le sachent ou les demandent, en plus des cartes de gratuité pour les transports sur les avions de Khalifa Airways sont les principaux avantages indus reprochés aux ex-dirigeants des entreprises et institutions. C'est le cas de Smati Bahidj Farid, ex- directeur général de l'ENC, entreprise nationale d'outillage et de quincaillerie qui a perdu dans l'affaire plus de 100 millions de dinars. Le prévenu explique qu'il a été obligé d'ouvrir des comptes dans Khalifa Bank car le paiement effectué par les clients de l'ENC était toujours en retard dans les autres banques, et comme la majorité d'entre eux avaient un compte à Khalifa Bank, le virement se faisait souvent le jour même, en tous les cas très rapidement. Revenant à la carte thalasso, il annonce qu'elle lui a été remise par le directeur des ressources humaines du centre de thalasso et qu'il n'a jamais su que les séances étaient payées par Khalifa Bank. Pour le placement de l'argent, il reconnait que c'est surtout l'attraction du taux d'intérêt assez élevé qui les a poussés à opter pour Khalifa Bank ; les autres, privées ou étatiques, proposaient un taux très inférieur. Pour Hamid Bourahla, ex-directeur général de l'Endimed, le placement auprès de Khalifa Bank a été plutôt fructifié puisqu'il rappelle que : «nous avons placé un dépôt de 100 millions de dinars tout en obtenant un prêt de la même somme, ce qui fait que nous avons récupéré notre bien et avec 34 millions de dinars de bénéfices», assure-t-il tout en précisant que c'est son prédécesseur qui avait procédé au dépôt des fonds. Si Amour Said, qui avait précédé Hamid Bourahla à la tête de l'ENDIMED, explique que la majorité des clients de l'entreprise qu'il dirigeait avaient des comptes à Khalifa Bank, ce qui lui permettait donc de récupérer rapidement les paiements des factures. Il ajoute qu'il a toujours refusé de faire des dépôts mais, malgré toute sa vigilance, l'ENDIMED a perdu près de 4 milliards de centimes, produits des créances des clients qui n'ont pu être retirées. Quant à la carte de thalasso, il déclare que c'est le chauffeur du centre de thalasso qui l'a déposée à la direction de l'Endimed. Il précise qu'il n'a jamais vu ni utilisé cette carte qui a constitué une surprise pour lui. En outre : «je n'avais même pas besoin de cette carte puisque j'avais accès au centre qui faisait partie de notre holding Chimie et Pharmacie», argumente-t-il. M. Telli Safi, poursuivi pour les mêmes chefs d'accusation que ceux qui l'ont précédé, était directeur général de l'agence de développement social qui octroyait des microcrédits aux jeunes et s'occupait de la promotion sociale des défavorisés. De prime abord, il demande au tribunal de ne pas permettre aux médias de citer les noms en complet des prévenus car, selon lui, cela leur porte tort. Le président du tribunal, M. Antar Menouar, lui répond qu'il ne peut pas interdire aux médias de citer les noms des prévenus qui passent devant sa juridiction : «c'est leur devoir d'éclairer l'opinion publique et ils ne disent que ce qui est arrivé effectivement», a-t-il affirmé en précisant que c'est seulement quand il y a des mineurs qu'il leur demanderait de taire leurs noms. Poursuivant son audition, et en réponse à une question du juge, le prévenu rappelle que seules deux banques, la BNA et Khalifa Bank avaient répondu à leur demande de gestion des fonds saoudiens pour octroyer des crédits aux jeunes sans emploi. Il explique que Khalifa Bank avait 53 agences ouvertes à travers le territoire national et que cela facilitait aux jeunes demandeurs les étapes de l'octroi des prêts. Il affirme que plus de 3600 jeunes chômeurs ont ainsi bénéficié de prêts pour la création de nombreuses petites entreprises. Il explique aussi que l'institution qu'il dirigeait n'a pas effectué de dépôt mais plutôt ouvert deux comptes courants, l'un pour le paiement des personnels et l'autre pour le virement des sommes destinées aux crédits. Concernant le don de 20 micro ordinateurs fait par Khalifa Bank, M. Telli explique que l'agence est habilitée à recevoir des dons et que c'est suite à l'incendie d'un chalet et la perte de matériels que le don a été fait. L'agence a aussi signé une convention de réduction de 50 % sur les prix des billets d'avion de Khalifa Airways pour l'ensemble du personnel. La carte de thalasso a été une surprise pour lui lorsqu'il l'a vue chez les gendarmes, affirme-t-il alors que : «mon fils a obtenu sa place pour une formation à Oxford en qualité de pilote d'avion grâce à ses compétences et à son niveau scolaire ; je n'ai jamais intervenu et je ne le ferai jamais», a-t-il tenu à préciser. Enfin, il nie avoir utilisé les 500 millions de centimes offerts par Khalifa Bank pour aider les victimes du terrorisme : «c'était juste une écriture comptable», précise M. Telli Safi.

L'AUDITION DES PREVENUS PRENDRA FIN MERCREDI

M. Antar Menouar a annoncé au milieu de l'après-midi que l'audition des prévenus sera terminée ce mercredi, ce qui veut dire que les témoins seront convoqués et entendus à partir de jeudi prochain. Rappelons que le juge aura entendu 71 prévenus et qu'il entendra près de 300 témoins durant les prochains jours.