Envoyer à un ami | Version à imprimer | Version en PDF

Le conflit va atterrir devant les tribunaux : Labidi porte plainte contre Hanoune

par Yazid Alilat

D'escarmouches en polémiques, le conflit entre la ministre de la Culture Nadia Labidi et la porte-parole du Parti des Travailleurs (PT) Louiza Hanoune, va atterrir devant les tribunaux.

Comme promis ,d'ailleurs par les deux antagonistes, dont la ministre de la Culture, Nadia Labidi, qui a, finalement, mis à exécution sa menace d'ester en justice Louisa Hanoune, pour «diffamation». La ministre de la Culture a, dans un communiqué, annoncé, vendredi, avoir «demandé à mes avocats de déposer plainte pour diffamation contre Mme Louisa Hanoune». La plainte a été déposée, jeudi 7 mai, devant le tribunal de Sidi M'hamed (Alger), a tenu à préciser la ministre de la Culture, sociologue de formation. La plainte pour diffamation de Nadia Labidi intervient après ses démentis contre des accusations de la porte-parole du PT sur «un conflit d'intérêt» pour avoir permis le «financement public» d'un projet de film (Le Patio) devant être «produit par une société appartenant à la ministre.»

La ministre de la Culture avait, dans un premier temps, appelé Louisa Hanoune, dans une lettre, de «démentir publiquement» les propos rapportés par le quotidien ?Ennahar El Djadid'. «J'ai appris par le journal ?Ennahar El Djadid' que vous auriez déclaré que -la ministre de la Culture attribue tous les projets du secteur à ses amis ou à sa société», écrit la ministre qui avait menacé de recourir, le cas échéant, à la justice pour déposer une «plainte en diffamation contre l'auteur de ces propos».

La ministre de la Culture avait demandé, également, la constitution d'une «commission parlementaire» pour examiner les accusations portées, à son encontre, par le PT, au sujet du financement de certains projets inscrits dans le cadre de la manifestation «Constantine, capitale de la Culture arabe» et qu'elle juge «infondées». «S'ils ont des preuves, qu'ils les présentent», s'est-elle défendue, indiquant être «disposée à aller loin et détenir des preuves», car il y va de son image et de son honneur.

«Le Président doit intervenir rapidement au risque de voir l'État s'effondrer», a martelé de son côté Louisa Hanoune, lors d'une allocution durant une réunion du bureau politique du PT, au lendemain d'une intervention remarquée à l'APN des députés «travaillistes». Pour la responsable du PT, qui accuse la ministre de la Culture de lui avoir envoyé une lettre de menaces, après ses révélations sur le financement par le ministère du film «Le Patio» réalisé par sa boîte de communication (Procom International), Nadia Labidi «agit comme si c'était une propriété privée. Elle se comporte comme une délinquante, une chef de bande». Hanoune ajoute : «je n'ai aucun problème privé avec elle, mais c'est un comportement délinquant, une délinquance ministérielle. Elle m'a envoyé des gens à la maison, c'est une dérive, jamais vue». Pour elle, «Labidi est coupable d'une opération mafieuse», en finançant un film de sa société de communication et en lui donnant une nationalité tunisienne pour qu'il ne reste pas propriété de l'État algérien, comme l'exige la loi. «On va rendre publiques les preuves», avait assuré Louisa Hanoune. Dans la foulée, la porte-parole du PT accuse, également, de «complicité» le DG de l'ENTV et le ministre de la Communication puisque «l'Unique a un contrat avec la boîte de la ministre de la Culture qui lui vend une émission diffusée, chaque vendredi» (Saha Lahbab).

Le conflit Labidi-Hanoune avait éclaté le 19 avril dernier, avec les accusations de la porte-parole du PT contre la ministre, notamment d'avoir favorisé la production du film «Le Patio» de sa société de communication avec le budget dégagé pour la manifestation «Constantine, capitale de la Culture arabe». Les députés «travaillistes», dont Djelloul Djoudi, chef du groupe parlementaire du PT, avaient chargé la ministre de la Culture, durant une séance parlementaire consacrée au débat sur l'avant-projet de loi sur le livre, au mois d'avril dernier. Djoudi a accusé Nadia Labidi d'avoir monnayé une bourse aux USA pour son fils contre la gratuité, pendant trois jours, du Théâtre national algérien en faveur de l'ambassade des États-Unis à Alger, qui avait organisé une soirée musicale animée par le célèbre orchestre «El Gosto». «C'est contraire à la directive du Premier ministre quant à la nécessité pour les EPIC de rentabiliser au mieux leurs activités et manifestations», avait expliqué le député du PT. La ministre de la Culture est, également, accusée par le PT d'avoir «attribué, contre l'avis du Conseil du gouvernement, 17 milliards de centimes, à Amine Kouider, chef de l'orchestre symphonique national, pour son spectacle d'ouverture de la manifestation Constantine, capitale de la Culture arabe».

Le PT n'en reste pas là, puisqu'il a accusé Nadia Labidi d'avoir attribué un budget de 800 millions de centimes à «Nouba», une association dont elle est membre fondatrice.

«LE PATIO», LE CADC ET UNE VIVE POLEMIQUE

Sur la production du projet de film «Le Patio», Nadia Labidi ne s'était pas, directement, prononcée, mais le CADC, un centre dépendant du ministère de la Culture, a apporté un démenti aux accusations du PT. Le Centre algérien de développement du cinéma (CADC), un établissement public, sous tutelle du ministère de la Culture, avait démenti «formellement les accusations du Parti des Travailleurs concernant le financement du film ?Le Patio'» du réalisateur Sid Ali Mazif. Dans un communiqué, le CADC a précisé que les accusations de Mme Hanoune et de M. Djoudi, selon lesquels la Société Procom International aurait bénéficié de 12 milliards de centimes, au titre du financement de ce film, étaient «infondées» et «fausses».

Selon le CADC, le financement du film «Le Patio» est estimé à «6,5 milliards de centimes». La production de ce film ainsi que celle de 14 autres œuvres, retenues dans le cadre de la manifestation «Constantine, capitale de la Culture arabe», avaient été confiée à l'Agence algérienne pour le rayonnement culturel (AARC), en 2014. La réalisation de tous ces films a été «ensuite transférée au CADC».