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Système de télédétection : Lorsque l'ARPT met la Sonelgaz en demeure

par Abdelkrim Zerzouri

A peine installé et mis en service à travers plusieurs régions du territoire national par les services de la Sonelgaz, le système de télédétection Micro-Scada (Supervisory Control and Data Acquisition) qui permet de déceler les pannes d'électricité à distance, ou autres vols de câbles électriques, se trouve remis en question.

C'est l'Autorité de Régulation de la Poste et des Télécommunications (ARPT), le puissant observatoire officiel des marchés des télécoms, qui a récemment « mis en demeure la Sonelgaz de trouver un autre palliatif » à ce système de télédétection, a-t-on appris auprès d'une source sûre. L'ARPT a donné un ultimatum jusqu'au mois de septembre prochain pour cesser définitivement toute utilisation de son système de télédétection, dont l'installation a été entamée en grandes pompes ces deux dernières années au centre, à l'est et à l'ouest du pays. Des dizaines de milliards investis pour rien ?! Effectivement, nous confirment des cadres de la Sonelgaz, « la DG a bien instruit, verbalement, ses directions locales de stopper le déploiement du système de télédétection des pannes dans les régions non encore équipées et où les travaux d'installation du système en question vont bon train ».

Faut-il préciser que ce système de télédétection n'est utilisé que depuis peu dans les pays développés. Cela mènerait-il à conclure que ses effets perturbateurs sur les réseaux des autres opérateurs de téléphonie mobile commencent à faire jour à cause de sa mise en fonctionnement très récente qui n'a pas encore permis de faire tout le constat du parasitage de l'environnement hertzien. Un système très apprécié, du reste, par les équipes techniques de la Sonelgaz, à cause du diagnostic rapide et efficace des réseaux câblés qui divise par cinq, ou plus, le temps d'intervention et de réparation sur les équipements défectueux, donc réduit l'effort et le coût de la maintenance. Hélas, pour la Sonelgaz, il faut désormais soit revenir au système classique, le signalement des pannes à coups de téléphone par les citoyens, soit chercher un autre moyen technologique, bien sûr s'il en existe. Quant aux raisons profondes qui ont conduit l'ARPT à lancer sa mise en demeure de cesser d'utiliser le système de télédétection dans sa forme technique actuelle, au plus tard au mois de septembre prochain, et même si on n'exclut pas des problèmes d'ordre technique générés pour les opérateurs de téléphonie mobile, tel le brouillage de la localisation ou du positionnement des téléphones portables, une autre possibilité dans le processus technique du système en question, des sources concordantes, appuyées par des avis techniques de spécialistes, classent cette décision sur le chapitre du « sécuritaire ». « S'il s'agissait d'un problème purement technique, émanant d'une quelconque gêne du fonctionnement des autres réseaux de télécommunications, provoquée par le système de télédétection de la Sonelgaz, ou toute autre interférence sur des canaux adjacents due aux signaux émis par les stations terminales utilisant des bandes de fréquences voisines, on pourrait se pencher sur des solutions probables pour corriger le défaut, et l'ARPT aurait dans ce cas-là tout simplement mis en demeure la Sonelgaz de corriger le problème technique, sans aller jusqu'à lui adresser cette sommation de ne plus utiliser le système de télédétection », relèvent des avis partagés par les spécialistes. Ces derniers indiquent, pour simplifier leurs propos, que le système de télédétection fait fonction d'un « mouchard » assurant la surveillance et le contrôle des équipements électriques d'un réseau, et permet aux techniciens de traiter, en temps réel, tous types d'incidents, dont la localisation à distance et en temps réel, d'une panne ou d'une anomalie électrique. Traiter tous types d'incidents, précise-t-on encore, « c'est aussi avoir la possibilité de passer commande sur le réseau interconnecté et couper l'énergie électrique aux endroits ayant subi des pannes afin de permettre aux équipes de faire les réparations utiles ».

Mais, le ton « sec » de la décision de l'ARPT, à lui seul, véhicule une autre dimension du problème, d'un aspect plutôt sécuritaire, estiment encore nos sources. « Le détenteur d'une autorisation d'exploitation est tenu d'assurer la sécurité des équipements radioélectriques en sa possession. A ce titre il doit prendre toutes les mesures nécessaires tendant à les protéger contre le vol, la perte ou l'utilisation frauduleuse », stipule l'une des conditions particulières d'utilisation des réseaux radioélectriques. Et qui peut garantir la protection des équipements en question, souvent installés dans des endroits isolés, contre le vol ou l' utilisation à dessein criminel ? « Le classement des équipements de télédétection dans la case du ??matériel sensible'' oblige la partie utilisatrice à en prendre grand soin afin d'éviter que le matériel ne tombe entre des mains criminelles », soulignent nos sources. Non sans rappeler que l'équipement dont se sert le système de télédétection des pannes électriques, très à la pointe de la technologie des télécommunications, « obéit à une réglementation stricte, voire très sévère, en raison des risques encourus, dans le cas de leur utilisation par des terroristes dans les maquis notamment ».

Est-ce à dire que l'ARPT a été saisie par des autorités sécuritaires pour retirer l'autorisation d'exploitation du système de télédétection ? Probable, estiment nos sources. Outre les lois et décrets fixant les dispositions générales applicables aux réseaux radioélectriques dont fait partie l'utilisation de cet équipement sophistiqué mis en place par la Sonelgaz dans le cadre du système de la télédétection des pannes, où les informations sont transmises via satellite sur les écrans des contrôleurs, l'arrêté interministériel du 9 juillet 2003, fixant les conditions et les modalités d'importation, d'acquisition, de détention, d'exploitation, de cession et de transport des équipements sensibles, renforce les appréhensions sur le plan sécuritaire. Et, la réaction rapide du gendarme des télécoms ainsi que le suivi immédiat de l'exécution à la lettre de sa décision (arrêt du déploiement du système de télédétection) concourent à raffermir ces inquiétudes sur le détournement des équipements de leur vocation.