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TIARET: Le retour du haïk?

par El-Houari Dilmi

A l'appel de l'association féminine de défense et de promotion de la femme « Volonté-Avenir », une marche des femmes, toutes de haïk vêtues, a été organisée ce jeudi, au beau milieu d'une ambiance haute en couleurs, et emplie d'une bonne dose de nostalgie. En effet, correspondant avec la célébration de la Journée internationale de la Femme, l'association, présidée par l'infatigable Reguieg Amel, a eu cette idée géniale d'organiser cette marche, pas comme les autres, pour appeler au retour du haïk et réhabiliter cet habit traditionnel, partie intégrante du patrimoine culturel algérien. Belles comme des déesses et flanquées de paniers en osier ?tout un symbole-, les femmes, de tous âges, offrant un somptueux spectacle, ont battu le pavé du siège de l'association, à la maison des ligues et des associations, contigüe à la maison de la presse, jusqu'au mausolée de Sidi Khaled, sur les hauteurs de la ville, le tout sous le regard admiratif des badauds. Se faufilant de manière gracieuse dans les rues de la ville, les belles silhouettes blanches ont été une véritable attraction de toute la ville, les automobilistes comme les piétons s'empressant de tirer leurs appareils téléphoniques portables pour immortaliser l'évènement. Sublimant la beauté de la femme, le haïk, cette étoffe symbole de pudeur et de noblesse, même s'il a perdu sa place de choix dans la garde-robe de la femme algérienne, « tient toujours une grande place dans notre société » se réjouit Fatima, militante d'une association féminine locale. Victime de la révolution du « new look », cet habit traditionnel, sous ses différents modèles et formes, symbole de la pudeur, mais également de l'élégance féminine, tente de résister au temps, surtout « avec cet envie irrésistible de retourner aux traditions de nos grand'mères, qui nous ont laissé des souvenirs indélébiles avec leur façon de s'habiller, si loin de la mode d'aujourd'hui » témoigne, avec une pointe de nostalgie, Kheïra, qui nous dit avoir décidé de porter le haïk pour « renouer avec ce passé si beau et qui nous manque tant » soupire-t-elle. Selon les dires des uns et des autres, le haïk serait apparu en Algérie avec l'arrivée des Andalous au Maghreb, au 16ème siècle. D'autres veulent bien croire qu'il a été introduit à Alger avec l'arrivée des Turcs, eu égard à sa présence dans d'autres régions du pays.

Selon les différentes méthodes de tissage (de laine ou de soie ou d'un mélange des deux matières), et appellations de cet habit d'une région à une autre, haïk «lmrema» d'Alger, haïk «laâchaâchi» de Tlemcen, le haïk kabyle, la « Melaya » constantinoise ou la «Mlahfa» portée au sud du pays, cet habit, venu d'un autre temps, fut même un moyen de résistance lors de la révolution nationale, car il fut utilisé par les femmes algériennes pour échapper au contrôle des militaires français, afin de transporter des armes et d'organiser des opérations kamikazes dans les villes. Sous un soleil printanier, au mausolée de Sidi Khaled, le saint tutélaire de l'antique Tingartia, les femmes, dans leurs belles silhouettes blanches, ont eu droit à déguster des mets traditionnels comme la « tekneta » ou le « kaâbouch ». D'autres ont préféré allumer des cierges et autres bougies pour faire des invocations, le tout dans une ambiance de kermesse, avec ce beau voyage à travers le temps, offert par les femmes tiarétiennes.