Envoyer à un ami | Version à imprimer | Version en PDF

Aveu en demi-teinte de l'OTAN

par Kharroubi Habib

L'intervention militaire internationale de 2011 en Libye a été une «énorme erreur de la part de la communauté internationale». Ce jugement n'a pas émané mercredi dernier de la bouche d'un pro-kadhafiste s'échinant à défendre la mémoire et le régime défunt de l'ex-guide de la Jamahiriya, mais d'un haut responsable de l'OTAN, organisation ayant planifié et mené l'opération.

Qu'il soit clair que l'aveu a été fait au nom de cette organisation et non à titre individuel par le haut responsable en question qui aurait eu l'esprit taraudé de remords au constat des effroyables conséquences qu'a eues l'intervention militaire de l'OTAN sur le peuple libyen et son pays. Il y a lieu tout d'abord de faire constater que l'aveu ne fait pas porter la responsabilité de «l'énorme erreur» à l'OTAN mais à la «communauté internationale». En la mettant sur le dos de cette «communauté internationale», le haut responsable de l'OTAN a tenté subitement d'en exonérer l'organisation à laquelle il appartient. A moins que pour lui le concept de communauté internationale n'englobe que les Etats membres du traité de l'Atlantique Nord.

L'erreur énorme qu'il a confessée l'a d'autant été que justement elle a été anticipée et dénoncée par la majorité de la communauté internationale dont la composante n'est pas limitée aux membres de l'OTAN. C'est en présence d'une délégation algérienne dont le pays a fermement contesté et dénoncé l'intervention militaire internationale en Libye en mettant en garde contre le pernicieux et dramatique enchaînement destructeur qu'elle allait provoquer pour ce pays et l'ensemble des régions dans lesquelles la Libye a place, que le représentant de l'OTAN s'est laissé aller au «parler vrai».

Que faut-il déduire de l'aveu publiquement formulé que l'intervention a été une «énorme erreur» : qu'on devrait le prendre pour un acte de contrition sincère par ceux qui l'ont ordonné et clore ce faisant le dossier d'accusation contre eux de crime historique commis ayant entraîné des milliers de morts civils et la destruction totale et durable d'un pays ? Que non. Il doit au contraire être exploité pour exiger que ceux qui ont lancé l'OTAN dans cette opération qui plus qu'une erreur a été un crime prémédité en toute connaissance de cause de ses conséquences soient déférés devant la justice internationale pour crime de guerre et contre l'humanité.

L'ont sait qu'un tel procès ne se fera jamais, les puissances en cause étant celles qui régentent l'ordre international y opposeront leur arrogant veto. Mais il serait de l'honneur passablement terni de la Cour pénale international de reconnaître que quoique l'intervention militaire de l'OTAN en Libye relève par ses conséquences de ses compétences, elle ne s'en saisira pas parce que les injonctions de ces puissances ont force de loi. Il ne semble pas par ailleurs que certains Etats membres de l'OTAN considèrent le fait que l'intervention de leur organisation en Libye a été une «énorme erreur» va les dissuader de s'engager dans une autre opération similaire dans ce pays.

Il n'y a qu'à voir comment tout en se déclarant acquis désormais à l'option d'une solution politique négociée entre les Libyens eux-mêmes à la crise de leur pays, ils œuvrent en sous-main à convaincre de celle d'une solution militaire pour laquelle ils sont disponibles à fournir leur concours. L'aveu du haut responsable de l'OTAN est de toute façon ravageur pour ces «faiseurs d'opinion» en Algérie ayant fustigé le pouvoir en place pour avoir refusé de faire sien l'argumentaire dont les pays de l'OTAN se sont servis pour justifier l'intervention.