Si les résultats définitifs des élections de la Constituante en Tunisie
ne seront officialisés que le 14 novembre prochain, conformément à l'article 73
du décret-loi n°35 de 2011, après examen des recours devant le Tribunal
administratif, selon les premières estimations et des résultats préliminaires
selon un décompte exclusif établi par l'agence turque Anadolu, les 214 sièges du
prochain Parlement sur 217 reviennent respectivement à Nidaa Tounès avec 83
sièges, Ennahdha avec 68 sièges, l'Union patriotique libre (UPL) et ses 17
sièges, les libéraux du Front populaire et leurs 12 députés et ceux de Afek
Tounès avec 9 sièges, le Courant démocratique 5, le Congrès pour la République
(CPR) 4, Al-Moubedra 4, le Mouvement du Peuple 2 ainsi que le Front
démocratique pour le travail et les libertés (FDTL) et un siège pour le Parti
républicain, le Courant al-Mahabba, la «Fidélité» au Projet et la Voix des
agriculteurs ainsi que le Mouvement des démocrates socialistes (MDS) et
«Al-Majd». Les Indépendants ont glané 2 sièges. Une répartition que le parti
islamiste tunisien partage pour le classement mais pas au nombre de sièges
obtenus. Zied Laadhari, le porte-parole d'Ennahda, a annoncé, hier, à l'AFP que
«nous avons des estimations qui ne sont pas encore définitives. Ils (Nidaa
Tounès, ndlr) sont en avance de plus ou moins une douzaine de sièges. Nous
aurions environ 70 sièges et eux environ 80», se basant sur les données
d'observateurs d'Ennahda présents au dépouillement dans les bureaux de vote.
Les Tunisiens ont donc voté, ce dimanche, pour élire leurs 217 députés, dans un
scrutin proportionnel à un seul tour. Plus de 5 millions d'électeurs étaient
appelés aux urnes sous haute surveillance sécuritaire. Deux jours auparavant,
un affrontement meurtrier avait eu lieu entre djihadistes et forces de l'ordre
en périphérie de Tunis. Environ 80.000 policiers se sont déployés dans
l'ensemble du pays pour le vote. Des barrages routiers avaient également été
mis en place un peu partout et des agents armés de la Garde nationale
sécurisaient chaque bureau de vote. Dans la matinée, quelques bureaux ont été
fermés pour des raisons de sécurité dans la ville de Kasserine. A la fermeture
des bureaux de vote, le taux de participation était estimé à 61,8%, soit
environ 3,1 millions d'électeurs, un chiffre en forte baisse par rapport à
l'élection en 2011 de la Constituante, remportée par les islamistes, et pour laquelle
4,3 millions de Tunisiens avaient voté. Les premiers résultats quoique pas
encore officialisés respectent la tendance générale de ces élections qui
donnaient comme favoris les islamistes d'Ennahda et les «modernistes» de Nidaa
Tounès. Ce deuxième scrutin post Ben Ali devra donc consacrer la bipolarisation
de la vie politique tunisienne et aussi favoriser les petites formations, qui
pourraient ainsi se poser en arbitres. Nidaa Tounès, une formation hétéroclite,
présidée par Béji Caïd Essebsi, et regroupant aussi bien des figures de gauche
et de centre-droit que des caciques du régime de Zine El Abidine Ben Ali, a
déjà crié victoire. M. Essebsi, vétéran de la vie politique tunisienne, a été
Premier ministre après la révolution de janvier 2011. Il avait auparavant aussi
bien servi Habib Bourguiba que Ben Ali. Il est aussi le favori de la
présidentielle du 23 novembre à laquelle Ennahda ne présente pas de candidat.
Le chef d'Ennahda, Rached Ghannouchi, a appelé à «renforcer la confiance dans
les institutions, la démocratie» quel que soit le premier parti aux élections.
«L'essentiel est que la Tunisie a besoin d'un gouvernement de coalition
nationale, d'une politique consensuelle», dira-t-il, estimant que «c'est cette
politique qui a sauvé le pays de ce que traversent les autres pays du Printemps
arabe». Selon les observateurs étrangers et tunisiens, le vote s'est déroulé
sans irrégularité majeure sur l'ensemble du territoire, même si un certain
nombre d'électeurs ont rencontré des difficultés relatives à leur inscription
sur les listes électorales.