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Prélèvements d'organes sur les cadavres: Une question de mentalité et de sensibilisation

par A. Mallem



Selon un médecin-chercheur constantinois, le nombre des insuffisants rénaux en Algérie est en constante augmentation et il vient d'atteindre cette année le chiffre de 18000. « On a recensé 16000 l'année dernière et cette année 2014 ce chiffre a augmenté de 2000. Par contre, les opérations de transplantation rénale à partir de donneurs vivants ou décédés sont en régression, ou du moins elles avancent à un rythme très lent », a affirmé hier la doctoresse Rahima Bouamer dans une conférence qu'elle a donnée à l'institut de la Chariaa et de l'économie de l'université des sciences islamiques Emir Abdelkader (USIC) de Constantine. Pour présenter ses travaux de recherche sur le thème, et notamment son nouvel ouvrage intitulé « Le don d'organes en Algérie : enjeux juridiques, religieux et sociaux : le cas de Constantine pris comme modèle ». Cette conférence a été organisée par l'institut cité ci-dessus avec le concours de l'organisation patronale du club des entrepreneurs et investisseurs du Grand Constantinois (CEIGC).

Poursuivant l'explication qu'elle a présentée sous forme d'un signal d'alarme tiré à l'intention de la société toute entière, la conférencière a affirmé que le don d'organes humains destinés à la transplantation sur malades est confiné au cercle familial restreint: la mère qui fait don de son rein à son fils, le frère à la sœur.. etc. C'est tout. « Les prélèvements sur cadavres sont très rares, pour ne pas dire inexistants, a continué la conférencière en estimant qu'il y a peut-être un manque de sensibilisation en la matière, « et c'est pourquoi, dans mon ouvrage, j'ai réservé tout un chapitre à sensibiliser les gens sur cette question vitale. Il faut sensibiliser la société et aussi ceux qui ont le pouvoir de décision. Il faudrait, à mon sens, créer des compensations pour inciter les gens à faire don de leurs organes pour sauver d'autres gens ». Et de signaler qu'à l'heure actuelle celui qui veut se prêter à l'opération de prélèvement pour donner son rein n'est pas assuré. Elle fera remarquer que le don d'organes ou le prélèvement sur cadavre est autorisé par notre religion et une fetwa existe dans ce sens.

La relayant, le docteur Abdallah Boukhelkhal, recteur de l'USIC, a exprimé de profonds regrets sur la régression constatée dans la mentalité de la société algérienne qui, pourtant, avait-il noté, il n'y a pas si longtemps, était en avance sur cette question par rapport à d'autres peuples. « Nous constatons chaque année qu'une véritable hécatombe est causée par les accidents de la circulation et qu'entre 4500 et 5000 personnes meurent sur les routes ». Et que c'est autant d'organes vitaux pouvant sauver d'autres vies humaines qui sont perdus. « Tout cela, a-t-il poursuivi, alors la Charia islamique a autorisé le don d'organe comme aumône charitable (Sadaka jaria) aussi bien pour celui qui est mort que pour sa famille. Mais ces dernières refusent encore de donner les organes de leurs proches morts. Il nous faut donc mener une action conjointe et soutenue entre l'université islamique, le ministère des Affaires religieuses et le corps médical pour sensibiliser la société algérienne sur cette question. Il appuiera son argumentation par des citations puisées dans le Coran.

Pour sa part, le docteur Omar Mahsas, président de l'UGEIC, a regretté aussi que les recherches réalisées dans ce domaine par des spécialistes ne sont pas exploitées par les secteurs concernés et ils ne font qu'occuper inutilement les rayons des bibliothèques : « Les travaux réalisés par la Dr. Bouamer doivent être mis à la disposition du public et servir de référence à Constantine et ailleurs ».

A la fin de la conférence, tout le monde fut convaincu qu'il faut tout faire pour relancer les opérations de transplantation d'organes qui sont vitales, mais qu'il faut d'abord déployer de grands efforts pour implanter dans la société la culture du don d'organes.