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Après une série noire : Air Algérie soumise à un audit

par Yazid Alilat

La compagnie aérienne nationale Air Algérie va bientôt passer sous les fourches caudines d'une commission d'audit. Objectif: faire la check-list de ce qui ne marche plus au sein de la compagnie nationale, qui collectionne les accidents après une incroyable succession d'incidents graves dont la destruction d'un des appareils affrétés avec 117 personnes à bord. C'est le n°1 du secteur, Amar Ghoul, qui l'a annoncé hier en marge de l'ouverture de la session d'automne du Parlement. «Nous avons engagé un audit via l'inspection générale du ministère concernant la gestion, l'organisation et les services d'Air Algérie», a-t-il indiqué, précisant que cet audit «approfondi et détaillé» a été décidé à la suite des incidents enregistrés récemment par la compagnie. Les résultats de cet examen vont donner lieu à un redéploiement de la compagnie avec «un programme de mise à niveau de l'entreprise pour améliorer la qualité de ses services», selon le ministre. Ce programme, devant être conçu à moyen terme, touchera les niveaux organisationnel, managérial, de formation et celui relatif à la qualification à la qualité des prestations, a ajouté M. Ghoul, qui a également annoncé que des mesures «très importantes devront être prises par l'Etat pour que la compagnie retrouve le niveau de prestation dont elle est censée assurer à ses clients».

L'annonce de cet audit d'Air Algérie intervient au lendemain d'un autre incident de deux appareils de la compagnie, deux ATR (avion de transport régional, ATR) sur le tarmac de l'aéroport Houari Boumédiène. Les deux appareils s'étaient effleurés au niveau des ailes, un incident qualifié de ?'sans gravité'' par la compagnie de ces deux avions au moment de leur stationnement sur la voie de parking. Mais, cet incident fait suite à plusieurs autres incidents techniques mettant en cause des appareils d'Air Algérie, dont le plus important est la sortie de piste au décollage d'un Boeing 737-800 sur l'aéroport de Lille (France), et d'autres incidents sur des aéroports nationaux. Le plus grave accident de l'aviation civile nationale s'est produit le 25 juillet dernier avec la destruction d'un MDD affrété à une compagnie espagnole low cost près de Gao, au nord du Mali, avec 117 passagers à bord. Il n'y a eu aucun survivant de ce crash qui a mis la compagnie sous les feux de l'actualité et de la critique. Non respect des horaires, pagaille à l'aéroport, retards, annulation de vols et surbooking de certaines destinations ont encore noirci le tableau. Au point de déstabiliser la compagnie.

Après un moment de silence, le PDG d'Air Algérie avait réagi et répondu aux interrogations des uns et des autres, voyant dans la couverture médiatique des événements une campagne dirigée contre la compagnie. Mohamed Salah Boultif a ainsi dénoncé cette campagne médiatique dirigée contre sa compagnie dont le dynamisme et l'agressivité commerciale commencent «à inquiéter et à gêner». Cité par l'APS, il a manifesté son inquiétude face aux attaques que subit le pavillon national depuis le crash Ouagadougou-Alger, le vol AH 5017 le 24 juillet au Mali, affirmant que sa compagnie qui s'est engagée dans une dynamique de développement commençait à «déranger la concurrence». Pour lui, Air Algérie a réussi en l'espace de trois ans à capter 1,4 million de nouveaux passagers à l'international dans un environnement fortement concurrentiel et s'est lancé le défi de construire un hub aérien à Alger avec l'acquisition de 16 nouveaux avions d'ici à 2016. «Cette dynamique de développement inquiète à mon avis beaucoup de compagnies concurrentes», a-t-il confié.

Même levée de boucliers chez le ministre des Transports. ?'Air Algérie» a sa place et nous n'acceptons nullement qu'elle soit discréditée au moment où l'aviation civile connaît une rude concurrence internationale», a-t-il dit. Il a précisé que la compagnie Air Algérie «a sa place», déplorant «le fait que certaines parties extérieures tentent de discréditer la compagnie qui constitue, a-t-il dit, un acquis national au moment où l'aviation civile connaît une rude concurrence sur le plan international». M. Ghoul a souligné que la moyenne d'âge de la flotte d'Air Algérie ne dépasse pas les 10 ans, avant d'annoncer qu'elle est appelée à baisser à 7 ans avec l'entrée en service de 16 nouveaux appareils commandés par la compagnie. En réponse aux critiques dont font l'objet les pilotes algériens, le ministre a estimé que ces pilotes «sont recrutés dans les plus grandes compagnies mondiales», ajoutant que de grandes compagnies dans le monde ont connu de graves problèmes mais personne n'en a parlé».

Pour autant, M. Ghoul a laissé entendre hier que la tolérance ?'zéro'' est de mise au sein de son ministère. Car, revenant sur l'incident de lundi à l'aéroport international d'Alger, il a expliqué qu'une enquête a été ouverte pour définir ses circonstances. «Bien que cet incident soit léger et sans gravité, une enquête a été ouverte immédiatement pour définir ses causes», a précisé M. Ghoul. «L'Etat ne va pas tolérer ce type d'accidents et d'incidents et chacun doit assumer ses responsabilités», a-t-il affirmé, avant d'appeler la compagnie à consentir plus d'efforts pour s'améliorer dans l'avenir. «Nous refusons tout dénigrement, pression et dénaturalisation de l'image d'Air Algérie. Mais en même temps, nous refusons aussi qu'elle reste dans son état actuel», a-t-il menacé.