La foire aux fournitures scolaires bat son plein. Le phénomène,
annonciateur du retour des élèves sur les bancs des classes, donne des couleurs
de kermesse aux centres urbains, soudainement animés, après le retour massif
des vacanciers. Le commerce bouge et les affaires tournent rond, surtout pour
le marché des articles scolaires. De petites tentes, dressées sur une poche
urbaine, à Ali Mendjeli, donne toute la mesure de la dynamique commerciale
d'une foire dédiée à « la rentrée scolaire et aux habits pour enfants ». Mais,
foire ou pas foire, cela va encore saigner la bourse des ménages, au vu des
prix affichés. Les prix des cahiers de différents volumes, affichés sur une
liste exposée devant les acheteurs, allant de 25 à 180 DA pour les registres,
peuvent séduire ou accrocher l'attention des parents, à la recherche de
produits pas chers. « Une astuce pour attirer le client, et lui fourguer
d'autres articles qui vont, nécessairement, avec le cahier, à des prix excessifs,
ceux-là, sans qu'on ne s'y rende compte », nous a confié un éditeur - libraire
qui a qualifié ces commerçants « occasionnels » d'as du métier. Pour rester
dans la catégorie du bas de gamme et marchandises de qualité normale ou
moyenne, on aura des crayons à 20 DA, des cartables dont le prix peut aller
jusqu'à 2.600 DA, des tabliers à plus de 2.000 DA et des trousses à 350 DA !
Bien sûr, pour profiter, pleinement, de l'aubaine, des commerçants de
détergents, de vaisselles et autres petits trucs prisés par la ménagère se sont
incrustés dans le décor d'une foire consacrée, normalement, aux fournitures
scolaires et aux habits pour enfants. En tout cas, tout le monde arrive à
trouver son compte, sauf les libraires professionnels, en activité, dans ce créneau,
tout au long de l'année. Ces foires qui attirent ou « détournent », comme des
aimants, la clientèle potentielle, les parents d'élèves en l'occurrence,
réalisent des gains très importants, durant un court laps de temps, moins d'un
mois. « La recette d'un mois de ces vendeurs occasionnels dépasse, de loin, ce
que je réalise en une année de travail », affirme un libraire, en exhibant un
maigre registre de vente. Les libraires professionnels sont mécontents de la
prolifération du commerce des fournitures scolaires, « c'est de la concurrence
déloyale, un outrage au métier », considère-t-on, avec dépit. Presque le cas
des ?zalabdjia', au mois de Ramadhan, à la veille de la rentrée scolaire, tout
commerce est bon pour se convertir, en parallèle à l'activité qui lui est
propre, à l'air du temps, au grand dam des libraires. L'informel ronge le
commerce des fournitures scolaires, contraignant les circuits légaux à se
raréfier, car les professionnels « sont contraints au dépôt des clés sous le
paillasson », sous la pression de lourdes charges et un rendement insignifiant.
« Comment voulez travailler dans un climat pareil, nous dira un libraire, c'est
injuste de nous pénaliser, de la sorte, dans une période de pic commercial.
Nous souhaitons que les autorités compétentes sévissent contre le marché
informel pour protéger les honnêtes commerçants. » D'autres libraires
renchérissent, en rappelant que la lutte contre le commerce informel, dans ce
créneau, est une affaire, intimement, liée à la protection du consommateur, car
les risques de maladies véhiculés par certaines fournitures scolaires résident,
justement, dans le marché parallèle où la vente anarchique, qu'on semble
tolérer, du côté des pouvoirs publics, complique la mission de contrôle, pour
ne pas dire la rend impossible.
Les brigades de contrôle, installées récemment, dans ces circonstances,
n'arriveront jamais à maîtriser un marché de cette ampleur, dominé par une
solide emprise de l'informel, assure-t-on. Le consommateur est le premier
contrôleur, font remarquer les contrôleurs eux-mêmes, le choix lui revient
d'acheter des fournitures chez le libraire ou de les choisir sur un trottoir.