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BLIDA - Parkings sauvages : où allons-nous ?

par Tahar Mansour

C'est un citoyen entre deux âges, fonctionnaire de son état, qui nous a fait part, de manière excédée, de l'aventure qui lui est arrivée, il y a de cela deux jours, alors qu'il circulait à bord de son véhicule d'un point de la ville à un autre, à la recherche d'un médicament pour son fils malade.

« Je suis sorti à 10 h du matin et je me suis arrêté près d'une pharmacie pour acheter un médicament pour mon fils mais il n'y en avait pas. Je suis ressorti pour aller ailleurs mais je trouvais un individu, avec un gilet vert, qui me demanda 50 DA pour le parking. Je le regardai, interloqué, mais je pus me contenir et je lui remis une pièce de 50 DA pour éviter tout problème», nous a-t-il confié, d'une voix qui était encore relativement calme. Notre bonhomme s'en alla quelques centaines de mètres plus loin et s'arrêta de nouveau face à une pharmacie. Un jeune, qui se trouvait à l'ombre d'un arbre, l'interpella pour lui demander d'avancer son véhicule. Il fit la sourde oreille et entra dans la pharmacie où le vendeur l'informa que le médicament qu'il cherchait était plutôt rare et qu'il devra faire, peut-être, plusieurs pharmacies pour le trouver. En ressortant de l'officine, le fonctionnaire était déjà en colère contre la rareté de médicaments, pourtant nécessaires et il fut abordé par le jeune qui lui demanda 50 DA ?pour le parking'. Il ne voulut pas créer d'esclandre mais il refusa de lui remettre 50 DA, il prit une pièce de 20 DA et la lui tendit. Voyant que son ?client' était en colère, le jeune empocha la pièce et se tut. Croyant avoir fini avec ces véritables agresseurs, le malheureux père se dirigea vers un autre quartier où il fut obligé de débourser encore plusieurs fois 50 DA, impressionné par le gabarit menaçant de nombreux jeunes qui réclamaient les 50 DA comme si le trottoir où s'arrête l'automobiliste était leur propre bien. A la fin de son parcours qui s'est étendu à plusieurs quartiers, notre interlocuteur nous affirma qu'il s'était fait déposséder de 800 DA sans même avoir trouvé le médicament qu'il cherchait. Ce problème de parking, qui se pose pour tous les automobilistes qui veulent garer leurs voitures, ne date pas d'aujourd'hui et il a été si médiatisé que les autorités ont décidé de prendre des mesures en ? officialisant cette pratique, obligeant les conducteurs à débourser 50 DA pour une place de parking, même s'ils ne s'arrêtent que pour quelques minutes. «Maâlihche, pour ceux qui ont été autorisés par les services municipaux, mais maintenant, ils ne sont plus les seuls, ni seulement dans les endroits désignés, ils sont partout, et il arrivera, certainement, le jour où je devrais payer pour garer ma voiture devant ma maison», a annoncé d'un trait, un automobiliste qui pestait contre un ?gardien de parking' «plus sauvage que son parking», a-t-il tenu à souligner. Les jeunes, désœuvrés et désargentés, ne reculent plus devant l'agressivité pour en soutirer aux automobilistes qui paient pour éviter de voir leurs véhicules détériorés par ces bandes de malfaiteurs : «il vaut mieux payer 50 DA que de voir un pneu de la voiture tailladé à coups de couteau ou un rétroviseur disparaitre, ce qui me coutera beaucoup plus», a affirmé le conducteur d'un véhicule flambant neuf qui venait de quitter sa place de stationnement.

Nous avons même vu des jeunes, en plein centre-ville où la circulation est déjà difficile qui ont ramené des chaises pour s'asseoir au beau milieu de la chaussée, arborant un gilet vert mais sans l'estampille de l'APC (c'est un faux gardien), arrêtant les voitures pour permettre à ceux qui les paient de quitter leur emplacement ou à ceux qui veulent garer de s'arrêter, gênant la circulation, pendant plusieurs minutes et ceci au vu et au su d'agents de police qui semblent ne rien voir, se contentant de demander, par gestes, aux automobilistes de faire vite pour décongestionner la circulation. Ce phénomène prend une ampleur insoupçonnée qui peut dégénérer en bagarre générale si les autorités, à commencer par les services de sécurité, n'y mettent le holà : «il y a bien des lois qui balisent tout cela, qu'attendent les services de sécurité pour les appliquer», ont lancé de nombreux automobilistes qui n'en peuvent plus d'être rackettés de la sorte. Un citoyen nous a affirmé que même au sommet d'une montagne il a trouvé quelqu'un qui lui a exigé 50 DA pour le parking. «N'ayant pas trouvé une place à l'intérieur de l'hôpital de Meftah (situé au sommet d'une montagne déserte), je suis ressorti pour garer ma voiture sur une plate-forme qui lui est attenante et dont une partie est utilisée par les bus. Une fois la visite médicale effectuée, je suis revenu pour prendre ma voiture et partir quand un adolescent m'accosta pour me demander le prix du parking. Comme pris de pitié, je lui remis 25 DA mais il refusa de les prendre, exigeant 50 DA, mais je n'ai pas voulu y répondre. Il appela alors un autre adolescent qui vient de je-ne-sais-où et qui voulut me faire comprendre que je devais payer, ce que je refusais une fois encore. Il me demanda alors si cela ne me faisait rien qu'on me volât le poste radio ou que je trouve les pneus de ma voiture crevés à coups de couteau. Je ne lui répondis rien et démarrai, mais, à ma grande surprise, un individu à la carrure impressionnante sortit d'une bicoque et me lança ?espèce de charr, si tu reviens tu vas voir'». Le citoyen prit ?ses pneus à son cou' et se dirigea vers la ville, heureux de s'en être sorti, finalement, à si bon compte et se demandant en son for intérieur pourquoi il n'avait pas payé et évité tous ces désagréments.

Toutes les autorités concernées sont interpellées pour mettre un terme à cette pratique qui peut dégénérer et qui, déjà, donne une impression d'insécurité même en présence des policiers, censés nous protéger de ces agressions caractérisées.