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Le PDG d’Algérie Télécom s’en prend aux «experts», qu’il qualifie de «lobbyistes»

par Aïssa Bouziane

Le lancement de la 3G n’a pas eu d’effet significatif sur l’Internet fixe. Il n’y a pas eu de migration massive comme pour la téléphonie mobile, ce qui conforte le PDG d’Algérie Télécom, Azouaou Mehmel, pour qui les deux technologies sont complémentaires et non concurrentielles.

Six mois après son lancement, l’internet 3G n’a pas ébranlé la connexion filaire. Celle-ci continue, non seulement de progresser, mais elle constitue l’essentiel de la croissance de l’entreprise, tirée désormais par la data, alors que pour le téléphone, la migration du fixe vers le mobile a été massive, selon les déclarations du PDG d’Algérie Télécom, Azouaou Mehmel, lors de l’émission l’"Invité du Direct" à Radio M, la webradio de Maghreb Emergent. Ce qui pousse Algérie Télécom à continuer de miser sur l’internet fixe, en refusant de voir la 3G comme un concurrent, mais comme un complément. Pour 2013, "le gros de la croissance" d’Algérie Télécom provient de la data, malgré les retards de l’entreprise à concrétiser un de ses objectifs phare, un plan de deux millions de connexions supplémentaires. Algérie Télécom se contente actuellement de 1,3 million de lignes ADSL, avec toutefois un nombre d’utilisateurs beaucoup plus élevé, car le partage de la connexion est la règle. "L’objectif de six millions d’accès à moyen terme, c’est possible", dit-il, alors que beaucoup de spécialistes avaient envisagé un écroulement d’Algérie Télécom avec le lancement de la 3G en décembre 2013. M. Mehmel se veut formel. "La 3G ne menace pas notre chiffre d’affaires", dit-il. "Jamais le sans fil ne s’est substitué au filaire sur la data", ajoute-t-il, affirmant que "les deux technologies sont complémentaires". Pour lui, les vrais enjeux ne se situent pas sur ce terrain.

Experts ? non, lobbyistes

La progression d’Algérie Télécom est freinée par des facteurs très divers, reconnait M. Mehmel. Au profil initial des employés, des fonctionnaires issus de la fonction publique, "non préparés à gérer une entreprise qui évolue sur le plan technologique et managérial", il faut ajouter "un passif qui pèse beaucoup" et "un environnement défavorable", lié à la règlementation et au retard technologique. Le développement de l’Internet bute ainsi sur la faiblesse du commerce électronique, qui peine à décoller. De même, l’usage peu développé de l’Internet dans les administrations et les services constitue un frein pour la filière, dont l’expansion "ne relève pas uniquement des TIC, mais d’autres secteurs aussi". "Nous, on produit des infrastructures. D’autres usages pourront se développer quand tout ceci sera débloqué", déclare M. Mehmel.

Le PDG d’Algérie Télécom n’hésite pas non plus à s’en prendre aux "experts", dont la plupart sont très critiques envers de le développement de l’Internet en Algérie ainsi qu’envers la gestion d’Algérie Télécom. Il a même mis en doute leur indépendance. Selon lui, certains travaillent comme "lobbyistes pour des fournisseurs et des équipementiers". Ces experts "critiquent tout ce qui est fait chez nous, ils ne font rien et ne laissent pas les autres faire", dit-il. Il a cité notamment la 4G, lancé récemment en Algérie, et moquée par certains spécialistes, qui ont contesté la qualification de 4G.

Le retard peut devenir une aubaine

Algérie Télécom jongle aussi pour minimiser ses coûts, à travers différentes formules. Pour économiser la bande passante, elle a passé un accord avec Google pour installer en Algérie des serveurs fournissant les requêtes les plus fréquentes. Ce qui oblige l’entreprise à s’adapter en continu. Mais M. Mehmel estime que le retard pris dans certains domaines peut se transformer en avantage. Ainsi, dit-il, "la technologie évolue tellement vite qu’on peut prendre des raccourcis technologiques" pour "éviter certaines erreurs et mieux rationaliser ses dépenses".

Pour lui, le prix de l’Internet pratiqué par Algérie Télécom n’est pas élevé, au vu de la configuration géographique du pays, et de la nécessité pour l’entreprise d’offrir à tous le même accès, avec la même qualité. C’est le volet "citoyen" de l’entreprise, son côté "service public", dit-il, une façon de contourner un autre aspect qui fâche, celui du personnel : Algérie Télécom emploie 22.000 personnes.