Envoyer à un ami | Version à imprimer | Version en PDF

Ces bruits de bottes qui dérangent !

par Moncef Wafi

Encore une fois, l'absence de transparence, ou du moins de communication, dans les décisions prises porte préjudice à toute action entreprise. Que ce soit au sujet de l'état de santé du président de la République ou à propos du dossier du terrorisme ou tout autre sujet sensible, le manque de communication ferme la porte aux explications rationnelles. L'Etat préfère envelopper ses prises de décision dans du papier secret même si pertinemment on sait que l'info ressortira en aval.

Pourtant, et malgré tous les précédents malheureux, on continue à naviguer en discrétion quitte à essayer d'expliquer, plus loin, le bien-fondé de sa pensée. L'exemple, encore un s'il en fallait, vient du traitement de la participation de l'Algérie au traditionnel défilé militaire sur les Champs-Elysées à l'occasion du 14 Juillet français. Si à Alger on avait déjà pris la décision de répondre à l'invitation de Laurent Fabius, la plus basique des informations aurait été d'informer l'opinion publique et d'expliciter les raisons fondées ou pas d'une telle participation. Mais, voilà, il n'en fut rien et l'info nous est parvenue dès le 20 juin de Paris, comme toujours, des années-lumière avant l'explication de texte de notre ministre des Affaires étrangères. Une situation qui a fait réagir le MSP qui estime, à travers la page Facebook de son président, Abderrezak Mokri, que cette annonce «tardive» signifie que les Français sont plus au courant que les Algériens sur ce qui se passe au sein de leurs institutions étatiques.

Cette participation aux cérémonies du 14 Juillet, qui marqueront le début des commémorations de la guerre 14-18, où quelque 23.000 soldats algériens ont été tués, a comme prévu aiguisé les couteaux des deux rives de la Méditerranée. Les discours officiels se voulant consensuels tournés vers la symbolique et l'histoire alors que des avis critiques se font entendre aussi bien à Alger qu'à Paris. Si en France ce sont les traditionnels mouvements d'extrême droite qui se font le relais de ces voix contradictoires, en Algérie, des partis de l'opposition ont dénoncé ce «présent» offert par l'Etat algérien sans contrepartie. D'autres sont allés plus loin en prédisant l'enterrement définitif du dossier de la repentance après moult atermoiements des dirigeants algériens qui se sont «couchés» devant le refus français d'aborder la question.

Pour sa part, Saïd Abadou, le secrétaire général de l'Organisation nationale des moudjahidine, a été clair à ce propos en affirmant que la participation algérienne au défilé ne doit même pas être abordée «tant que le sujet de la criminalisation du colonialisme n'est pas réglé». Tahar Benbaïbèche, le président du parti Fajr Jadid, a quant à lui rappelé que voir des soldats algériens parader sur les Champs-Elysées est moins grave que la décision prise par le Parlement algérien de geler le dossier de la criminalisation du colonialisme. Le ministre des Moudjahidine, Tayeb Zitouni, ainsi que les partis du pouvoir, FLN et RND, ont pris, logiquement, le parti de la version officielle. Malgré toutes les explications pédagogiques de Ramtane Lamamra, le mal étant déjà fait, pas dans le fond, quoique, mais dans la forme. Et c'est beaucoup.