Dans la soirée du
4 au 5 juillet, deux événements artistiques ont été inscrits au programme. Le
premier, un concert de flamenco organisé par l'Institut Cervantès, devait être
abrité par le Conservatoire d'Oran. Le second, un concert censé être inscrit
dans le cadre de la célébration de la fête de l'Indépendance, organisé par
l'APC, devait être animé par Cheb Mami au théâtre de Verdure. L'appel au
secours à Cheb Mami est intervenu au moment où de plus en plus de voix
s'élèvent à Oran pour, au moins, s'interroger sur l'absence de toute activité
culturelle et artistique durant ce mois de Ramadhan. Malheureusement, organisé
dans la précipitation et, donc, ne bénéficiant d'aucune information
conséquente, ce concert n'avait dès le départ aucune chance d'accéder au rang
d'événement. De toute manière, comme pour la première manifestation, c'est «
aux initiés » qu'est parvenue l'information du passage de Mami à Oran. Et,
finalement, Cheb Mami n'a pas animé la soirée en question, faisant ainsi faux
bond aux organisateurs. Donc, il est difficile dans ces cas de parler de célébration
d'un événement de la taille du 5 Juillet 1962. Dans les quartiers se trouvant
en dehors de la zone d'intérêt des instances censées assurer l'animation
culturelle et artistique, les jeunes et moins jeunes se sont organisés
autrement pour meubler leurs soirées durant ce mois de carême. C'est justement
le cas de toute une partie de la ville, Oran-Est en l'occurrence. Le café, et
par extension la crèmerie, est presque un passage obligé pour les jeunes et
même les moins jeunes. Certains s'y rendent très tôt, juste après le repas du
f'tour, pour y siroter leur premier café serré accompagné d'une cigarette.
D'autres, c'est après la sortie de la mosquée qu'ils s'y retrouvent pour
terminer une discussion entamée ailleurs et prendre un thé avant de rejoindre
le domicile familial. Ce qu'il est possible d'avancer, c'est que la
transmission des matchs de la Coupe du Monde a davantage boosté la
fréquentation de ces lieux appelés à raison lieux de sociabilité. Pour les
familles, notamment les femmes en groupe, la prise de l'air frais sur certaines
esplanades, notamment celle dite de Dubaï, s'érige de plus en plus en
tradition. Munies de leur petit couffin chargé de fruits et de gâteaux et
portant leurs petites chaises en plastiques pliables, des femmes se rendent,
dès que l'occasion le permet, aux alentours de l'hôtel Le Méridien pour se
rafraîchir et fuir l'exiguïté et la fournaise du logement familial.
Aux jeunes
célibataires, il reste le coin de la cité ou le cybercafé du quartier. Avec la
généralisation du Wifi, des jeunes « squattent » une connexion dehors et
surfent ou chattent dehors. Mais le cyber, notamment celui du quartier, situé
dans un emplacement sécurisé, il reste ouvert jusqu'aux premières heures de la
matinée. On l'investit quand justement certains décident de rejoindre leur lit.
On s'y livre à d'interminables batailles de Counter Strike où les gentils
traquent les terroristes. Quant à ceux qui n'apprécient pas ce genre de joutes,
ils inventent des tables basses et s'adonnent au bon vieux jeu de dominos. En
tout cas, on essaye par n'importe quel moyen de se soustraire à l'ennui et au
vide. Parce que ceux censés proposer des préoccupations beaucoup plus utiles
souffrent peut-être du même vide. En fait, chacun s'évertue, à sa manière, à
tuer le temps. Qui a dit que le temps, c'est de l'argent ?