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L’industrie mécanique peine à démarrer malgré des investissements massifs

par Abed Charef

L’Algérie investit massivement dans l’industrie mécanique, mais les résultats restent dérisoires par rapport aux besoins du pays.

A côté du projet phare Renault à Oued Tlelat (Oran), qui devrait produire au rythme de 25.000 véhicules par an dès cette année, pour passer ensuite à 150.000, un tissu industriel s’installe laborieusement, sans pour autant permettre l’émergence d’un label algérien.

Il s’agit essentiellement de projets menés par des entreprises publiques, en partenariat avec de grandes firmes étrangères. Certains sont très avancés. A Tiaret, un projet pour fabriquer des engins est sur le point d’entrer en production, selon le PDG de la holding publique «SGP mécanique» Mustapha Dehimi. Deux accords conclus avec la firme Mercédès devraient permettre de produire 16.500 camions et autocars pas an pour le premier,et 25.000 moteurs pour le second.

Avec la firme Massey Ferguson, le holding public s’est lancé dans un projet pour fabriquer 5.000 tracteurs par an, avant de monter à 10.000. D’autres projets de moindre importance, pour fabriquer des moissonneuses batteuses (1.000 par an), des engins de travaux publics, ont été également lancés.

Renault, projet phare

Selon M. Dehimi, «toutes les échéances ont été respectées», en matière de réalisation, de formation, d’investissement et de préparation du personnel. Pour le projet Renault d’Oran, le premier véhicule devrait sortir d’usine en novembre prochain. A terme, la production montera en cadence pour atteindre 75.000 puis 150.000 dans une troisième étape. La gamme de véhicules produits sera élargie progressivement, pour quatre modèles, parallèlement au grand défi auquel sera confrontée l’industrie mécanique algérienne, le lancement d’un véritable réseau de sous-traitance.

Celle-ci est d’ailleurs considérée comme un défi majeur pour le secteur, selon un économiste. «Elle est à la portée d’entreprises de taille modeste», elle crée beaucoup d’emplois indirects, et elle permet «un transfert de savoir-faire, à défaut de transfert de technologie», dit-il. La partie algérienne table sur un taux d’intégration de 42% au sein de l’usine Renault quand celle-ci produira 75.000 véhicules. Mais au moment du démarrage, seules quatre pièces fabriquées en Algérie seront utilisées. Ce qui n’empêche pas M. Dehmi d’affirmer que «c’est une performance», et qui montre tout le décalage qui sépare encore les managers algériens de ceux qui font l’actualité mondiale.

Pourtant, les responsables algériens affirment haut et fort qu’il est possible d’aller très rapidement à un taux de 20% d’intégration pour l’usine Renault. Selon eux, tout ce qui est plastic, verre et câbles devrait être rapidement fabriqué localement. «A condition que les fabricants algériens répondent aux normes requises, ce qui n’est pas acquis».

Seules les entreprises publiques

Le marché de la production est dominé par quatre grands opérateurs, tous portés par l’investissement public, selon M. Dehimi. Aux côtés de la holding publique SG mécanique, qui regroupe une quarantaine d’entreprises, on retrouve la SNVI Rouiba, maintenue en vie vaille que vaille malgré ses déficits abyssaux, la société mixte montée en partenariat avec Renault, et une chaine de sous-traitants, près de 500, dont beaucoup n’ont toutefois pas atteint le standard requis.

L’explosion du marché automobile, qui a atteint 560.000 véhicules importés en 2012, avant de se contracter en 2013, a alarmé le gouvernement, qui a décidé de relancer les investissements dans le secteur. Mais le privé ne suit pas. L’effort est donc porté essentiellement par les entreprises publiques. La SGP Mécanique a ainsi investi 41 milliards de dinars, dont près de la moitié sont déjà engagés. Le chiffre d’affaires des entreprises relevant de son portefeuille est passé de 17 milliards de dinars (170 millions d’euros) en 2009 à 52 milliards en 2013 (520 millions d’euros). Il devrait franchir la barre des 100 milliards de dinars (un milliard d’euros) en 2016. Malgré ces montants, les entreprises publiques ne devraient entrer sur le marché des véhicules légers qu’au début de l’année prochaine. Leur part globale devrait rester très modeste. Mais c’est surtout leur modèle économique qui inquiète, car leur capacité à être concurrentielle n’est pas évidente.