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Les populations envahissent n'importe quel bout de pelouse : Oran souffre d'un manque flagrant d'espaces verts

par Ziad Salah

Pas la peine de rappeler les normes universelles pour se convaincre qu'Oran souffre d'un manque flagrant d'espaces verts.

Il suffit de se balader dans les différents quartiers de la ville et d'ouvrir les yeux. Dès les premiers rayons de soleil printaniers, les populations, notamment les enfants et les femmes, ont pratiquement pris d'assaut les quelques espaces verts existants. C'est ce qui s'est passé la semaine dernière, semaine de vacances scolaires, certes, mais aussi où la température a dépassé le cap de 20°C. Dans ce cadre, la direction des forêts, les responsables du secteur urbain El Menzah, ainsi que la dizaine d'associations qui ont participé à la célébration de la Journée mondiale des forêts durant toute une semaine, peuvent témoigner de l'ampleur du sevrage du citoyen en matière de nature et d'espaces verts. Les initiateurs de cette manifestation ont constaté la grosse demande citoyenne dans ce sens et, partant, la nécessité de préserver la forêt de Canastel toujours convoitée par les barons du béton armé.

Ailleurs, c'est la même soif relevée. Le nouveau jardin d'Oran, sur le nouveau front de mer, bizarrement lui aussi un espace sauvé de justesse, puisqu'il devait être cédé à un particulier, ne désemplit pratiquement pas. Jusqu'au coucher du soleil, les jeunes et même les familles se rendent sur ce site qui a été aménagé il n'y a pas si longtemps. Il offre la possibilité d'une vue panoramique sur la mer et constitue un prolongement naturel du mythique Sidi M'hamed cher aux Oranais d'antan. A quelques dizaines de mètres de ce jardin, une poche d'espace vert, équipée de quelques bancs, reçoit elle aussi du monde. Malgré son emplacement contre-indiqué pour ceux qui ont des difficultés respiratoires, elle est à l'entrée de la route qui mène vers le port et qui est très fréquentée. Notons que ce sont plutôt les couples, en quête d'un moment d'isolement, qui encombrent les bancs de cet espace. En haut, pas loin du rond-point, un autre petit espace, équipé de quelques jeux pour enfants, est lui aussi pris d'assaut par les enfants dont la plupart sont accompagnés par leurs mères. Quant au jardin la Rosière, il ressemble de plus en plus à une artère d'une ville du Sud-Est asiatique. En plus, les responsables locaux n'éprouvent aucune espèce de gêne pour louer des espaces de ce jardin, jadis une fierté d'Oran, à des vendeurs de boissons gazeuses. On relève la même chose du côté du rond-point d'El Bahia, offrant l'accès à l'autoroute menant vers Alger. En effet, pas loin de la grande station d'essence, un petit jardin public a été réalisé tout récemment. Lui aussi attire du monde, malgré sa situation à la lisière du tissu urbain. Il apparaît comme un luxe pour les habitants des anciens quartiers, notamment Saint Eugène où les vieux s'entassent les uns sur les autres dans la petite placette pour tenir leurs inéluctables parties de dominos. Sur la route reliant Oran à sa banlieue est, au niveau du tribunal d'Es-Seddikia, encore un petit espace est imparti aux enfants. Le nombre de voitures stationnant pas loin de l'endroit indique le taux de fréquentation de cet espace ne dépassant pas, dans le meilleur des cas, la surface d'une villa des derniers nantis.

A Akid Lotfi, un espace vert réalisé depuis plus d'une année est toujours fermé au public. Certes, les travaux de réalisation d'un autre équipement collectif peuvent justifier cette fermeture. Cependant, ce jardin offre la preuve par dix du manque d'espaces verts dans la ville. Les habitants de ce quartier et d'autres espèrent des décisions audacieuses de l'actuel wali, se revendiquant plus d'une fois acquis à un environnement urbain saint et équilibré. Ils attendent notamment l'aménagement de l'espace longeant le boulevard du Millénium en espace de détente et de loisirs pour les Oranais. Ils espèrent que la parcelle reliant le siège du tribunal d'Es-Seddikia au rond-point de l'hôtel Le Méridien soit préservée et consacrée à un espace vert où les jeunes Oranais peuvent se défouler en s'adonnant soit à la marche soit au footing.

Ils réclament l'ouverture du dossier du reboisement d'une partie de Ras El-Aïn et des Planteurs, opération décidée il y a une dizaine d'années et dont l'enveloppe financière a bel et bien été dégagée. Ils veulent que l'inscription d'un espace vert soit une norme incontournable dans n'importe quel projet urbanistique. Parce qu'ils commencent sérieusement à étouffer.