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Tunisie : Sécurité renforcée, en attendant le prochain Premier ministre

par Antoine Lambroschini De L'afp

Les partis tunisiens négociaient, encore, hier vendredi, à la veille de l'annonce prévue du nom du prochain Premier ministre qui succédera aux islamistes d'Ennahda, usés par une profonde crise politique et des violences jihadistes. Selon le syndicat UGTT, principal médiateur du «dialogue national», les chefs de partis ont repris, à la mi-journée, leurs pourparlers pour s'accorder sur le nom du prochain chef de gouvernement, un indépendant qui aura deux semaines pour composer un cabinet apolitique. «Le message qui ressortira du dialogue national est que les Tunisiens sont capables de compromis, malgré leurs différences», a affirmé le syndicat, sur sa page Facebook. L'UGTT a maintenu, à aujourd'hui samedi, l'annonce de l'identité du futur chef de gouvernement appelé à remplacer l'islamiste Ali Larayedh. Selon les médias et des élus, à l'issue de la première réunion, vendredi, des chefs de partis, deux personnalités se détachaient: Mohamed Ennaceur, 79 ans, et Ahmed Mestiri, 88 ans, des vétérans de la vie politique qui ont été ministres du premier président et père de l'Indépendance, Habib Bourguiba. Deux autres hommes, des économistes réputés, faisaient encore, dans la matinée, figure d'outsiders: Mustapha Kamel Nabli, 65 ans, ancien ministre de Zine El Abidine Ben Ali (1990-1995) et ex-gouverneur de la Banque centrale, limogé, sans ménagement, à l'été 2012, et Jalloul Ayed, 62 ans, un homme d'affaires qui a été ministre des Finances, en 2011, après la révolution.

Ali Larayedh s'est engagé à céder sa place afin de permettre la formation d'un cabinet apolitique pour sortir de la profonde crise déclenchée par l'assassinat, en juillet, du député d'opposition Mohamed Brahmi, attribué à la mouvance jihadiste. Il a, cependant, conditionné son départ à l'application stricte du calendrier des négociations, qui prévoit, notamment, la formation de la commission électorale, en théorie, et le lancement de la procédure d'adoption de la Constitution, en cours de rédaction, depuis deux ans. Sa démission formelle ne doit, d'ailleurs, pas intervenir avant la mi-novembre. Le calendrier semblait, cependant, déjà compromis pour la formation de l'instance électorale, un tribunal administratif ayant fait savoir, hier vendredi, à l'Assemblée nationale constituante (ANC) qu'elle ne pouvait en élire les membres tant que la loi créant l'organisme n'aurait pas été promulguée par la présidence et publiée au Journal officiel.

«On prévoit une réunion, aujourd'hui, pour décider de ce qu'il faut faire», a indiqué, à l'AFP, le service de presse de l'ANC. Les chefs de partis, réunis vendredi, doivent, aussi, prendre «un ensemble de décisions pour accélérer le processus d'adoption de la Constitution», selon l'UGTT.

Ces pourparlers interviennent dans un contexte de tension extrême avec une multiplication des violences attribuées à la mouvance jihadiste. Pour la première fois, depuis la révolution de janvier 2011, deux sites touristiques ont été visés, mercredi, l'un par un attentat-suicide qui n'a pas fait de victime et l'autre par une tentative qui a pu être déjouée, à temps. Or le secteur du Tourisme (7% du PIB, 400.000 emplois) est stratégique pour la Tunisie, qui peine à attirer les voyageurs, depuis la révolution de 2011. De plus, 9 gendarmes et policiers ont été tués, au cours du seul mois d'octobre, dans des heurts avec des groupes armés. Le patronat tunisien, l'Utica, s'est inquiété, jeudi, d'une «escalade du terrorisme qui s'attaque, désormais, à des secteurs stratégiques de l'économie, en cette conjoncture économique difficile». Le ministre du Tourisme, Jamel Gamra, a promis, hier, «une campagne de contrôle des systèmes de protection des hôtels et une autre campagne de formation» pour leurs employés. Il n'a, cependant, pas précisé de calendrier, ni de budget pour ces initiatives. Cependant, les patrouilles des forces de l'ordre ont déjà été, considérablement, renforcées dans les zones touristiques. Si aucune revendication n'a été annoncée, le gouvernement a attribué les attaques au mouvement salafiste «Ansar Ashariaa», accusé d'entretenir des liens avec «Al-Qaïda». Depuis plus d'un an, l'opposition accuse les islamistes d'Ennahda d'être responsables, par leur laxisme, de l'essor de ces violences.