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«Les micros ont brûlé le jour du drame»

par G. O.

Le responsable à Sonatrach commence son récit au milieu d'une cohue de journalistes qui étaient obligés de pousser des coudes pour pouvoir entendre ce qu'il disait. Tout représentant du groupe Sonatrach qu'il est, il n'avait pas de micro pour s'adresser à plus de 150 journalistes. Seuls ceux qui étaient à sa proximité pouvaient entendre. Le DG refusera plus tard de répondre aux questions qui, avait-il dit, lui avaient été déjà posées «tout au début». Il n'aura peut-être pas remarqué qu'il l'avait fait au milieu d'un total désordre. Tant pis pour ceux qui ne pouvaient pas être tout près de lui. «Je ne veux pas revenir sur les faits négatifs, je veux parler du positif, de la relance du complexe et de la reprise du travail», avait-il lancé avec une langue de bois bien frustrante pour «les chercheurs du moindre détail» que nous étions en ces moments. Mais il semble que la précision était adressée aux seuls journalistes nationaux.

En effet, que ce soit lui ou un autre cadre de Sonatrach, tous deux semblaient ne pas trop vouloir répondre aux questions des journalistes algériens alors qu'ils affichaient une parfaite disponibilité quand ils étaient abordés par les confrères étrangers. Curieuse perception de la communication que beaucoup de nationaux ont subie ce jour-là. Pourquoi n'avez-vous pas prévu de micros, comme ça tout le monde aurait entendu? demandent des journalistes. «Ils ont brûlé durant le drame que nous avons vécu», répond l'un d'entre les responsables. «Le plus judicieux aurait été que les organisateurs prévoient de ramener un micro d'Alger, Sonatrach en a, non?», lancent des journalistes. Il était clair que personne n'y avait pensé. Pourtant, les encadreurs étaient bien nombreux.

Les journalistes venus de plusieurs pays ont voulu, quelque part, reconstituer les faits pour essayer de comprendre et expliquer à leurs compatriotes ce qui a pu se passer. Les Japonais étaient les plus nombreux, jeudi dernier à In Amenas. Un journaliste de la télévision nippone, micro en main, suivi par une caméra, filmait et commentait tout ce qui avait dans les coins et recoins de la base de vie et du complexe gazier avec l'espoir, peut-être, que ceux de leur pays qui ont perdu des proches dans ce carnage terroriste, puissent faire enfin leur deuil. Les journalistes norvégiens, français, allemands, américains et autres, nourrissaient à ce moment-là, certainement le même sentiment. Il est vrai que ce voyage de presse a permis aux femmes et hommes des médias d'être en face de ceux qui ont vécu le drame. Ils n'ont rien dit de plus de ce qui n'a été déjà dit avant ce voyage médiatique. Mais les rencontrer même pour quelques instants, les écouter parler de leur calvaire, les suivre sur ces lieux du crime, nous a fait partagé la profonde douleur qui les ronge.