Envoyer à un ami | Version à imprimer | Version en PDF

LE MIROIR MAGHREBIN

par M. Saadoune

Les pays maghrébins sont très loin de faire l'union mais ils ont été «unis» dans la défaite et l'élimination de la Coupe d'Afrique des nations. Ils sont également unis, négativement, en matière de droits de l'homme ainsi que le montre le rapport mondial de Human Rights Watch rendu public hier.

Dans les deux pays qui ont connu des bouleversements «printaniers», la Libye et la Tunisie, les choses sont contrastées. La Tunisie est plus libre en matière de droit de réunion, d'association et d'expression mais les blocages de la transition empêchent la consolidation des progrès enregistrés après la chute de la dictature. La situation est encore plus grave en Libye où un nouveau pouvoir, faible, ne parvient toujours pas à faire rentrer les «innombrables groupes armés» qui existent dans le pays, de mettre fin aux arrestations arbitraires et à la torture des détenus? Comme quoi la chute d'un tyran n'ouvre pas nécessairement la voie à plus de libertés. Quid alors de l'Algérie et du Maroc ? Ces pays «stables» selon les propos de leurs dirigeants respectifs, qui ont pris l'initiative de faire des «réformes», de changer les lois et la Constitution (chose faite au Maroc et en «préparation» en Algérie), progressent-ils ? L'un avance-t-il mieux que l'autre ?

Au vu du rapport de Human Rights Watch, l'Algérie et le Maroc sont «unis» par le fait que les changements dans les lois n'ont pas d'impact sur la réalité vécue. L'Algérie a beau avoir connu une levée de l'état d'urgence en 2011 et le toilettage de certaines lois en attendant la révision constitutionnelle, les Algériens, note l'ONG, ne sont pas plus libres de «s'associer, former des partis politiques ou exprimer leurs opinions». En clair, ce qui est concédé par les nouvelles est neutralisé par d'autres «lois et règlementations répressives». Bref, les lois changent, mais la réalité ne change pas. Quid alors du Maroc ? Là également l'adoption d'une nouvelle Constitution, censée incarner une nouvelle, «ne s'est pas traduite par une amélioration des pratiques». Manifestations de rues réprimées, harcèlement judiciaire contre les «meneurs» contestataires et peine d'emprisonnement. La situation est encore plus grave dans les territoires sahraouis occupés par le Maroc.

ON LE CONSTATE, LA COMPETITION ENTRE ALGER ET RABAT NE S'ETEND PAS AU CHAMP DES DROITS DE L'HOMME ET DES LIBERTES. DANS CE DOMAINE, ON CONSTATE UNE FRAPPANTE SIMILITUDE QUI CONSISTE A ESSAYER DE DONNER LE CHANGE EN DIRECTION DE L'EXTERIEUR PAR UN DISCOURS «DE REFORME» ALORS QU'EN PRATIQUE LE VERROUILLAGE RESTE DE MISE. CERTES, LES DEUX GOUVERNEMENTS PEUVENT SE PREVALOIR DE «JUGEMENTS» PLUS POSITIFS EMANANT DE GOUVERNEMENTS OCCIDENTAUX. SAUF QUE LE PLAT «REALISME» DE CES DERNIERS, LE SOUCI DE LEURS INTERETS ECONOMIQUES ET POLITIQUES NE LES RENDENT PAS PLUS CREDIBLES QUE LES RAPPORTS DES ONG. SUR LA DUREE, CES RAPPORTS DES ONG DES DROITS DE L'HOMME, QUI SONT DEVENUES DES ACTEURS REELS DE LA SCENE INTERNATIONALE, ANNIHILENT TOUS LES EFFORTS MEDIATIQUES ACCOMPLIS PAR LES GOUVERNEMENTS. ET C'EST POUR CELA QU'ALGER COMME RABAT AURAIENT DAVANTAGE INTERET A SE REGARDER DANS CE MIROIR QUI N'A RIEN DE FLATTEUR. L'ILLUSIONNISME A SES LIMITES.