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FLN : Casting ouvert dans la Maison de l'obéissance

par Salem Ferdi

Ce qui se passe au FLN avec une destitution - encore inachevée et clairement réversible - d'Abdelaziz Belkhadem est un non-évènement pour la grande majorité des Algériens. Mais pour les gens du système et la presse qui en parle, même pour critiquer, c'est un grand évènement.

Et si c'est cela l'objectif: cultiver l'illusion d'une vie politique et d'un changement «dans l'air» ? La faible majorité avec laquelle Belkhadem a été destituée et le fait que ses adversaires soient constitués de clans divers qui ne s'entendent pas sur le nom du futur SG complique la donne. Statutairement, la session prévoyait l'élection d'un nouveau secrétaire général, ce qui donne à Belkhadem ou au candidat qu'il soutiendra éventuellement de reprendre les choses en main face à ses adversaires. Ces derniers ne veulent pas d'une élection rapide et veulent gagner du temps pour négocier le nom du futur SG. Autant dire que la presse et le personnel du système vont continuer à suivre le feuilleton FLN.

S'agit-il de créer de «l'animation» dans un pays où la scène politique s'est avérée dangereusement vide alors que les risques accumulés ont trouvé une traduction violente avec l'attaque de Tiguentourine et la guerre qui se déroule à nos frontières ? Mieux, cette vague de «départs» des responsables des appareils qui ont fait l'essentiel de la vie politique figurative de la dernière décennie sous le label de «l'Alliance présidentielle» est-elle destinée à donner le change alors qu'on prépare une Constitution où, à défaut d'un quatrième mandat pour Bouteflika, on aurait une «rallonge» de deux ans ?

C'est l'idée «en l'air» qui voudrait que le nombre de mandats présidentiels soit limité à deux mais en rallongeant sa durée qui passe de 5 à 7 ans. Le président Abdelaziz Bouteflika a lancé une boutade qu'il regrette peut-être - Tab jnana ! - qui a été fortement utilisée par ceux qui veulent hâter son départ et éviter un éventuel quatrième mandat. Le dégommage du personnel de figuration politique, ces «animateurs» du vide qui font du bruit depuis une décennie, serait ainsi un message subliminal que le président a besoin d'un peu plus de temps pour réaliser le «changement».

Bref, qu'il n'est pas aussi «Tab jnanou» qu'on le croit. Le départ des «animateurs» qui étaient autant de candidats potentiels d'une élection présidentielle balisée peut ainsi donner l'apparence que le «changement» est dans l'air. Au MSP, Aboujerra Soltani a le bilan le plus désastreux d'un parti «Frères Musulmans» dans le monde arabe.

Sa gestion a laminé son parti et il n'avait plus de crédit pour «jouer un rôle». Avec Ahmed Ouyahia, c'est une quasi-obtempération d'un bureaucrate qui «comprend les signaux» mais le RND n'a pas de direction «nouvelle», il est dans une gestion transitoire. Au FLN, la «chute» de Belkhadem est réelle, mais elle n'a pas le tranchant des «solutions» nées d'un arrangement consensuel au sein du régime. La partie reste ouverte.

UNE FRANCHISE COMIQUE !

Le feuilleton du FLN peut se poursuivre avec même une possibilité, sérieuse, que Belkhadem puisse reprendre la main. Avec une franchise qui confine au comique, Abdelkrim Abada, un anti-Belkhadem, explique pourquoi l'élection du secrétaire général ne peut avoir lieu. «Il n'y aura pas d'élection d'un nouveau secrétaire général comme l'a proposé Belkhadem dans l'ordre du jour de la session.

Car la question demande des consultations avec les institutions de l'Etat et avec diverses parties !». Certes, M. Abada ne dit rien d'extraordinaire, le FLN, hormis la période où il est entré en opposition sous la houlette de M. Abdelhamid Mehri, est un parti qui a été constamment dans la «maison de l'obéissance».

Mais manifestement, le casting de la destitution de Belkhadem a été délibérément maintenu ouvert puisqu'on n'a pas prévu, préalablement, le nom de son remplaçant. On peut y voir, bien sûr, un signe de désaccord au sein des actionnaires de la SPA du pouvoir. Mais comme s'il s'agit surtout de cultiver une illusion d'une vie politique, on peut penser que le casting ouvert est un choix délibéré.