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Névroses saisonnières ?

par Ali Brahimi

Selon les spécialistes en la matière, les névroses s'accentuent au cours des saisons du printemps et l'automne.

Pourtant, chez quelques pays d'Afrique et du monde arabe, les névroses semblent plutôt s'intensifier durant la période des vacances estivales ainsi qu'a l'occasion des fêtes souvent perturbées et se transformant en contrariétés particulièrement lorsqu'il s'agit des coupures d'électricité ainsi que celles de l'eau potable de plus en plus insupportables à endurer d'autant plus que ces désagréments se répètent en toutes saisons. Donc, le cumul de ces ennuis, en cette saison aux jours longs et courts la nuit, s'exprimerait en paroles agressives qui mènent aux empoignades et les coups et blessures voire morts d'homme, spécialement durant le mois de ramadhan (en principe celui du calme et la ferveur) qu'on va entamer demain coïncidant avec la journée la plus longue de l'année.

Ajouter à cela les fortes chaleurs allant crescendo, chaque année, qui agissent sur le tempérament des ménages déjà en proie aux multiples et lourds tracas de la vie quotidienne. Malgré cela, des gens font semblant de ne pas s'en soucier outre mesure, lorsqu'ils ont l'occasion d'être interviewés, alors qu'en leur for intérieur ils cachent leur bouillonnement. A l'image d'une cocotte-minute !

Autrefois, les foyers vivaient en harmonie avec les saisons. Pourtant, ils avaient peu de moyens matériels qu'actuellement. En revanche, ils possédaient l?inestimable richesse du calme et surtout le contentement en soi tout simplement. Certes, la population algérienne n'était pas nombreuse ni tellement instruite ni informée d'ailleurs, comme aujourd'hui, néanmoins avait le sens de la mesure économique. A ce sujet, il y a lieu de noter que les recettes et dépenses des ménages étaient scrupuleusement annotées et respectées, selon les niveaux de vie respectifs des bourses (koul ouahed oussortou), notamment pendant le mois du jeûne.

Jadis, dans notre patelin, au cours de la saison estivale coïncidant avec le carême, les chefs de familles, nullement nerveux, se levaient assez tôt avec de la bonne humeur et une énergie accrue. Les habitations, construites en matériaux locaux disponibles et coûtant trois fois rien, étaient entourées de jardins irrigués a l'aide de seguias, a ciel ouvert, menant l'eau fraîche du barrage en direction des vergers aux ombrages reposants. Les gens se désaltérer et faisaient leurs ablutions, avant la prière de l'aube, ainsi qu'après avait fait une sieste d'après-midi, ce qui les aidaient énormément d'affronter de bonne humeur le premier jour du carême et, ainsi de suite, pendant tout ce mois d'abstinences, de charités et d'adoration spirituelle.

A propos d'abstinence, la plupart des ménages se contentaient d'un peu de graisse animale ou de viande ovine fraîche (maintenant elle coûte 1000 DA/kg alors que voila à peine 40 ans elle avoisinait les? 15 DA /kg) incorporée dans un coulis de tomates, séchées à la maison, pimentées et parfumées aux fines herbes leur permettant d'assaisonner de la bonne soupe aux grains, du blé dur sinon d'orge, concassés (le frik), accompagnée de matliouates (galettes de blé tendre) dorées dans un creuset en terre cuite ( tajine). Un plaisir au naturel. Tout le reste, c'est du superflu puisque les gens de cette époque ne se rivaliser nullement pour le nombre de victuailles à préparer.

Par contre, ils étaient plutôt enclins en faveur du nombre des bonnes œuvres à réaliser. Comme par exemple : la solidarité et charité, le respect d'autrui, la courtoisie et l'indulgence, la dévotion?

Certes, il existait des clivages et les injustices, ainsi que du repli des consciences, à cause du système colonial, entre les composantes du peuple, néanmoins, toutes ou presque, elles étaient logées à la même enseigne en termes de niveau de vie pas aussi désarticulé et criard qu'actuellement, en termes de besoins sociaux essentiels, du simple fait que les gens s'alimenter à 100% d'ici et non ailleurs

A l'évidence, de nos jours, le monde est devenu petit, en termes de circulation et la rapidité des nouvelles ainsi que des marchandises (dont les viandes congelées en période ramadenesque), par contre les corruptions et les injustices s'agrandissent, au sein des composantes des peuples n'arrivant pas à se secouer de leur passivité et, qu'en plus, subissent les informations erronées a telle enseigne que les gens n'ont plus confiance en rien puisqu'ils ne savent plus distinguer entre le vrai et le faux, le noir et le blanc? (1). En clair, ils s'installent dans une permanente névrose d'échec

En Afrique, politiquement calfeutrée en termes de réelle ouverture démocratique liée à la bonne gouvernance des ressources, la famine tue plusieurs centaines de millions d'êtres humains. Comment ces gens peuvent-ils faire le jeûne ? Chez quelques pays arabes, notamment ceux qui ont fait le printemps 2011 objet de controverses et des critiques malveillantes voire de mauvaises intentions, les difficultés s'amoncellent certes néanmoins elles auraient la capacité d'espérer à un avenir meilleur. Espérer, c'est mieux que de désespérer et tomber dans l'abattement.

Certes, dans ces pays, les frictions politiques et politiciennes vont s'installer et s'accentuer pour encore longtemps, a l'image de toutes les révolutions, de par le monde, qui ont duré des décennies voire plus, néanmoins ces pays aboutiront un jour à l'évolution et non au statut quo ainsi qu'au découragement et la dévalorisation morale menant aux impasses difficiles à surmonter.

A propos d'impasses, les dictateurs des pays arabes perçus comme des bâtisseurs d'Etats viables, n'étaient en fait qu'un magma de malades psychiques se considérant comme les rois des rois sinon des guides éclairés. A ce propos, existait-il vraiment un Etat en Libye ? Le défunt leader Libyen lui-même l'a déclaré, maintes fois, qu'il n'est qu'in meneur des foules et non un chef d'Etat auprès de son pays. Alors pourquoi s'entêter à dire, voire jouer les bons Samaritains pour rien de profitable de surcroît, que la Libye d'avant la révolution était un Etat de droit voire meilleur et « généreux » que maintenant ?

Certes, pendant les mois du carême, le défunt guide libyen aidait, avec des ambitions derrière la tête, quelques pays africains notamment démunis, grâce à la manne financière, de son pays, qui lui permettait également de subvenir aux besoins alimentaires de quelques tribus du Niger, Mali., ainsi que de construire une mosquée, au Sahel, dont il a fait une fois la prière au mois du ramadhan. Avec le temps, la manne s'est orientée en direction d'autres projets pas très catholiques.

Enfin, après tant d'efforts méritoires le régime, de la Djamahiria libyenne, a laissé un pays névrosé et en lambeaux. Un échec complet. En ce début du carême, nous souhaitons une bonne santé à tous les musulmans maltraités et qui ne savent pas comment sortir du tunnel des névroses particulièrement le peuple syrien en train de souffrir le calvaire à cause d'un régime le plus névrosé des pays arabes. Espérons que le carême de l'année prochaine serait Syrien. Donc prions vivement, en ce mois des prières, en faveur de la victoire de la révolution syrienne. Inch Allah.

Note

1. Dans mon village, il y avait un vieux couple d'aveugles qui se chamailler à longueur de journée. Alors un jour du ramadhan, la vieille femme insultait son mari : « Espèce d'aveugle ». Et au mari de rétorquer : « Alors toi, tu vois un fil blanc dans un verre de lait ».