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Fruits et légumes: Des professionnels sceptiques

par Mokhtaria Bensaâd

Les prix des fruits et légumes restent encore instables sur le marché. La pomme de terre avait atteint la barre des 120 DA le kilogramme il y a quelques jours. Pour le consommateur, ce féculent cédé actuellement entre 85 et 100 DA pèse lourd sur le portefeuille sans oublier les autres fruits et légumes, tels que la tomate, le piment doux, la courgette? dont les prix ont connu une montée en flèche.

F ace à cette instabilité du marché, le ministère du Commerce rassure sur le retour à la normale de la situation tandis que les commerçants ne semblent pas aussi confiants sur la régulation du marché dans les prochains jours. Ils annoncent d'ores et déjà la couleur. Les prix connaîtront une baisse jusqu'à la fin du mois d'avril et au mois de mai correspondant avec la période de la récolte dans les régions de l'Ouest, à Mostaganem et Relizane et aussi Tipaza et Alger. Actuellement, les marchés de gros de légumes sont alimentés par les plantations sous serre situées à Biskra et El Oued. C'est ce qui nous a été confirmé par le porte-parole de l'Union Générale des Commerçants et Artisans Algériens (UGCAA), M. Boulenouar El Hadj Tahar qui a estimé le déficit enregistré pour la pomme de terre à 40%. Il a indiqué, d'autre part, que «la majorité des chambres froides que nous avons contactées ont toutes signalé que ces chambres sont actuellement presque vides des légumes à l'exception de quelques produits qui ne sont pas trop demandés». Le fait que ces chambres soient vides explique, selon notre interlocuteur, la flambée des prix constatée sur le marché.

Sur les raisons de cette hausse des prix, ces derniers jours, M. Boulenouar souligne qu'il « faut d'abord comprendre que les raisons qui déterminent les prix sont différentes. Il y a l'offre et la demande, le disfonctionnement du circuit de la distribution et le manque flagrant des marchés de proximité ». Sur cette dernière raison, notre interlocuteur argue que « la grande différence entre les prix du marché de gros et les prix du détail s'explique par le fait que la marchandise au niveau du marché de gros ne peut pas être distribuée rapidement et facilement pour arriver au consommateur parce qu'il n'y a pas de locaux de détail et pas de marchés de proximité ».

Concernant les intempéries que les agriculteurs et mandataires avancent comme arguments justifiant l'instabilité des prix, M.Boulenouar commente qu'il « ne faut pas cacher nos incompétences et notre manque de production par les intempéries. Ces dernières sont une raison de la flambée mais ne représentent pas la raison principale ». Pour notre interlocuteur, le manque de la production se traduit par la présence de 3.000 importateurs de fruits et légumes dans le secteur. « Cela signifie que notre production n'est pas encore suffisante pour répondre à la demande à l'échelle nationale ».

Le représentant de l'UGCAA pose le problème de l'absence de réseau national de distribution, annoncé en 2009. On est en 2012 et rien n'a été fait. Ce réseau devait comporter plus de 30 marchés de gros, 800 marchés de détail et 1.000 marchés de proximité. Il devait contribuer à la création de plus d'un million de postes d'emploi. L'autre avantage de ce réseau, explique M.Boulenouar, est « la garantie de la stabilité des prix. Il peut aussi diminuer la grande marge entre les prix de gros et les prix de détail. Comme il peut assurer une distribution équilibrée dans toutes les régions qui seront servies en même temps ». Mais ce projet n'a pas encore été concrétisé, regrette notre interlocuteur: «Jusqu'à présent, la majorité des communes n'ont pas encore dégagé les assiettes pour la réalisation de ces marchés. Ce sont les autorités locales qui sont responsables de ce retard. La réalisation de ce réseau implique les autorités locales, les institutions du ministère des Finances, le ministère de l'Industrie et le ministère du Commerce». Sur les assurances du ministère quant à la stabilité du marché, le porte-parole de l'UGCAA souligne que «nous, nous reflétons la réalité du terrain. Au niveau du gouvernement, on regarde la rentabilité du pétrole. Le gouvernement croit que chaque problème peut être résolu par l'argent du pétrole. L'économie basée sur la rente pétrolière n'est pas une bonne économie».