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MAGHNIA: «Loueur de voitures» ,un métier à risques

par Cheikh Guetbi

Paradoxalement, le nombre d'agences de location de voitures est sans cesse en augmentation malgré les maints problèmes que rencontrent les propriétaires actuellement en activité.

Elles sont plus de 450 agences en activité et quelque 400 en instance au niveau de l'Ansej et Cnac dans la seule commune de Maghnia, ce qui représente une densité d'un véhicule pour 50 habitants !, un nombre au-delà de la norme qui engendre forcément des difficultés de divers ordres (on suppose 4 véhicules par agence). «Quand le nombre d'agences était restreint, nous nous permettions de sélectionner notre clientèle ce qui se répercutait positivement sur le rendement. Actuellement nous ne pouvons nous permettre ceci et nous sommes contraints de faire «confiance» au premier venu, ce qui n'est pas sans risques aussi bien pour le véhicule que pour le propriétaire», avoue l'un des anciens du métier Benali Adesslem, lequel ajoute «notre implantation dans cette zone frontalière n'est pas pour arranger les choses».

En effet, si le vol des véhicules loués est un phénomène qui se généralise à l'intérieur du pays et contre lequel les services de sécurité se démènent, en cette région extrême ouest où l'interdit est favorisé par sa situation géographique frontalière, le transport de marchandises de contrebande ou prohibées à bord de véhicules loués, notamment la drogue et l'alcool, est la principale hantise des propriétaires. Les conséquences sont souvent lourdes pour les propriétaires en cas d'interpellation d'un quelconque loueur transportant une des marchandises citées. «Le plus récent cas est un jeune qui a utilisé le véhicule que je lui ai loué pour le transport d'une grande quantité de vin à partir de Témouchent. Arrêté au niveau d'El-Kihal par des gendarmes après que le véhicule eut été percuté par un autre et eut dérapé plus loin, le jeune conducteur m'a injustement incriminé ? Notre position n'est pas des plus confortable», dira notre interlocuteur qui a cité quelques cas où les propriétaires ont été incriminés à tort dans des cas de trafic de stupéfiants et ont pour certains été placés sous mandat de dépôt heureusement relâchés après instruction.

Quant à la récupération des véhicules saisis dans ce cadre, la tâche n'est pas aisée et c'est à un réel parcours du combattant auquel sont confrontés les propriétaires tellement les procédures pénales sont lentes et sinueuses. «Malgré que le contrevenant a été jugé au niveau du tribunal de Témouchent, après avoir été placé sous mandat de dépôt et condamné à 6 mois avec sursis et 5 millions de centimes, la justice ne m'a jusqu'alors pas restitué mon véhicule», témoigne notre interlocuteur qui appréhende une autre étape, et pas des moindres, qui l'attend : le remboursement par l'agence d'assurance qui semble être le palier le plus délicat. Notre interlocuteur, Abdesslem, se dit être continuellement en litige avec son assureur et nous étale une dizaine d'affaires pour lesquelles il a dû «batailler» des années durant pour encaisser son dû et 2 récentes dont l'une est en cours de traitement depuis voilà une année et l'autre qui traîne à cause du PV des autorités locales que l'assurance estime manquer au dossier alors qu'il en a fourni? Le déboire avec son agence d'assurance, l'a également connu à travers le vol de sa mobylette laquelle était assurée tous risques : «Pour le remboursement on m'a exige étrangement la carte grise et les clés de la mobylette ! Et ce en plus de l'attestation d'opposition et un désistement notarial établi à mes frais au profit de l'agence d'assurance dans le cas où la mobylette sera retrouvée !», dira-t-il

Les anecdotes ne manquent pas chez notre interlocuteur lequel nous rapporte celle où il a été sommé par la douane de payer la somme de 675 millions dans les 15 jours qui suivent au risque d'être emprisonné et ce à la suite de l'interpellation d'un de ses locataires transportant une quantité de Ricard. Abdesslem, après avoir vécu une semaine de cauchemar et avoir frappé à toutes les portes, il s'est avéré que tout ceci était une grossière erreur qui l'incriminait à la place du contrevenant.

Le tracas pour ces agences de location ne se limite malheureusement pas aux seuls cas de transport de produits interdits, les accidents sont une source de soucis. Après chaque sinistre, c'est une série de tracasserie que ces agences endurent pour la restitution de leurs véhicules et le remboursement par les agences d'assurance. Ces agences de location essuient bien d'autres déboires tel le paiement de la fourrière pour le temps que les véhicules ont été immobilisés durant les différentes procédures et pour lequel celles-ci n'y sont pour rien ou encore le tourment à chaque fois qu'un véhicule n'est pas rentré à la date prévue dans le contrat notamment quand le locataire éteint le téléphone et ne donne pas signe de vie durant des jours.