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La PME, parent pauvre du financement bancaire

par Yazid Taleb

La formule est de Réda Hamiani : «En Algérie, les petites entreprises restent petites et les moyennes entreprises restent moyennes». Les PME restent encore en mal de financement.

Les banques publiques ont créé des sociétés de capital-risque et de leasing. Sans conviction, juste pour répondre aux injonctions.

La formule du président de FCE exprime bien la frustration des patrons algériens, majoritairement dirigeants de PME de taille modeste, face au peu de soutien du système bancaire. Ce dernier reste rétif à financer des investissements qui les feraient passer à une taille supérieure. L'Algérie comptait en 2009 près de 350 000 PME, privées dans leur quasi-totalité. La particularité de leur financement est qu'il s'opère essentiellement sur fonds propres ou par le biais de crédits bancaires. Le montant de ces derniers est loin d'être négligeable. Selon le délégué général des banques et des établissements financiers (ABEF), M.Benkhalfa sur «2700 milliards de dinars de crédits à l'économie accordés par les banques en 2008, 90% sont allés aux entreprises, toutes formes confondues. Les PME représentent dans ce total 40 à 45%».

 Certes, les crédits ne sont pas absents, mais ils sont orientés de façon excessive vers le financement des importations au détriment des activités de production. On sait également que ces crédits financent beaucoup plus l'exploitation que l'investissement qui reste le véritable parent pauvre du financement bancaire. Ce constat vaut pour le financement du développement des PME existantes et encore davantage pour la création de nouvelles entreprises. Cela explique la création ou l'annonce de la création de nouveaux instruments financiers développés de longue date dans les pays voisins ou comparables. Des fonds de garantie ont été créés et sont opérationnels depuis quelques années. Leur démarrage est cependant laborieux et le nombre d'entreprises que compte leur portefeuille ne dépasse pas quelques centaines.

 Plus récemment les autorités financières algériennes ont exigé des banques publiques nationales de créer des sociétés de capital-risque et de leasing. La lenteur remarquable qui caractérise ce processus et le niveau de ressources mis en œuvre semble cependant poser problème.

Les banques privées s'intéressent au leasing

Le créneau du leasing est occupé en Algérie depuis son apparition en 2002 par un petit nombre d'institutions financières presque toutes étrangères. ALC, Maghreb Leasing, Société Générale, Natixis, Sofinance, Al baraka ou encore BNP Paribas se partagent un marché à la taille encore modeste - environ 25 milliards DA en 2009 - mais qui se développe à un rythme très élevé. Les activités concernées sont surtout le transport et les travaux publics ainsi que des activités de production comme l'agroalimentaire ou les matériaux de construction.

 Pour stimuler son développement, les autorités du secteur ont donné instruction, à la fin de l'année 2008, aux banques publiques de créer leurs propres filiales spécialisées dans cette activité. Elles l'ont fait en 2009 mais sans excès de zèle. La BEA (Banque extérieure d'Algérie) s'est distinguée des autres banques publiques en s'associant, fin 2009, à la Banco Espirito Santo (Portugal) et à un fonds d'investissement international Swicorp pour créer IJAR Leasing Algérie, doté d'un capital de 3,5 milliards de dinars.

 Les deux autres banques publiques, la BNA et la BDL, ont choisi de rester en territoire connu et ont signé un accord pour créer de concert la Société nationale de leasing (SNL).

 La même démarche a été adoptée pour le capital-risque. L'activité, quasi-inexistante en Algérie a la réputation de favoriser, notamment, la création d'entreprises dans des activités comme les nouvelles technologies. Elle est très développée chez le voisin tunisien où l'on dénombrait récemment près d'une quarantaine d'institutions spécialisées. Dans ce domaine aussi, la BEA se distingue. Alors que la BADR et la CNEP ont annoncé la création d'une filiale commune, la BEA a choisi de s'associer au français SIPAREX pour créer un fonds de capital-risque doté de 50 millions d'euros. Il devrait investir dans différents secteurs via des prises de participations minoritaires dans les entreprises retenues qui pourront être aussi bien à capitaux algériens qu'étrangers.

 Au total la mise en place de ce dispositif de facilitation de l'investissement s'opère à un rythme qui fait planer de sérieux doutes sur la réalisation des objectifs affichés par les autorités algériennes en matière de développement des PME. Les projets couverts par les fonds de garantie ne sont encore qu'au nombre de quelques centaines. La plupart des sociétés de leasing ou de capital-risque créées sur injonction par les banques publiques ne sont pas encore opérationnelles, ni même agréées par le Conseil de la monnaie et du crédit.