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Un autre réseau de faux dinarsdémantelé à Marseille

par Djamel Belaïfa

Après Lyon, un second réseau de trafiquants de faux billets algériens a été démantelé lundi à Marseille. Au total, 15 personnes im-pliquées dans ce trafic ont été arrêtées par les services de police des deux métropoles. Le réseau était capable d'imprimer des billets quasiment parfaits grâce à du papier fiduciaire volé en 2006, destiné à la Banque centrale d'Algérie. En attendant les suites de l'enquête, les autorités judiciaires françaises assurent que l'essentiel du réseau a été neutralisé. Selon l'AFP qui cite des sources judiciaires, trois personnes ont été mises en examen lundi à Marseille pour association de malfaiteurs en vue de contrefaçon de dinars algériens. Il s'agit, selon la même source, d'un démantèlement de réseau de fabricants de faux dinars distinct de celui démantelé à Lyon.

 A l'instar du réseau lyonnais, les premiers éléments de l'enquête ont révélé les liens étroits entre les faussaires marseillais et le grand banditisme. Selon des sources proches de l'enquête, l'un des individus appréhendés à Marseille a de solides amitiés dans le banditisme mais les deux autres sont inconnus des services de police. La semaine dernière, 12 autres personnes, interpellées à Paris et Marseille notamment après plusieurs mois d'investigations, avaient déjà été mises en examen et écrouées dimanche à Lyon dans le cadre d'un dossier distinct de faux-monnayeurs de dinars.

 Comme dans le dossier lyonnais, l'affaire marseillaise a démarré avec le braquage à Marseille, en novembre 2006, d'un camion transportant des rouleaux de papier fiduciaire destinés à la Banque centrale d'Algérie et qui ont servi à la fabrication de faux dinars. Selon l'AFP, une première personne, suspectée d'avoir recelé le poids lourd dans un hangar de la région, avait été écrouée dans ce dossier en 2007 par la juge du tribunal de grande instance (TGI) de Marseille, avant d'être remise en liberté.

 Dans un second temps, le TGI d'Aix-en-Provence avait été saisi après l'arrestation de deux Tunisiens porteurs d'une valise pleine de faux dinars à l'aéroport de Marignane, proche de Marseille. L'affaire avait franchi un dernier pas avec la découverte de certains rouleaux marseillais en janvier 2009 dans une imprimerie clandestine du Sud de l'Italie.

 Lors d'une conférence de presse tenue lundi, le responsable de la division économique et financière de la police judiciaire (PJ) de Lyon, Jean-François Ligout, a indiqué que «la spécificité de cette affaire vient du fait que le papier utilisé était destiné aux banques centrales». Il provenait d'une cargaison d'une quarantaine de rouleaux subtilisés lors d'une attaque à main armée à Marseille en novembre 2006 et destinés à la Banque centrale d'Algérie. Deux à trois de ces rouleaux, permettant chacun de fabriquer jusqu'à 500.000 billets, avaient été retrouvés à Naples, en Italie, en janvier 2009. Les enquêteurs, qui avaient assisté en septembre dans le Vaucluse à la remise de trois de ces rouleaux par des voyous marseillais au réseau lyonnais, n'en ont retrouvé que deux intacts, le troisième étant en cours d'utilisation. Selon l'agence française qui cite la PJ, les faux-monnayeurs avaient déjà réussi à écouler au moins 200.000 faux billets.

 «L'essentiel du réseau a donc été neutralisé» avant qu'une «production de masse» n'ait pu se mettre en place, a précisé le directeur adjoint de la PJ, Michel Neyret, à l'AFP, ajoutant que les billets d'une valeur de 10 euros (1.000 DA) étaient revendus 3 à 4 euros chacun. Les douze délinquants constituant le réseau lyonnais, interpellés après quelques mois d'investigations, ont été écroués dimanche pour association de malfaiteurs et contrefaçon.

 Les hommes, dont certains étaient connus pour des faits de grand banditisme, encourent trente ans de réclusion criminelle. Deux frères, imprimeurs dans le centre de Lyon, constituaient «le maillon essentiel du réseau». Des milliers de billets ont été saisis dans leur entreprise.

 Pour M. Neyret, «si les malfaiteurs avaient décidé de fabriquer des billets de 1.000 dinars, le plus répandu en Algérie, c'est parce qu'ils avaient le papier à disposition: si ça avait été du papier destiné à la Banque centrale turque, ils auraient fabriqué de l'argent turc». Le papier fiduciaire volé comportait déjà les trois signes de sécurité (bande holographique, filigrane et fil) nécessaires à la fabrication des dinars algériens, ce qui a facilité la tâche des faussaires. «Il leur restait à ajouter le visage et le montant, ainsi que les numéros du billet», a souligné M. Ligout. L'enquête a révélé que l'étape de la «numérotation» était réalisée à Saint-Etienne par un informaticien qui avait mis au point un logiciel spécifique. «Les billets étaient quasiment parfaits», a ajouté M. Ligout.