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Naama: Comment sortir de l'impasse ?

par M. S. Laradji

Benajaa, Attik, Achouri, Abdelmoula sont autant de hameaux et d'agglomérations épars rattachés à la commune d'El-Kasdir, une localité rurale située à l'extrême limite de l'axe frontalier algéro-marocain, à quelque 150 km, à l'ouest de Nâama, chef-lieu de wilaya.



Elle compte 7.479 habitants vivant essentiellement de l'élevage et du commerce. La commune, de par l'étendue de son territoire, fait de vastes plaines steppiques, est dénommée pays du mouton par excellence. Elle compte près de 85.000 têtes d'ovins et quelque 1.200 têtes de bovins. Il faut dire que la création d'un centre d'insémination artificielle à Belhenjir (Aïn Séfra) a eu l'impact nécessaire sur l'amélioration génétique du cheptel et même sur le mode de production eu égard à l'adhésion des éleveurs aux programmes de vulgarisation agricoles initiés par les services de la DSA et la chambre de l'agriculture.

Sur la route qui relie Abdelmoula à Kasdir, ce n'est plus cette nature hostile et apocalyptique qui s'offrait aux yeux du visiteur constamment balayée par des tempêtes de sable qui piquent les yeux et assèchent la gorge. Aujourd'hui, grâce à la politique de mise en défens pratiquée en alternance sur les parcours steppiques, la steppe a repris du poil de la bête, aidée en cela par les importantes précipitations dont a bénéficié la région ces derniers mois, lesquelles pluies ont rempli les cuvettes et régénéré les parcours steppiques. «El-Hamdou Lilah», rétorque El-Hadj Mahmoudi, avant de renchérir «Aujourd'hui, les éleveurs de la région respirent mieux, notamment après les dernières précipitations qui ont permis la reconstitution du couvert végétal. Ainsi, le prix de l'aliment du bétail a chuté sensiblement, affichant 1.300,00 DA/q au lieu de 2.500,00 DA, il n'y a pas si longtemps.»

El-Hadj, au même titre que les éleveurs de sa zone, a bénéficié d'un logement dans le cadre des 570 aides à l'habitat rural dont a bénéficié la commune d'El-Kasdir et ses hameaux. Avec son fils aîné, également bénéficiaire, ils ont bâti une spacieuse demeure qui les protège du froid et des inondations. «A aucun moment l'Etat ne nous a abandonnés, faut-il le reconnaître, dira encore El-Hadj, nous avons bénéficié de nombre de programmes de soutien de l'Etat. Que ce soit les éleveurs, les agriculteurs ou les producteurs de lait, chacun dans son domaine d'activité a pu avoir accès à un quelconque programme de soutien. Il faut aussi dire que les autorités locales, à leur tête monsieur le Wali, restent attentives à nos préoccupations sachant que l'économie locale repose essentiellement sur l'élevage ovin et bovin.»

M. Demouche Aïssa, président de l'APC de Kasdir, indique que sa commune, au même titre que les autres agglomérations qui lui sont rattachées, a bénéficié de plusieurs actions et programmes de développement, inscrits au titre du PCD notamment. Ce sont au total seize opérations qui ont été clôturées (2006/2007/2008) répondant aux besoins prioritaires des citoyens. L'on cite à titre illustratif, la rénovation des réseaux d'AEP avec les branchements particuliers au niveau des localités d'El-Kasdir et Abdelmoula, le règlement définitif du problème de pénurie d'eau dont souffraient les hameaux de Achouri Tayeb, Abdelmoula notamment et ce, grâce à la mise en service de deux nouveaux forages avec châteaux d'eau, et l'acquisition, dans le cadre du Fonds de développement des Hauts-Plateaux, de pompes émergées et autres équipements de forage ayant permis de rétablir le réseau AEP pour les populations locales. Le hameau de Achouri Tayeb, de son côté, a pu avoir raison, selon le maire, du déficit qu'il accusait en matière de couverture sanitaire, à la faveur de la construction d'une salle de soins avec un logement d'accompagnement, une opération inscrite au titre du PRDRI, a-t-il précisé.

A l'idée d'évoquer le secteur de la santé de Kasdir, celui-ci dispose, selon notre interlocuteur, de deux médecins et deux infirmiers exerçant au niveau de deux salles de soins assurant tant bien que mal la couverture sanitaire des populations locales surtout pendant la saison des grandes chaleurs où le taux des piqués par scorpions est très élevé. Le handicap qui empoisonne la vie de la population locale se traduit, selon le maire, par le déficit poignant qu'enregistre le secteur concernant le service maternité. «A défaut d'un service de maternité sur les lieux, relève-t-il, on continue à évacuer les accouchements vers le ESPS de Mekmen Benamar (80 km), c'est une opération qui ne passe pas sans risques pour la mère et l'enfant». Au sujet de ce désagrément qui affecte la quasi-totalité des zones reculées de la wilaya de Nâama, notre interlocuteur propose, en guise de solution, d'encourager la formation de jeunes filles issues du terroir pour pouvoir les fixer sur place parce que, et compte tenu de l'éloignement de cette cité, rares sont les sages-femmes qui acceptent de s'y rendre. Dans ce même contexte, notre interlocuteur signale que les enfants d'El-Kasdir qui naissent dans les services de Mekmen Benamar sont pour la plupart inscrits dans les registres de cette commune.

A titre illustratif, pour le compte du mois de décembre, 3 naissances seulement ont été inscrites pour le compte de l'état civil d'El-Kasdir, alors qu'en réalité, il y en a plus. Dans le sillage des préoccupations majeures, M. Benour parlera de la faiblesse de l'outil de réalisation au niveau de la commune d'El-Kasdir. Des projets sont toujours en attente d'un quelconque preneur, tels le programme des 6 logements à Kasdir, la bibliothèque communale, la nouvelle cantine pour le cycle primaire, outre deux groupes scolaires. L'éloignement de Kasdir et Abdelmoula, explique le n°02 de l'APC, par rapport aux points d'approvisionnement en matériaux de construction, conjugué à la faiblesse de l'offre du prix du béton suscitent peu d'intérêt aux yeux des entreprises de réalisation, performantes notamment, en dépit des appels d'offres lancés maintes fois dans les journaux.

Autour de la scolarisation des enfants de la région, M. Demouche revient pour dire que l'absence d'un établissement scolaire du cycle moyen notamment, à Abdelmoula, nous contraint à assurer le transport d'un bon nombre d'élèves vers Kasdir, dont 37 filles, quotidiennement (100 km, aller-retour). Avec l'aide des autorités concernées, nous avons pu stabiliser les garçons avec l'ouverture d'un régime internat, en attendant de le faire également pour les filles, dès l'ouverture du nouvel internat prévue en principe en janvier 2009.

Il faut dire que M. le Chef de l'exécutif de wilaya nous a beaucoup aidés en mettant à notre disposition des bus qui assurent régulièrement le ramassage scolaire inter-urbain.

Les localités d'El-Kasdir et Abdelmoula et leurs agglomérations ne sont pas à l'abri du spectre du chômage. Les longues années de disette ont fait que nombre de petits éleveurs ont abandonné l'élevage ovin pour venir grossir les rangs des chômeurs. Pour y faire face, la commune a bénéficié de 312 contrats d'insertion (toutes formules confondues), 89 micro-crédits délivrés par l'ANJEM et 14 locaux à usage professionnel destinés à l'emploi de jeunes. «On déplore malheureusement, dira un élu, la réticence des jeunes face aux crédits bancaires, à cause de l'intérêt prohibé, selon eux...».

«L'amélioration du cadre de vie des citoyens n'est pas restée en marge des programmes de développement, souligne à son tour M. Degdeg Boudjemaa, membre de l'APC, ajoutant, qu'outre la réalisation d'une décharge publique avec tous les équipements pour la préservation de l'environnement déjà fragilisé par la désertification, toutes les localités sans distinction ont bénéficié d'aménagements urbains tels les trottoirs, la voirie urbaine, l'éclairage public, lesquels aménagements ont donné un peu plus de ?look' à ces agglomérations les rendant un peu plus attrayantes. On s'efforce tant bien que mal de répondre à l'attente des jeunes en matière de culture et autres divertissements avec la réalisation d'une maison de jeunes à Abdelmoula où une dizaine de micro-ordinateurs sont mis à la disposition des jeunes en attendant l'ADSL. La localité de Kasdir, pensent les autochtones, demeure encore une zone enclavée. Une seule et unique route y mène. La nécessité d'inscrire une nouvelle route sur Aricha (50 km) puis Tlemcen ouvrira, à coup sûr, de nouvelles perspectives de développement pour cette localité.